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Channel: U ZINU alias l'oursin - Le blog de Jean Maïboroda.
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Au YEMEN : un génocide ?

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Au  YEMEN : un génocide ?



"U zinu" s'effacera devant un analyste dont il partage largement le point de vue pour alerter ses visiteurs sur le drame vécu par la population yéménite et l'hypocrisie, voire le silence coupable des "Occidentaux".
Voici donc, tiré du site "AGORAVOX" un article édifiant de Bruno Guigue. ( 26 novembre 2017)



 

La France complice d’un crime de masse au Yémen



 

En 2011, la France a détruit la Libye au nom des droits de l’homme. En 2017, elle participe à la destruction du Yémen au nom du chiffre d’affaires. La “patrie des droits de l’homme” n’est plus qu’un tas de fumier.


Dans l’indifférence générale, le pays le plus pauvre du monde arabe subit l’horreur d’une agression étrangère meurtrière. Bombardée nuit et jour, la population est affamée par le blocus. Le Yémen compte 27 millions d’habitants. Selon l’ONU, 10 millions d’entre eux nécessitent une aide humanitaire d’urgence, 7 millions sont menacés par la famine et un million sont la proie d’une épidémie de choléra. La pénurie de carburant paralyse les transports, le fonctionnement des réseaux d’eau potable, d’électricité, d’assainissement.

L’aviation saoudienne n’épargne ni les écoles, ni les hôpitaux, ni les lieux de culte. Répandant la terreur, elle cherche à faire plier le peuple yéménite. Ce n’est pas une guerre contre des combattants, mais une entreprise de démoralisation de la population, de destruction totale, d’arasement des infrastructures. L’action combinée des frappes aériennes et du blocus (aérien et maritime) vise à mettre à genoux une population tout entière. Riyad prétend défendre le gouvernement légitime. Mais alors, pourquoi imposer le blocus à l’ensemble du pays ?

Depuis mars 2015, la coalition dirigée par les wahhabites massacre des civils en prétendant combattre une rébellion coupable de s’être alliée avec l’ex-président Ali Abdallah Saleh contre son successeur pro-saoudien Abd Rabbo Mansour Hadi. Cette intervention a fait plus de 10 000 victimes, mais elle n’a pas fait bouger les lignes de force. L’offensive terrestre a échoué, la résistance yéménite est farouche, et un missile a frôlé la capitale saoudienne le 9 novembre. Des centaines de milliers d’enfants souffrent de malnutrition dans un pays dévasté par les bombes et affamé par le blocus, mais cette guerre est sans issue.

La propagande saoudienne la justifie, pourtant, en invoquant la légalité internationale. Le mouvement “Ansarullah” a investi la capitale du pays en septembre 2014 et poussé le président Mansour Hadi à la démission en janvier 2015. Ce succès inattendu a pris de court les Saoudiens et leurs parrains occidentaux. Décidés à intervenir, ils ont obtenu du conseil de sécurité de l’ONU le vote de la résolution 2216 du 14 avril 2015 condamnant la prise du pouvoir par les Houthis et réaffirmant la légitimité du président Hadi.

Cette décision onusienne a offert une couverture juridique autorisant Riyad à frapper le Yémen sans ménagement pour vaincre la rébellion. Perversion du droit international, c’est un chèque-en-blanc qui permet au pays arabe le plus riche d’écraser sous les bombes le pays arabe le plus pauvre. Tout se passe comme si l’agresseur bénéficiait d’une sorte de permis de tuer à grande échelle, avec la bénédiction de puissances occidentales qui lui fournissent des armes en quantité illimitée tandis que la rébellion houthie se voit frappée par l’embargo.

Les armes utilisées pour massacrer le peuple yéménite, la coalition ne les a pas trouvées au pied d’un sapin de Noël. Ce sont des armes occidentales. Les bombes larguées sur les enfants yéménites sont d’une précision remarquable. Félicitations ! Le système de guidage électronique est français. Grâce à leur rayon d’action, les F-35 saoudiens peuvent frapper où ils veulent. Encore bravo, les avions-ravitailleurs sont français. Le blocus maritime qui affame la population yéménite est d’une redoutable efficacité. Cocorico, la marine française y participe. L’histoire retiendra que Hollande et Macron ont fait crever les enfants yéménites.

Que vaut la vie de ces pauvres gosses, en regard de notre merveilleuse industrie de la mort ? La monarchie saoudienne est le premier client de la France. Elle lui a acheté 9 milliards d’armes entre 2010 et 2016, soit 15 à 20 % des exportations françaises. Sans états d’âme, la République arme le bras de l’assassin. Depuis deux ans, Riyad commet un crime de masse dont Paris est complice. En 2011, la France a détruit la Libye au nom des droits de l’homme. En 2017, elle participe à la destruction du Yémen au nom du chiffre d’affaires. La “patrie des droits de l’homme” n’est plus qu’un tas de fumier.

Curieusement, le chœur des pleureuses est aux abonnés absents. Il est vrai qu’on n’est pas en Syrie. Ni “Casques blancs” experts en maquillage, ni parlementaires écolos en vadrouille, ni droits-de-l’hommistes pour signer des pétitions. Le Yémen n’intéresse personne à Saint-Germain-des-Prés. Il est sorti des écrans-radar de la bobosphère. Mais pourquoi tant d’indifférence de la part de bonnes âmes si promptes à s’affliger du malheur planétaire ? La propagande occidentale nous fournit immédiatement la réponse : c’est la complicité des Houthis avec Téhéran. Appartenant à la communauté chiite “zaydite”, le mouvement “Ansarullah” servirait les ambitions de l’Iran.

Le voilà donc, son crime impardonnable, à ce Yémen rebelle. Il est du côté des forces du mal, il pactise avec les mollahs. Les Houthis et leurs alliés admirent le Hezbollah libanais, ils soutiennent la Syrie souveraine, ils croient encore au nationalisme arabe. C’est inadmissible. Pire encore, ces incorrigibles Yéménites, eux, n’ont jamais marchandé leur solidarité avec le peuple palestinien. Pour les impérialistes et leurs larbins, la rébellion victorieuse à Sanaa est une scandaleuse anomalie, une verrue à supprimer du paysage. C’est le Vénézuéla de la péninsule arabique. Ne cherchons pas plus loin les raisons du calvaire qu’on inflige à ce peuple courageux.


 
 
 
 
 


Anniversaire du 11 novembre 1918

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Anniversaire du 11 novembre 1918
Tout simplement, ce texte chanté par Léo Ferré

https://www.youtube.com/watch?v=oe62VKNA2Pk


 
Tu n'en reviendras pas toi qui courais les filles
Jeune homme dont j'ai vu battre le coeur à nu
Quand j'ai déchiré ta chemise et toi non plus
Tu n'en reviendras pas vieux joueur de manille
Qu'un obus a coupé par le travers en deux
Pour une fois qu'il avait un jeu du tonnerre
Et toi le tatoué l'ancien légionnaire
Tu survivras longtemps sans visage sans yeux
On part Dieu sait pour où ça tient du mauvais rêve
On glissera le long de la ligne de feu
Quelque part ça commence à n'être plus du jeu
Les bonshommes là-bas attendent la relève
Roule au loin roule train des dernières lueurs
Les soldats assoupis que ta danse secoue
Laissent pencher leur front et fléchissent le cou
Cela sent le tabac la laine et la sueur
Comment vous regarder sans voir vos destinées
Fiancés de la terre et promis des douleurs
La veilleuse vous fait de la couleur des pleurs
Vous bougez vaguement vos jambes condamnées
Déjà la pierre pense où votre nom s'inscrit
Déjà vous n'êtes plus qu'un mot d'or sur nos places
Déjà le souvenir de vos amours s'efface
Déjà vous n'êtes plus que pour avoir péri
Paroliers : Léo FERRE / Louis ARAGON
Paroles de Tu N'En Reviendras Pas © Les Nouvelles Editions Meridian



 

Pierre Rabhi : ENTRETIEN.

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Pierre Rabhi : "S'examiner soi-même par soi-même, avec réalisme"

 

 
Pierre Rabhi pose sur l'évolution du monde un regard critique. Il a anticipé beaucoup de désillusions nées des rapports économiques entre les pays et les hommes.
 
Pierre Rabhi pose sur l'évolution du monde un regard critique. Il a anticipé beaucoup de désillusions nées des rapports économiques entre les pays et les hommes. © Guillaume Atger/Divergence

 

Carla Bruni, Aymeric Caron et Yann Moix ans la pétaudière de Ruquier

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Carla Bruni,  Aymeric Caron et Yann Moix ans la pétaudière de Ruquier

Isabelle Mourral,  auteur(e)  d'une « Réflexion sur les embûches et les perversions du langage »  sobrement intitulée "Le sens des mots"  aurait hier au soir  (18/09/17) chez Ruquier apprécié la controverse qui opposa les deux questionneurs/commentateurs de service et le revenant Aymeric Caron. 

Plateau fort éclectique pour ce qui est des invités,  mais je ne retiendrai que deux séquences particulières.


Bien que je sois fort éloigné de la sphère politique de son époux, j'ai été séduit par la douceur, la réserve, l’intelligence et la culture non prétentieuse de Carla Bruni, sublime en sa modestie, et remarquable de délicatesse dans l'expression publique de confidences intimes.

Mais il m'a fallu subir hélas la jactance vaniteuse du ratiocineur amphigourique et l'acrimonie  de celle que d’aucuns (dont je ne suis) se plaisent et complaisent à qualifier d’hystérique.
Soumis à la question par nos deux inquisiteurs de service, le pauvre Caron, autrefois lui-même grand inquisiteur en ces lieux, fut sommé de s’expliquer sur l’utilisation du terme de "terrorisme" qu’il aurait inconsidérément osé appliquer aux multinationales, au néo libéralisme, et aux industriels pollueurs de la planète.
Si j’en crois le petit Torquemada de lucarne, ou tout au moins selon ce que j’ai compris de sa philippique surjouée à l'encontre de Caron, le terme "terroriste" doit être désormais une sorte d’appellation contrôlée, appellation comme l'exige la "bien pensance", dûment stigmatisante. Elle doit surtout être exclusivement réservée à une catégorie d’individus bien précise, bien délimitée, bien cernée, bien identifiée. Elle ne saurait concerner les maîtres du nouveau monde, entendons par là celui du capital, du libéralisme et de la mondialisation.
Nous vîmes donc un Moix éructant et, accessoirement, une pasionaria de basse fosse s’acharner sur ce pauvre Caron qui, pour l’emploi soi-disant inapproprié d’un mot, ne put lui-même en placer un, comme eût dit ma mère-grand.
Nous fûmes en conséquence, et sans indulgence, gratifiés d’une controverse, voire d’une vocifération délirante sur le "bien nommer" et le "mal nommer", sur le bon usage des mots, et sur leur sens, leurs non-sens, leurs contre sens et leurs sens interdits.

Je terminerai en précisant que la hargne du Moix et de sa compagne en œuvre de dénigrement épargna, comme il se doit, l'innocente Carla, qui tout au contraire, fit pour sa part l'objet d'intenses flagorneries et de frétillantes adulations. Je suppose que cela fut dû en partie à ses mérites incontestés, mais aussi, Dieu me pardonne cette mauvaise pensée, au statut matrimonial de l'intéressée et au charme "diabolique" persistant qui est le sien.


 


Au YEMEN : un génocide ?

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Au  YEMEN : un génocide ?



"U zinu" s'effacera devant un analyste dont il partage largement le point de vue pour alerter ses visiteurs sur le drame vécu par la population yéménite et l'hypocrisie, voire le silence coupable des "Occidentaux".
Voici donc, tiré du site "AGORAVOX" un article édifiant de Bruno Guigue. ( 26 novembre 2017)



 

La France complice d’un crime de masse au Yémen



 

En 2011, la France a détruit la Libye au nom des droits de l’homme. En 2017, elle participe à la destruction du Yémen au nom du chiffre d’affaires. La “patrie des droits de l’homme” n’est plus qu’un tas de fumier.


Dans l’indifférence générale, le pays le plus pauvre du monde arabe subit l’horreur d’une agression étrangère meurtrière. Bombardée nuit et jour, la population est affamée par le blocus. Le Yémen compte 27 millions d’habitants. Selon l’ONU, 10 millions d’entre eux nécessitent une aide humanitaire d’urgence, 7 millions sont menacés par la famine et un million sont la proie d’une épidémie de choléra. La pénurie de carburant paralyse les transports, le fonctionnement des réseaux d’eau potable, d’électricité, d’assainissement.

L’aviation saoudienne n’épargne ni les écoles, ni les hôpitaux, ni les lieux de culte. Répandant la terreur, elle cherche à faire plier le peuple yéménite. Ce n’est pas une guerre contre des combattants, mais une entreprise de démoralisation de la population, de destruction totale, d’arasement des infrastructures. L’action combinée des frappes aériennes et du blocus (aérien et maritime) vise à mettre à genoux une population tout entière. Riyad prétend défendre le gouvernement légitime. Mais alors, pourquoi imposer le blocus à l’ensemble du pays ?

Depuis mars 2015, la coalition dirigée par les wahhabites massacre des civils en prétendant combattre une rébellion coupable de s’être alliée avec l’ex-président Ali Abdallah Saleh contre son successeur pro-saoudien Abd Rabbo Mansour Hadi. Cette intervention a fait plus de 10 000 victimes, mais elle n’a pas fait bouger les lignes de force. L’offensive terrestre a échoué, la résistance yéménite est farouche, et un missile a frôlé la capitale saoudienne le 9 novembre. Des centaines de milliers d’enfants souffrent de malnutrition dans un pays dévasté par les bombes et affamé par le blocus, mais cette guerre est sans issue.

La propagande saoudienne la justifie, pourtant, en invoquant la légalité internationale. Le mouvement “Ansarullah” a investi la capitale du pays en septembre 2014 et poussé le président Mansour Hadi à la démission en janvier 2015. Ce succès inattendu a pris de court les Saoudiens et leurs parrains occidentaux. Décidés à intervenir, ils ont obtenu du conseil de sécurité de l’ONU le vote de la résolution 2216 du 14 avril 2015 condamnant la prise du pouvoir par les Houthis et réaffirmant la légitimité du président Hadi.

Cette décision onusienne a offert une couverture juridique autorisant Riyad à frapper le Yémen sans ménagement pour vaincre la rébellion. Perversion du droit international, c’est un chèque-en-blanc qui permet au pays arabe le plus riche d’écraser sous les bombes le pays arabe le plus pauvre. Tout se passe comme si l’agresseur bénéficiait d’une sorte de permis de tuer à grande échelle, avec la bénédiction de puissances occidentales qui lui fournissent des armes en quantité illimitée tandis que la rébellion houthie se voit frappée par l’embargo.

Les armes utilisées pour massacrer le peuple yéménite, la coalition ne les a pas trouvées au pied d’un sapin de Noël. Ce sont des armes occidentales. Les bombes larguées sur les enfants yéménites sont d’une précision remarquable. Félicitations ! Le système de guidage électronique est français. Grâce à leur rayon d’action, les F-35 saoudiens peuvent frapper où ils veulent. Encore bravo, les avions-ravitailleurs sont français. Le blocus maritime qui affame la population yéménite est d’une redoutable efficacité. Cocorico, la marine française y participe. L’histoire retiendra que Hollande et Macron ont fait crever les enfants yéménites.

Que vaut la vie de ces pauvres gosses, en regard de notre merveilleuse industrie de la mort ? La monarchie saoudienne est le premier client de la France. Elle lui a acheté 9 milliards d’armes entre 2010 et 2016, soit 15 à 20 % des exportations françaises. Sans états d’âme, la République arme le bras de l’assassin. Depuis deux ans, Riyad commet un crime de masse dont Paris est complice. En 2011, la France a détruit la Libye au nom des droits de l’homme. En 2017, elle participe à la destruction du Yémen au nom du chiffre d’affaires. La “patrie des droits de l’homme” n’est plus qu’un tas de fumier.

Curieusement, le chœur des pleureuses est aux abonnés absents. Il est vrai qu’on n’est pas en Syrie. Ni “Casques blancs” experts en maquillage, ni parlementaires écolos en vadrouille, ni droits-de-l’hommistes pour signer des pétitions. Le Yémen n’intéresse personne à Saint-Germain-des-Prés. Il est sorti des écrans-radar de la bobosphère. Mais pourquoi tant d’indifférence de la part de bonnes âmes si promptes à s’affliger du malheur planétaire ? La propagande occidentale nous fournit immédiatement la réponse : c’est la complicité des Houthis avec Téhéran. Appartenant à la communauté chiite “zaydite”, le mouvement “Ansarullah” servirait les ambitions de l’Iran.

Le voilà donc, son crime impardonnable, à ce Yémen rebelle. Il est du côté des forces du mal, il pactise avec les mollahs. Les Houthis et leurs alliés admirent le Hezbollah libanais, ils soutiennent la Syrie souveraine, ils croient encore au nationalisme arabe. C’est inadmissible. Pire encore, ces incorrigibles Yéménites, eux, n’ont jamais marchandé leur solidarité avec le peuple palestinien. Pour les impérialistes et leurs larbins, la rébellion victorieuse à Sanaa est une scandaleuse anomalie, une verrue à supprimer du paysage. C’est le Vénézuéla de la péninsule arabique. Ne cherchons pas plus loin les raisons du calvaire qu’on inflige à ce peuple courageux.


 
 
 
 
 

VENEZUELA : UN AUTRE SON DE CLOCHE

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VENEZUELA : UN AUTRE SON  DE CLOCHE

source : https://lavamedia.be/fr/venezuela-lepouvantail-agite-par-loccident/



Un autre son de cloche que celui diffusé par les médias dominants.
                                                                                                     
                                                                                                    u Zinu






 


 




 

Venezuela : l’épouvantail agité par l’Occident
 


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EVA DERONT, Revue Lava, 2 décembre 2017
 
 
Entre inflation, perturbation de l’approvisionnement en biens de première nécessité et barricades, le Venezuela est devenu l’épouvantail agité en Europe pour effrayer tous ceux qui pourraient être tentés par une remise en cause du système capitaliste. Jusqu’en juillet 2017, l’opposition vénézuélienne de droite et d’extrême droite a profité des pénuries et de la dégradation de la situation économique pour déclencher une nouvelle vague de violences et tenter de renverser le gouvernement de Nicolás Maduro. Sans complaisance avec les erreurs du gouvernement, Maurice Lemoine, ancien rédacteur en chef du Monde Diplomatique, fait partie des rares journalistes de terrain qui cherchent à donner une vision factuelle des événements, en replaçant le sabotage économique au centre de l’analyse de la situation politique. Un aperçu de l’ampleur de la tâche et des obstacles auxquels peut se confronter tout gouvernement authentiquement de gauche…
Dans cet entretien, Maurice Lemoine analyse les récents développements des crises qui secouent le Venezuela. Il décrit les tentatives de déstabilisation nationale et internationale, ainsi que les réactions de la population et de l’opposition.
Cet entretien, relu et réactualisé par Maurice Lemoine sur notre proposition, a été réalisé à Paris le 13 octobre 2017, deux jours avant les élections des gouverneurs régionaux
.
 
Article repris par   venezuelainfos
mardi 5 décembre 2017
dans AGORAVOX




Éva Deront. Entre avril et juillet 2017, le Venezuela a été le théâtre d’affrontements et de violences de la part de militants de droite et d’extrême-droite (attaque à l’hélicoptère contre la cour suprême, jeune afro-descendant brûlé vif, barricades, attaques contre la Garde nationale). Comment caractériser l’extrême droite vénézuélienne par rapport aux groupes que l’on connaît en Europe ?
 

Maurice Lemoine.  À 75 %, les manifestants d’opposition au Venezuela ne sont pas des fascistes. Ils appartiennent à une classe moyenne – classe moyenne « haute » et classe moyenne « basse » – qui, majoritairement, par son mode de vie, s’identifie à la bourgeoisie et aspire à rejoindre cette « élite ». (1)
Une partie de leurs homologues seraient dans la rue, ici aussi, si Mélenchon en France ou le PTB en Belgique arrivaient au pouvoir et commençaient à prendre des mesures sociales considérées comme radicales.
Mais il y a aussi une droite dure et une extrême droite. Ce qui les caractérise ? Leur objectif clairement affiché : renverser par n’importe quel moyen, y compris la violence, le chef de l’État. En France, nous avons eu deux périodes de cohabitation : Balladur avec Mitterrand et Jospin avec Chirac. La première chose qu’ont faite ces Premiers ministres en arrivant à l’Assemblée nationale n’a pas été de dire : « On se donne six mois pour renverser le Président. » Au Venezuela, si.
Dans les manifestations, l’opposition utilise des groupes de choc, une espèce de mélange de nervis, de délinquants et, près de la frontière, dans les États de Miranda et Táchira, de paramilitaires colombiens… Il y a aussi, c’est très intéressant, toute une génération de jeunes petits bourgeois qui vivent leur mai 68 à l’envers. Ils sont comme des fous : il n’y a jamais eu autant de selfies à Caracas ! Ils passent leur temps dans les manifestations et ont réellement l’impression de se battre pour la liberté.
 
Vous avez passé trois semaines, en juin, dans les manifestations : arrivez-vous à quantifier cette participation ?
 
Prenons une manifestation d’environ 20 000 personnes : il y en a environ 15 000 de la classe moyenne — « On n’est pas content, on en a marre du castro-communisme ! » —, dont 3000 jeunes, qui vivent l’aventure de leur vie, et puis les violents, nervis et lumpen. Ce sont eux qui vont défier la Garde nationale.
L’opposition utilise des groupes de choc, une espèce de mélange de nervis, de délinquants et de paramilitaires colombiens
Un universitaire de gauche – on dénonce beaucoup les mensonges ou l’incompétence des journalistes, mais il faudrait aussi s’intéresser à ce que racontent les universitaires – a décrit les manifestations de la façon suivante : les gens manifestent, la Garde nationale réprime, et les jeunes s’interposent pour protéger… C’est un mensonge éhonté ! Je les ai vus faire : les gens manifestent, les groupes de choc prennent la tête de la manifestation, vont défier la Garde nationale, et… les gentils petits bourgeois et le reste sont derrière. Et à un moment, c’est l’affrontement entre groupes.
 
Quelle est alors la réaction des forces de l’ordre ?
 
L’encagement d’une manifestation comme on a pu le voir en France lors des mobilisations contre la loi El-Kohmri, ça n’existe pas. Paradoxalement, la police est beaucoup plus provocatrice et répressive en France qu’elle ne l’est au Venezuela. Là-bas, ce n’est pas compliqué, des groupes bloquent la autopista [autoroute urbaine, NDLR] qui joint l’Est et l’Ouest de Caracas. Tous les jours ils viennent là, s’installent, provoquent la Garde nationale ; et puis au bout de deux heures, la Garde nationale vient dégager la voie avec des canons à eau et des lacrymogènes. Ce n’est pas agréable, mais les méthodes sont moins perverses qu’ici.
Tout ce qui se passe au Venezuela en ce moment – que ce soit la violence, les pénuries, les difficultés – n’est pas destiné aux Vénézuéliens, mais à la communauté internationale.
En tant que journaliste, je n’ai pas eu de problème avec les forces de l’ordre. À un moment, j’étais tout seul avec mes deux appareils photo, tout le monde était parti en cavalant ; la Garde nationale arrive, s’arrête et repart. Je n’ai pas vu les journalistes se faire matraquer. En revanche, je ne me sentais pas particulièrement en sécurité au milieu des groupes de délinquants.
 
Depuis l’élection de l’Assemblée constituante le 30 juillet 2017, on assiste à une scission au sein de l’opposition, affaiblie. Les violences ont cessé. Ces groupes de choc aujourd’hui, que font-ils ? Et que prévoit la droite suite aux élections régionales du 15 octobre ?
 
Je ne sais pas quelle est leur stratégie. L’élection aux régionales s’est déroulée dans des conditions normales puisque l’opposition avait décidé d’y participer. Comme toujours, on a assisté dans un premier temps à l’application de leur logique « pile je gagne, face tu perds ». Donc là où ils ont gagné, cinq États, ils ont dit : « on a gagné ». Mais là où les chavistes l’ont emporté, dans dix-huit États, l’opposition a crié : « il y a fraude ! ». Évidemment, on oublie ensuite que les représentants de tous les partis avaient participé aux essais techniques du système électoral et qu’ils avaient tous donné leur aval.
Aujourd’hui, alors que quatre des cinq gouverneurs élus de l’opposition ont reconnu l’Assemblée constituante, il y a deux problèmes pour l’opposition : leur base est complètement désarçonnée et ils ne savent plus où ils en sont. Ils ont envoyé leurs forces dans la rue pendant quatre mois en leur disant : « on renverse Maduro, c’est une dictature » ; ils ont accusé le Conseil national électoral de tous les maux et, d’un seul coup, ils leur annoncent : « On arrête tout et on participe aux élections. » Les radicaux vouent les dirigeants aux gémonies, les autres se demandent à quoi ça rime. Et par ailleurs, ils ont organisé des primaires pendant lesquelles ils se sont mutuellement lynchés. Maria Corina Machado, la seule qui ne voulait pas participer aux élections, a par exemple lancé son nouveau parti Soy Venezuela. Et celui qui a tiré son épingle du jeu, c’est le vieux parti social démocrate  Accion Democratica, qui est resté un peu en retrait pendant les violences.
Quant à la suite des événements, elle est aussi incohérente : mettant en cause le Conseil National Electoral, une partie de la MUD [Table de l’unité démocratique, coalition anti-chaviste – NDLR] décide qu’elle ne participera pas aux élections municipales de décembre, tout en annonçant qu’elle se prépare pour la présidentielle de 2018…
 
Qu’est ce qui fait qu’on a eu et qu’on a encore cette attaque de la droite nationale et internationale sur le Venezuela, à l’instar d’Emmanuel Macron dénonçant « une dictature qui tente de survivre au prix d’une immense détresse humaine » ? (2)
 
La première raison, un grand classique, ce sont les ressources : pas seulement en pétrole [le Venezuela possède les plus grandes réserves de pétrole au monde, NDLR (3) ], mais également en eau, en or, en minerais en tous genres. En témoigne le grand projet de mise en exploitation de l’Arco minero, l’Arc minier, une zone riche en ressources minérales, or, fer, coltan, qui représente environ 10 % du territoire vénézuélien. La deuxième chose, c’est que, du fait de l’action de Chávez, et de son aura, même après son décès, le Venezuela est devenu un symbole. Faire tomber Maduro, c’est faire tomber le chavisme. Qu’on aime ou pas Maduro, si on prend les choses raisonnablement, des élections présidentielles auront lieu en 2018. Mais ce que l’opposition veut, c’est pouvoir proclamer à la face du monde : « Une révolte populaire a fait tomber le chavisme ! » Cela neutraliserait pour les vingt prochaines années l’espoir et la dynamique que la révolution bolivarienne a soulevés dans toute la région. Donc il faut que Maduro tombe.
Il y a des problèmes sérieux au Venezuela, y compris une gestion pas toujours optimale du gouvernement, mais la guerre économique et la déstabilisation démultiplient les difficultés
Les fameuses pénuries…  Elles ne sont pas dues à la gestion de Maduro. Comme par hasard, il y en a eu systématiquement avant toutes les élections : l’ensemble de la production de Polar [une des principales entreprises alimentaires, NDLR] a reculé de respectivement 37 %, 34 % et 40 % avant l’élection présidentielle de 2013, pendant la phase de violence de 2014 –  la Salida – et avant les législatives de décembre 2015. Battu, Capriles, candidat de l’opposition aux dernières élections présidentielles, avait déclaré après l’élection de 2012 : « Chávez, c’est le Cassius Clay de la politique. » Donc, après sa mort, quand ils ont vu Maduro arriver, ils se sont dit : « Lui, on va lui régler son compte ! » Et les pénuries se sont aggravées. À l’époque du blocus pétrolier fin 2002-début 2003, tout le monde a admiré Chávez, car il a tenu pendant deux mois face à la guerre économique ; paradoxalement, bien peu se rendent compte de la capacité de résistance de Maduro : cela fait trois ans qu’il résiste !
Quant au traitement médiatique et à la récupération politique de la « famine » : Je suis revenu avec cinq cents photos de la rue, des manifestations des chavistes et de l’opposition… Tous les gens m’ont dit : « Il a fallu qu’on change d’habitudes alimentaires, j’ai perdu deux kilos. » Voilà. Mais le traitement qui en est fait, c’est comme si vous regardiez les gens dans la rue, ici, et que vous me disiez qu’ils ont l’air famélique… Ça ne tient pas debout.
 
Que ce soit Jean-Luc Mélenchon en France ou Pablo Iglesias en Espagne, la gauche européenne est constamment attaquée lorsqu’elle évoque le Venezuela. Quels sont les enjeux de la situation ?
 
Il ne se passe pas un jour où l’on ne tape pas sur le Venezuela dans les médias français ; mais 300 000 morts au Congo et… rien. Pourquoi cette différence ? C’est clairement un enjeu de politique intérieure. La cible en France, c’est la France insoumise ; en Grande-Bretagne, Corbyn ; en Espagne, Podemos ; en Allemagne, Die Linke. Le discours est simple : « si vous votez Mélenchon, vous serez dans la même situation que le Venezuela. »
Tout ce qui se passe au Venezuela en ce moment – que ce soit la violence, les pénuries, les difficultés – n’est pas destiné aux Vénézuéliens, mais à la communauté internationale. La violence sert à faire apparaître le gouvernement de Maduro comme répressif. Pourtant, Maduro prône régulièrement le dialogue, pour montrer à cette communauté internationale qu’il est prêt à discuter. Il y a peu, il a accepté que le Mexique et le Chili, qui ne sont pas des amis du Venezuela, fassent partie des médiateurs internationaux. Si les observateurs et la communauté internationale étaient de bonne foi, ils ne pourraient que constater qu’il y met de la bonne volonté et que c’est l’opposition qui bloque.
 
N’est-ce pas naïf ? L’opposition a constamment répété qu’elle ne voulait pas de dialogue et qu’elle souhaitait renverser le gouvernement.  (4)
 
Elle est plus perverse que ça. Une partie d’entre elle passe son temps à dialoguer tout en annonçant à ses partisans qu’il n’est pas question de dialoguer. Et de fait, elle rompt régulièrement les conversations en mettant en cause le pouvoir. Double bénéfice : d’un côté, elle paraît modérée, rapport à la communauté internationale ; de l’autre, elle laisse les radicaux mener la déstabilisation. Et Maduro apparaît comme « le méchant », alors qu’il accepte la médiation du Mexique, du Chili et de Zapatero, qui n’a rien d’un gauchiste…
Pour comprendre la situation économique qui perturbe grandement la vie des Vénézuéliens aujourd’hui, pourriez-vous revenir sur le partage des tâches entre l’État et le secteur privé qui représente toujours plus de 90 % des entités industrielles ? A-t-on une idée de l’absence d’investissement dans les domaines clefs tels que l’énergie, l’agroalimentaire ?
La légende veut que le Venezuela soit un pays pétrolier qui n’a jamais pensé à diversifier son économie. Si l’on admet qu’il n’a pas réussi à s’extraire de cette dépendance pour l’exportation – 90 % des devises du pays proviennent de l’exportation du pétrole par le secteur public –, cela ne veut pas pour autant dire que rien d’autre n’existe à l’intérieur du pays : 84 % de la production nationale ne provient pas du pétrole, mais de la manufacture, des services, du commerce et de l’agriculture (5) ; ce n’est néanmoins pas suffisant pour en faire un pays industriel.
Parmi les économistes qui arrivent au constat qu’il n’y a pas eu de diversification, aucun ne propose de solution. Or, en regardant à l’international, quels sont les pays qui ont pu changer leur mode de développement ? Les tigres asiatiques dans les années 1990. Qu’ont-ils utilisé ? Leur avantage comparatif : l’exploitation de la main d’œuvre dont le coût a été réduit au minimum. De même pour les maquiladoras mexicaines, les usines de sous-traitance. Par définition, ce n’est pas l’optique des gouvernements de gauche d’Amérique latine.
 
Dans un article paru dans sur le site Mémoire des luttes, vous établissez un parallèle entre cette déstabilisation et la guerre économique qui a visé Salvador Allende, au Chili, au début des années 70. Quels en sont les principaux axes ?
 
Il y en a quatre : des pénuries organisées, une inflation artificiellement provoquée, un embargo commercial et un blocus financier international. Pour importer les biens de première nécessité, l’État fournit des dollars à taux préférentiel au secteur privé. En 2004, les montants atteignaient 15 milliards de dollars et il n’y avait aucune pénurie. En 2013, on arrivait à 31 milliards et tous les biens de première nécessité avaient disparu. On parle souvent du papier toilette : d’où vient la pénurie, alors que l’entreprise qui importe et distribue les rouleaux, Kimberley Clark, a reçu 1000 % de devises en plus en 2014 qu’en 2004 et 2011 ?
Des sommes monstrueuses, allouées à l’importation des aliments ou des médicaments, ont été détournées par le secteur privé
Depuis 2003, un contrôle des changes a été instauré pour éviter la fuite des capitaux. Dans tous les pays où l’on a agi de même, on a assisté au développement d’un marché parallèle. La particularité du Venezuela, et là on est dans la guerre économique, c’est que ce marché parallèle échappe à toute logique économique. Le taux de change est manipulé par le site DolarToday, depuis la Colombie et Miami. (6)
Le dollar parallèle peut atteindre 10 000 bolivars pour un dollar, voire 42 000 bolivars actuellement [60 000 à la mi-novembre, NDLR] : cela n’a aucune rationalité, mais entraîne, évidemment, des conséquences désastreuses sur l’inflation et le niveau de vie.
Un autre instrument de la déstabilisation économique, c’est la contrebande vers la Colombie. Par exemple, des médicaments achetés avec les dollars préférentiels arrivent au Venezuela, où ils ne sont pas mis en vente : ils repartent directement vers la Colombie, souvent avec la complicité de militaires et de gardes nationaux achetés par les mafias. Des tonnes de médicaments. Et, quinze jours après, ils reviennent au Venezuela où ils sont revendus dix fois plus cher au marché noir.
Autre exemple : en 2004, les entreprises pharmaceutiques ont reçu environ 600 millions de dollars pour acheter des produits à l’extérieur et les revendre en bolivars au Système public national de santé. Il n’y avait alors pas de pénurie. En 2013 et 2014, on ne trouve plus de médicaments et pourtant les entreprises ont obtenu entre 2 et 3 milliards de dollars… Sur place, j’ai demandé : « Pourquoi ne nationalisez-vous pas et pourquoi l’État n’importe-t-il pas lui-même les médicaments ? » On m’a répondu, ce qui demande à être vérifié : « Les laboratoires internationaux ne vendront pas directement à l’État vénézuélien car ce serait se mettre à dos toute la corporation ». Ces problèmes, relativement récents dans ce domaine, amènent à poser la question : « Doit-on et peut-on court-circuiter les laboratoires pharmaceutiques occidentaux ? » Un début de solution a peut-être été trouvé. En septembre dernier, le Venezuela a signé un accord avec l’Inde pour y acquérir une partie de ses médicaments.
 
En réponse à cette situation, observez-vous une évolution dans les mesures économiques prises par l’État ?
 
On ne discerne pas de boussole économique ou idéologique évidente. Face aux problèmes, faut-il envisager des nationalisations ? Je prends l’exemple du pain : historiquement, le Venezuela ne produit pas de blé, c’est l’État qui l’importe. Il le fournit à des minoteries privées qui transforment le blé en farine, mais, ensuite, un véritable chaos affecte la distribution. La majorité des boulangeries du pays n’est pas livrée régulièrement tandis que d’autres, plus favorisées, leur revendent au prix fort une partie de leurs surplus, ou préfèrent vendre des gâteaux, des brioches, des sandwiches… plutôt que du pain. J’ai posé la question à un ancien ministre de l’économie, Luis Salas : puisqu’il y a sabotage, pourquoi ne nationalisez-vous pas ? Il répond — et comment lui donner tort ? —: « l’État ne peut pas se charger de tout et n’a pas la compétence pour faire du pain et distribuer du pain ». Ça peut toute fois se discuter, compte tenu de la présence d’oligopoles : 50 % de la production totale d’aliments traités par l’agro-industrie sont concentrés dans 10 % du total d’entreprises privées. (7)
 
Cela a pourtant été fait en partie pour le pétrole : alors que, avant son arrivée, l’état-major de PDVSA prenait le chemin de la privatisation, Chávez a fait en sorte que l’État devienne l’actionnaire majoritaire de toutes les concessions du Venezuela, et reprenne le contrôle des activités d’exploration, de production et des services annexes…
 
Oui. D’ailleurs Salas me parle du pain, puis il s’arrête et réfléchit : « Tout de même… Si nous sommes capables de faire du pétrole, nous devons être capables de faire du pain…» Et il ajoute : « Ce qu’il faut, ce n’est pas nationaliser, mais créer des entreprises alternatives avec la base. » De fait, on connaît les problèmes induits par des nationalisations systématiques : on crée à terme une bureaucratie, avec ses contraintes et inconvénients.
 
L’établissement d’une bureaucratie n’est pas automatique : la base chaviste a souvent demandé à avoir plus de contrôle sur l’appareil d’État.
 
Oui, mais se pose le problème de la ressource humaine. Dès sa naissance, la révolution bolivarienne a manqué de cadres, qui sont très souvent liés à l’opposition. Le meilleur exemple en est la réforme agraire. Elle a été faite et elle a eu des succès : de 2001 à 2010, la production agricole a augmenté de 44 % ; 7 millions d’hectares ont été régularisés, les paysans obtenant des titres de propriété ; 3,5 millions d’hectares ont été repris au latifundio et 1 million de nouveaux hectares ont été mis en production, même si cette augmentation de la production a été contrebalancée par une augmentation de la consommation. Du début de la réforme agraire en 2001 à la fin 2004, par exemple, près de 7 000 coopératives ont été créées. Elles ont dramatiquement manqué de cadres. Il reste 2 % de paysannerie au Venezuela, sans les cadres techniques nécessaires pour relancer une agriculture moderne, écologique, etc. Les paysans se sont souvent retrouvés livrés à eux-mêmes, ils ont beaucoup de mal à moderniser ce secteur. C’est ce manque d’efficacité et d’efficience qui fait apparaître la réforme agraire comme un semi-échec, alors que c’est globalement une réussite.
Ensuite, l’appareil d’État n’est pas constitué que de militants : vous avez le ministre, cinq vice-ministres, vingt cadres engagés, qui veulent que les choses avancent et puis, derrière, une pesanteur terrible de ceux qui sont là, qui ne sont pas forcément chavistes, et qui soit sabotent, soit ne font pas grand-chose.
 
Les licenciements de ceux qui voulaient forcer Chávez à la démission, après les lock-outs patronaux de 2002-03, n’ont eu lieu que dans le secteur pétrolier ?
 

Oui, 18 000 personnes en tout. En même temps c’est difficile : vous vous mettez dans la position de vous faire accuser de totalitarisme, d’État policier… Et il faut savoir composer avec les réactions de la « communauté internationale ». La base chaviste, elle, elle réclame la mano dura, une « main ferme ».
El bachaqueo, le marché noir qui s’est établi suite au détournement et à l’accaparement des biens de première nécessité n’existerait pas si on se trouvait dans un État policier. Les Cubains, par exemple, ont instauré une sorte de contrôle social à travers les comités de défense de la révolution, les CDR, dans tous les quartiers. Et vous n’avez pas ce phénomène de corruption.
Des sommes monstrueuses, allouées à l’importation des aliments ou des médicaments, ont été détournées par le secteur privé. Le reproche que l’on peut faire à l’État n’est pas de ne pas avoir investi, mais de ne pas avoir assez contrôlé. En ce moment, après l’élection de la Constituante et l’éviction de la procureure générale Luisa Ortega, ils sont en train de reprendre en mains le Ministère public et de découvrir d’énormes affaires de corruption, des surfacturations de l’ordre de 200 millions de dollars ! Par ailleurs, une cinquantaine de cadres dirigeants de PDVSA ont été arrêtés. Pour la première fois, ils s’en prennent sérieusement à la corruption.
 
Pourquoi ce problème de corruption n’a t-il pas été traité avant ?
 
La dette sociale était tellement énorme, quand Chávez est arrivé au pouvoir, qu’il a dit : « Il faut sortir les gens de la pauvreté, il faut qu’ils mangent. » Comme il y avait de l’argent, ils ont dépensé sans compter, sans trop se préoccuper de la corruption. Ça a été peut-être une certaine naïveté de gauche. C’est uniquement lorsque les ressources ont sérieusement diminué, du fait de l’effondrement des prix du pétrole, que le problème s’est posé. On a découvert tout récemment que c’est précisément au cœur du Ministère public que la corruption a pu se développer ; apparemment, sous l’autorité de la procureure générale Luisa Ortega, il s’était transformé en une entreprise de chantage. Des magistrats disaient aux gens qui trempaient dans des affaires de corruption : « Soit tu paies, soit on te poursuit. » Cela faisait longtemps que la base chaviste dénonçait la grande corruption : elle est bien consciente du train de vie de certains bureaucrates.
 
C’est également ce qui alimente les critiques concernant la « bolibourgeoisie »… Est-ce qu’on a effectivement assisté à la naissance d’une nouvelle bourgeoisie ? Comment se caractérise-t-elle ?
 
Il y a évidemment des chavistes ou des pseudos chavistes corrompus. Après sa tentative de coup d’État en février 1992, Chávez a passé deux ans en prison, puis il a été amnistié pour faire baisser la pression due à une profonde crise sociale et à sa forte popularité. Beaucoup se sont rendus compte que Chávez, c’était l’avenir. À son arrivée au pouvoir en 1999, il a donc eu autour de lui des révolutionnaires sincères, mais aussi un certain nombre d’arrivistes qui comprennent que c’est « l’endroit où il faut être ». Ensuite, il y en a qui se bâtissent des fortunes à l’ombre du pouvoir : soit par la corruption, soit par des voies classiques de formation de la bourgeoisie. On a connu ce phénomène au Nicaragua ou dans tous les pays qui, un jour, ont fait une révolution ou se sont délivrés du joug colonial… Mais les grandes affaires de corruption impliquent des fonctionnaires et des gens du secteur privé. Par exemple, la majorité des entreprises qui trafiquent les aliments et les biens de première nécessité appartiennent au secteur privé.
Chávez avait beaucoup évolué. Il était plutôt « troisième voie » avant de se radicaliser suite au refus de la droite d’accepter quelque réforme que ce soit
Il faut préciser que ces seuls phénomènes n’expliquent pas la crise. Le Brésil connaît également des problèmes de corruption, cela n’en fait pas pour autant un pays à genoux. Il y a des problèmes sérieux au Venezuela, y compris une gestion pas toujours optimale du gouvernement, mais la guerre économique et la déstabilisation démultiplient les difficultés. Les erreurs du pouvoir, elles, y contribuent à hauteur de 20 % — 30 %.
 
Face à cette situation, on s’interroge sur le soutien actuel de la population vénézuélienne. Les élections législatives de 2015, qui ont vu la droite emporter 99 sur 167 sièges au Parlement, ont marqué un moment de lassitude et de désapprobation de la base chaviste envers la politique menée par Maduro. Qu’en est-il aujourd’hui ?
 

Le cœur dur du chavisme on l’estime à 30 % de la population. L’événement important a été l’élection de l’Assemblée constituante en juillet 2017 : le cœur chaviste a réagi puisque plus de huit millions de personnes sont allées voter, soit 41 % du corps électoral, malgré les barrages physiques et les menaces de l’opposition. Ça, c’est un vrai signe, qui a eu des conséquences totalement inattendues puisque la violence s’est arrêtée du jour au lendemain. De même, lors des régionales du 15 octobre, on a assisté à la victoire du chavisme dans dix-huit États sur vingt-trois : il s’impose avec 54 % des suffrages et une participation de 61,4 %, alors qu’il s’agit d’un scrutin pour lequel les Vénézuéliens, traditionnellement, se mobilisent assez peu.
La guerre économique affecte les gens d’une manière extrêmement dure. Ils galèrent pour trouver à manger, payent plus cher à cause du marché noir, leur pouvoir d’achat s’effondre. Et donc à un moment ils ont dit : « Maduro, qu’est-ce que tu fais ? » Ça a été le vote rejet de 2015, de découragement, de fatigue, mais qui ne s’est pas traduit par un transfert des votes chavistes vers la droite : celle-ci a gagné 350 000 voix, les Chavistes en ont perdu deux millions.
Ont suivi les « guarimbas » de 2014 [violentes barricades de rue qui ont causé plusieurs morts, NDLR] et la violence de cette année-ci, entre avril et juillet. Les gens se rendent compte de qui est responsable de cet état de fait. Dans la rue, dans le quartier de Chacaito, j’ai vu des gens exaspérés qui en avaient marre des manifestations de l’opposition et qui encourageaient les policiers. Même une partie des sympathisants de l’opposition a été prise en otage par ces manifestations. Chacao, Chacaito, Altamira, c’est un peu l’équivalent de Neuilly, Auteuil, Passy à Paris. Là-dessus j’ai des témoignages directs : des groupes d’extrême droite étaient présents dans les quartiers, en permanence, et les gens ne pouvaient plus emmener leurs enfants à l’école. À chaque fois qu’ils passaient, c’était : « on défend la liberté : tu paies ». Et donc y compris des membres de l’opposition plutôt modérée, plutôt respectable, en ont eu marre.
 
Vous avez préfacé le livre « Des Taupes à Caracas », qui raconte la vie et la participation à la révolution bolivarienne de l’ensemble de la population vénézuélienne : des médias locaux, des aides soignants, des paysans, des policiers… Dans le processus de contre-révolution en cours, comment se positionnent les comités populaires, les coopératives, et les structures de démocratie directe qui avaient été mises en place par Chávez ?
 
Il y a des secteurs plus radicaux, d’autres moins. Tout en se montrant critique à l’égard du gouvernement, de la bureaucratie et de leurs dysfonctionnements, le noyau dur du chavisme demeure d’une fidélité absolue à Maduro.
Au niveau des conseils communaux, depuis Chávez, l’une des difficultés est l’antagonisme fréquent entre les conseils et les maires ou les députés. Vous êtes élu maire, vous appartenez au PSUV [Parti socialiste Unifié du Venezuela, créé en 2007 par Chávez, NDLR]. De l’autre côté, il y a le conseil communal. Et d’un seul coup, il a des prérogatives aussi importantes que les vôtres, ça n’est pas forcément de votre goût !
Lors de l’élection de l’Assemblée nationale constituante, cette participation populaire a été favorisée par l’élection des 173 représentants sectoriels [sur les 545 membres de l’Assemblée constituante, 364 représentent les circonscriptions municipales, 173 différents groupes sociaux (travailleurs, étudiants, retraités…), et 8 les communautés indigènes, NLDR] : une évolution douce vers le « socialisme du XXIe siècle » de Chávez avec les communes, les conseils communaux…
On retrouve ces relations parfois difficiles au niveau de la paysannerie, lorsque des paysans occupent les terres dues par la réforme agraire et rencontrent l’opposition de gouverneurs, y compris chavistes. Dans le chavisme, il y a de tout : des opportunistes, des gens qui ont passé des alliances avec les grands propriétaires du coin, des paysans qui sont réprimés par la Garde nationale… Aujourd’hui, pour la réforme agraire, c’est la base radicale qui avance, parfois contre la bureaucratie des couches intermédiaires du chavisme ou du pseudo chavisme. Et en général, c’est la paysannerie qui reste la plus fidèle au chavisme, de même que les campagnes. Ce n’est pas un hasard si le système mis en place pour l’élection de la Constituante qui, d’une certaine manière, favorise les campagnes au détriment des villes, fait enrager l’opposition.
 
Dans certaines régions, notamment à Zulia, Barinas, Apure, les habitants ont créé, avec succès, des brigades de défense populaire pour lutter contre les incendies, le vandalisme et les violences des groupes de droite. Est-ce que ce sont des régions avec une forte composante paysanne ?
 
Oui, bien sûr. Mais les paysans subissent une grosse pression : au Táchira, par exemple, ils doivent faire face à des groupes mi paramilitaires mi délinquants. La mission brésilienne du Mouvement des sans terre qui est là-bas a été attaquée par des paramilitaires. Plus de cent militants paysans, chavistes, ont été assassinés au Venezuela. Les conflits sont permanents.
 
Assiste-t-on à la création d’une classe moyenne qui se désintéresserait du processus après avoir profité du programme Sembrar el petroleo (semer le pétrole) ?
 

C’est une thèse qui a été développée en Équateur surtout : les gens sortent de la pauvreté, ils accèdent à la classe moyenne et à partir de là, aspirent à continuer en s’identifiant aux plus riches. C’est en partie vrai, en partie seulement.
Il y a eu des phénomènes comme ce qu’il s’est passé avec la Mision Vivienda : l’octroi de 1,8 millions de logements sociaux puis la découverte que des gens qui y avaient eu accès les avaient revendus. Mais on ne peut pas tout expliquer par ça.
Quand on a connu le Venezuela avant Chávez, la différence saute immédiatement aux yeux. Ce n’est pas un hasard si la base chaviste se remobilise en ce moment
Au niveau du Conseil communal — au-delà du « c’est génial, c’est le processus de Chávez qui est en train de se mettre en place » —  une expérience m’a beaucoup éclairé : en allant en visiter un dans la banlieue de Caracas, comme j’étais là pour Le Monde diplomatique qui a plutôt bonne réputation au Venezuela, je m’attendais à rencontrer du monde. J’arrive dans un grand hangar avec… huit personnes. Ils m’expliquent : « Au début on était nombreux, une bonne cinquantaine. Quand les gens se sont rendus compte qu’ils n’allaient en tirer aucun avantage matériel personnel, mais que c’était un travail de militants, ils sont partis. »
 
Vous avez pourtant signalé que la base s’est massivement mobilisée pour l’élection de l’Assemblée constituante. Est-ce que la Constituante vient répondre à sa demande de « mano dura » et va lui permettre de reprendre de la place dans le jeu politique ?
 

Oui. J’ai mis un petit bémol sur les conseils communaux, où, partant d’une idée magnifique, on se trouve confronté à une réalité plus complexe.
Mais ce qui va réactiver la base en réalité, c’est la résolution des problèmes économiques quotidiens. Il y a eu un certain scepticisme au moment où Maduro a annoncé l’élection d’une Constituante. Des gens proches se sont demandé : « A quoi ça va servir ? Notre problème c’est qu’on ne trouve ni pâtes ni riz dans les magasins… » Malgré tout, le processus a pris. Il y a des résultats : par exemple, des communes demandent à être entendues, elles ont leurs représentants élus sectoriellement ; les femmes poussent le thème de l’avortement…
C’est le grand brainstorming. Moi aussi j’ai été étonné, surpris, sceptique dans un premier temps. À quoi ça va servir ? La violence a cessé du jour au lendemain. Je ne sais même pas pourquoi, je ne comprends pas la stratégie de l’opposition. Puis vient la destitution de la procureure générale et, d’un seul coup, on s’attaque à la corruption. Face à cette fameuse guerre économique et à une nécessaire réactivation de l’économie, s’ils réussissent à remettre de l’ordre dans la distribution des aliments, des biens, etc. — car leur importation n’a cessé que partiellement — là, pour le coup, ils toucheront l’essentiel.
 
Qui compose la Constituante ? A-t-elle été principalement nourrie par les rangs du PSUV ?
 
La partie sectorielle des élus de cette Constituante a soulevé des critiques féroces. Cela mériterait pourtant un vrai débat, notamment chez ceux qui ne cessent de dénoncer la reproduction des élites : là, il y a une représentation des travailleurs, des paysans, des pêcheurs, des étudiants… Ça échappe partiellement à l’appareil du PSUV, ce ne sont pas des leaders traditionnels qui ont été élus.
 
Vous insistez sur le rôle de la manipulation extérieure pour créer de l’inflation et une situation de chaos économique ; il est difficile à un gouvernement de lutter contre… Mais est-il prévu que la Constituante apporte une réponse économique aux problèmes internes tels que le boycott du secteur privé et de son contrôle des moyens de production et de distribution ?
 
Dans le cadre de cette Constituante, le pouvoir vient d’annoncer la mise en place spécifique d’une « Constituante économique » chargée de s’organiser à deux niveaux : le premier, structurel, visant le long terme, et chargé de réformer le système économico-productif, de renforcer le système financier et de développer un nouveau système de distribution, de commercialisation et de fixation des prix ; le second, chargé de faire des propositions pour le court terme afin de réactiver la production et de corriger les distorsions structurelles de la fixation des prix. Maduro a souhaité que la base soit impliquée dans ces processus qui ne doivent en aucun cas être bureaucratiques. On verra ce qu’il en sera, sachant que la Constituante s’est donnée deux ans et qu’il y a là des problèmes qu’il faudrait régler très rapidement.
 
Depuis l’intensification des attaques de la droite, constate-t-on des défections, des bouleversements au sein du gouvernement ?
 
Non. C’est un phénomène journalistique intéressant : comme tout le monde a envie de prendre ses distances avec le Venezuela, une certaine gauche se rabat sur le « chavisme critique ». Mais seuls cinq des anciens ministres de Chávez ou de Maduro font partie de la « Plateforme du peuple en lutte et du chavisme critique » récemment créée, qui n’a aucun ancrage populaire. Curieusement, on ne médiatise pas les 137 autres ex-ministres qui, à des degrés divers, appuient toujours Maduro.
Mes confrères dénoncent systématiquement la paille dans l’œil de Maduro tout en ignorant la poutre dans celui de l’opposition.
Si l’on prend Jorge Giordani, qui a été l’architecte de la politique économique de Chávez, il a été sorti du gouvernement par Maduro, ce qui a, à l’évidence, engendré une certaine frustration. Mais, tout en dénonçant avec virulence l’actuel gouvernement, il ne procède à aucune autocritique. Affirmer : « en 2012, vingt-cinq milliards de dollars ont été dilapidés dans l’obtention de devises » alors qu’il était lui-même au gouvernement et menait la politique économique… il ne faut quand même pas exagérer ! Tout comme Luisa Ortega : elle était au Ministère public depuis 2007. En trois semaines, elle déclare le contraire de tout ce qu’elle a dit depuis dix ans. Critique, sans aucun doute, mais chaviste sûrement plus : la voici maintenant, cul et chemise avec Washington, réclamant le déferrement de Maduro devant la Cour pénale internationale pour « crimes contre l’Humanité ».
Bien sûr, devant la violence de l’agression, un phénomène logique se produit. Ceux qui défendent la révolution évitent l’étalage des divergences et des critiques. Mais les chavistes sont tous critiques, à commencer par Chávez, qui, un peu avant sa mort, parlait d’un nécessaire golpe de timón, un coup de gouvernail pour rectifier les erreurs voire les dérives de la révolution.
Vous disiez qu’il n’y a pas d’orientation politique ou idéologique aujourd’hui ; pourtant, sur la fin sa vie, Chávez a essayé de revenir à une doctrine plus marquée, le socialisme du XXIe siècle.
Très clairement, avec Chávez puis Maduro, on se trouve dans une séquence post-néolibérale. Mais il est vrai que, à partir de 1998, Chávez avait beaucoup évolué. Il était plutôt « troisième voie » avant de se radicaliser suite au refus de la droite d’accepter quelque réforme que ce soit. Le procès qui est fait à Maduro de rompre avec le chavisme ou de trahir le chavisme n’est pas sérieux. Il prend le relais et poursuit ce que préconisait Chávez, par exemple la mise en exploitation de l’Arco minero. Une étape vers la diversification, même si l’on reste dans une économie de rente. Cette annonce a déclenché de fortes polémiques, curieusement pas tellement à droite, mais à l’extrême gauche. C’est la même chose en Équateur, sur le thème de l’extractivisme : l’extrême gauche s’est déchaînée contre Correa.
Au Venezuela, ce courant présenté comme du « chavisme critique » compte avec Marea Socialista – une des multiples factions trotskystes –, dont le principal leader Nicmer Evans n’a rien trouvé de mieux, il y a quelques semaines, que d’aller participer à un colloque avec la droite et l’extrême droite.
 
Comment percevez-vous l’attitude de Marea Socialista, aujourd’hui, dans une période de très fortes tensions, de mise en danger du gouvernement ? Les critiques qui sont portées concernant la nature bourgeoise de l’État chaviste, de bonapartisme…
 
Au nom d’une « révolution parfaite » qui n’existe que dans l’imagination de ceux qui n’ont pas les mains dans le cambouis, la critique systématique permet de se donner le beau rôle à peu de frais. Dès que Chávez est arrivé au pouvoir, la gauche s’est cassée en deux : le MAS, Causa Radical, le PC… Mais que ce soit Marea Socialista au Venezuela, les rénovateurs sandinistes au Nicaragua, l’extrême gauche équatorienne, aucun n’a jamais réussi à représenter une option politique susceptible d’entraîner l’électorat.
Ce qu’ont fait Chávez et Maduro n’est pas parfait. On peut et on doit évidemment avoir un regard critique. En 1973 au Chili, des débats enflammés genre « critique de gauche » de Salvador Allende se déroulaient entre le Parti socialiste, le PC et le MIR. Néanmoins, aussi bien là-bas qu’ici, on avait la lucidité de dire : « Compte tenu de l’agression dont il est victime, la priorité c’est de défendre ce gouvernement socialiste. » Maintenant on découpe l’histoire en tranches : tous les trois ans, on oublie ce qui s’est passé auparavant. Quand on a connu le Venezuela avant Chávez, la différence saute immédiatement aux yeux. Ce n’est pas un hasard si la base chaviste se remobilise en ce moment. Devant la menace d’un retour de la droite, elle, elle se souvient.
 
Plus personnellement, en tant que journaliste, pourquoi portez-vous cet intérêt à l’Amérique latine et au Venezuela ?
 
J’ai connu l’Amérique latine dans les années 70-80-90, à une époque où la pauvreté est passée de 120 millions à 225 millions de personnes. Je suis capable de faire la différence. J’appartiens à une génération qui a connu la dictature au Chili, en Argentine, en Bolivie. Quand on me parle de dictature au Venezuela, où il y a des élections avec une opposition organisée et qui domine les médias, ça me fait rire. Au prétexte qu’il y a une crise en ce moment, on oublie tout ce qui a été fait. Or tout ça n’a pas disparu. Entre le Venezuela des années 1990 et d’aujourd’hui, indépendamment de la crise, il y a une grosse différence : l’éradication de l’analphabétisme, le renforcement des structures de démocratie locale, la construction d’ 1 800 000 logements en cinq ans, de 8 000 établissements de santé en seize ans, l’augmentation de 27 % de l’accès à l’éducation secondaire…
Ce n’est pas un hasard si l’offensive est aussi féroce. À l’époque, ils ont renversé Allende car ils étaient inquiets de la contagion pour l’Amérique latine mais aussi pour la France (avec l’Union de la gauche) et l’Italie. En ce qui concerne le chavisme, c’est pareil : pour casser son influence continentale, il faut en terminer avec lui.
La couverture médiatique et politique, avec les unes mensongères, les informations partielles ou truquées ont notamment montré que toute « la bonne volonté » dont Maduro pourrait faire preuve sur la scène internationale ne joue aucun rôle…
Mes honorables confrères ne font pas leur boulot. Ils ont décidé de dénoncer systématiquement la paille dans l’œil de Maduro tout en ignorant la poutre dans celui de l’opposition. Le journalisme est une profession extrêmement moutonnière. Bien peu de journalistes connaissent le Venezuela. Quand l’un d’entre eux, qui appartient presque systématiquement à la classe moyenne, arrive au Venezuela, il s’identifie avec elle. Elle se compose de gens « sympas », qui vivent dans des appartements décents, regardent les mêmes chaînes de télévision, voient les mêmes films, s’habillent comme nous… Vous allez les interviewer, ils vous offrent un whisky… Alors qu’une manifestation de chavistes, parfois ça paraît un peu brut de décoffrage. C’est vrai. Donc l’identification se fait tout naturellement. Et par-dessus le reste, aussi bien Chávez, Maduro, que les dirigeants chavistes, ne la jouent pas toujours dans la finesse ou la diplomatie…
Mais l’enjeu véritable, c’est ce qui se passe en ce moment au sein de l’Union européenne et de l’Organisation des États américains. Trump a décidé de sanctions économiques et l’Union européenne a fait de même le 13 novembre. L’OEA a investi le 13 octobre un Tribunal suprême de justice vénézuélien parallèle. On sera alors dans le début de la constitution d’un gouvernement en exil, susceptible d’appeler au secours, etc., avec tout ce que ça implique ensuite par rapport à la communauté internationale – le véritable enjeu.
Il ne faut pas oublier que sous le terme « communauté internationale », on entend l’UE et les États-Unis. Car le G77 + Chine, les pays non alignés, la Russie, l’Inde, la Chine, c’est-à-dire les trois quarts des pays présents à l’Assemblée générale des Nations-Unies, n’ont aucun problème avec le Venezuela ! En Amérique latine, le « groupe de Lima » (8)
 est effectivement en train de mettre la pression sur le Venezuela, mais celui-ci peut encore compter sur la Bolivie, Cuba, le Nicaragua, trois îles de la Caraïbes… Quant à l’Équateur, où Moreno est en train de rompre avec le corréisme, la question va se poser.
 
Quel type de sanctions peut-on attendre ?
 
Filiale de PDVSA, l‘entreprise vénézuélienne de raffinage et de distribution Citgo, implantée aux États-Unis, n’a plus le droit de rapatrier ses bénéfices. Autre exemple : 300 000 doses d’insuline ont été bloquées à l’étranger parce que la City Bank refusait d’opérer la transaction… Ce qui permet ensuite le discours humanitaro-mensonger : « Du fait de l’incurie du pouvoir, il n’y a plus de médicaments au Venezuela », alors que le gouvernement a finalement passé des accords pour acheter des médicaments en Inde… Mais cela revient évidemment plus cher que de les faire venir de Californie !
De son côté, le Département du Trésor américain menace toute entité économique ou bancaire ayant des relations de travail avec le gouvernement vénézuélien d’être elle-même victime de sanctions. C’est un véritable étranglement économique qui se met en place, auquel l’Union européenne s’est jointe…
Face à cela, Caracas commence à imaginer d’autres stratégies : pour échapper aux sanctions américaines, elle se tourne aujourd’hui vers le yuan et le rouble comme nouveau système de paiement international.
Passer au yuan et au rouble, établir des accords avec la Russie, la Turquie… Cela ne change pas les problèmes internes au pays, dans la chaîne de production, qui offrent de nombreuses prises à la déstabilisation.
Pour le moment, non, et ça laisse ouverte la question : le pouvoir doit-il se radicaliser ou non ? Chacun a son avis là-dessus. S’il se radicalise, la « communauté internationale » lui tombe dessus et accentue la pression. S’il ne se radicalise pas, il prend des coups mortels et se fait critiquer sur sa gauche. C’est un choix cornélien.
 
Comment verriez-vous une « sortie de crise » ?
 
Rationnellement, ce serait l’élection présidentielle de 2018, quel qu’en soit le résultat. Encore faudrait-il que les États-Unis et l’Union européenne cessent leur ingérence et leur appui inconditionnel à l’opposition.
Un retour de la droite et de l’extrême droite au pouvoir ne serait pas une sortie de crise pour les chavistes : ceux qui ont montré leur soutien au gouvernement vont être sévèrement réprimés ; il y aura des privatisations, des licenciements, des coupes drastiques dans les budgets de l’éducation, de la santé, du logement…
L’hypothèse que, dans le cadre d’élections démocratiques, le chavisme perde serait lourde de conséquences et de signification, mais l’histoire ne s’arrêterait pas là. Ce serait infiniment moins grave que si, dans un contexte de violence, l’opposition parvenait à renverser Maduro. D’un côté on aurait : « Une révolte de la population a renversé le chavisme » ; de l’autre : « Démocratiquement, le chavisme a perdu l’élection et a accepté la défaite ». Cela ne l’empêchera pas, après avoir analysé ses erreurs et ses faiblesses, de revenir ultérieurement.
D’ailleurs, compte tenu de l’absence de programme et de l’extrême division de la droite, rien ne permet de dire que le chavisme ne gagnera pas la présidentielle de 2018. La MUD a semé un tel chaos et s’est montré tellement incohérente qu’elle a perdu beaucoup de ses sympathisants.
 
Les fameux « flux et reflux » appliqués à la révolution bolivarienne ?
 
On parle souvent de cycle, mais le vice-président bolivien Álvaro García Linera évoque une vague, qui se retire et puis revient. C’est un peu ça. Sauf régime autoritaire, un courant politique peut difficilement rester en place pendant cinquante ans. Il y a une usure du pouvoir. La révolution bolivarienne a dix-huit ans… Même pour la base, aussi volontariste soit-elle, il est difficile d’être révolutionnaire 24 heures sur 24 pendant aussi longtemps…
 
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1. La classe moyenne vénézuélienne représente environ 15 % de la population.
2. Pour Emmanuel Macron, le régime du Venezuela est « une dictature »
3. Oil reserves
4. #EnVIVO @MariaCorinaYA: Aceptaremos una negociación verdadera solo para negociar la salida de Maduro del poder.
5. Contrôle des prix des aliments, hausse du salaire, impôt sur les grandes fortunes et affranchissement du dollar : Maduro poursuit l’offensive contre la guerre économique.
6. Pour plus de détails, voir :  La guerre économique pour les nuls (et les journalistes), Maurice Lemoine,  ainsi que Dólar Today distorsiona economía en Venezuela, confirma CEPAL (en espagnol).
7. Contrôle des prix des aliments, hausse du salaire, impôt sur les grandes fortunes et affranchissement du dollar : Maduro poursuit l’offensive contre la guerre économique.
8. Le groupe de Lima rassemble l’Argentine, le Brésil, le Canada, le Chili, la Colombie, le Costa Rica, le Guatemala, la Guyane, le Honduras, la Jamaïque, le Mexique, le Panama, le Paraguay, le Pérou , Sainte-Lucie et l’opposition vénézuélienne . Le Groupe a été fondé le 8 août 2017. NDLR.
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

 

 

 

 


FINKIELKRAUT, JOHNNY ET LES "SOUCHIENS"

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FINKIELKRAUT, JOHNNY ET LES


Une fois n'est pas coutume, je volerai au secours de Finkielkraut, qu'une meute de bien-pensants insulte, injurie, invective et vilipende pour avoir établi constat que seuls les "petits blancs" avaient rendu hommage à Johnny et que les "non-souchiens" n'étaient pas nombreux, voire inexistants dans la foule qui, accourue de tous les coins de la France profonde, s'était amassée pour participer à l'hommage "populaire" qui lui était rendu ou avait tenté de participer à celui semi-officiel, que lui rendit une gent politico-politicienne  mêlée au petit-monde et à l'entre-soi du show bizz.
Pauvre FINKEL, contraint de se défendre d’un côté de mauvaises pensées à l'encontre des "souchiens" et de ceux qui s'honorent de l'être ou de les défendre, et pire encore ou plus hypocritement, se voir reprocher de l’autre côté, une injure à l'encontre des "gens de la diversité".
Comme lui, j'ai pu voir, depuis les rives de mon île (la "plus proche des îles lointaines"), à travers le flot ininterrompu d'images déversées à satiété par les médias, que les "non -souchiens" (terme qui pour moi n'est pas une injure, d’autant que j’en relève), que les "non-souchiens", disais-je, étaient plutôt absents.
Cela ne m'avait ni choqué, ni étonné, ni scandalisé. Les dits "non -souchiens" ont parfaitement le droit de ne pas se mêler à la foule des fans et des groupies d’une idole de substitution.

Chacun a les héros qu’il mérite, qu'il revendique ou qu'on lui fabrique.
Avec Finkel en ces circonstances, et contrairement à l'attitude critique avec laquelle je le lis ou l'écoute ratiociner habituellement dans les lucarnes, je proclame avec lui que "je n'ai rien en moi de Johnny ».
J'ajoute que je comprends assez que les "petits-blancs" iconisent Johnny tandis que le peuple des cités et celui de la "diversité " ne se reconnaissent pas en lui.

u zinu




https://francais.rt.com/france/46436-rien-moi-johnny-alain-finkielkraut-precise-pensee-polemique-non-souchiens-petits-blancs

«Je n'ai rien en moi de Johnny»: Finkielkraut précise sa pensée sur la polémique des «non-souchiens»

«Je n'ai rien en moi de Johnny»: Finkielkraut précise sa pensée sur la polémique des «non-souchiens»
© JEAN-PIERRE CLATOT / AFP
Illustration : Alain Finkielkraut lors d'un débat
 
S'estimant «l'objet d'une vindicte invraisemblable» après avoir déploré que, selon lui, seuls les «petits blancs» aient rendu hommage à Johnny Hallyday, Alain Finkielkraut dit ne rien comprendre à la polémique, et précise le fond de sa pensée.
 
«Le petit peuple des petits blancs est descendu dans la rue pour dire adieu à Johnny. Il était nombreux et il était seul. Les non-souchiens [non-Français de souche] brillaient par leur absence» : reprise en boucle sur les réseaux sociaux, une phrase prononcée par Alain Finkielkraut au sujet de l'hommage à Johnny Hallyday a provoqué une vive polémique . Dans l'émission Les Grandes Gueules sur RMC ce 11 décembre, le philosophe est revenu sur la controverse.
 
«Je n'ai rien en moi de Johnny, et je ne m'insurgeais pas contre l'absence des banlieues et de la diversité à cette manifestation, je la constatais», a expliqué Alain Finkielkraut. «Cette tempête (que j'ai déclenchée), je n'y comprends rien», a-t-il encore déploré, se disant «l'objet d'une vindicte absolument invraisemblable».

Une expression popularisée par Houria Bouteldja

 
 
 
 
Le cortège funéraire de Johnny Hallyday, le 9 décembre
Répondant aux internautes choqués par son utilisation de l'expression «souchiens», en référence aux Français de souche, il a précisé : «[L'expression] n'est pas de moi, je reprenais avec ironie une parole de la leader des Indigènes de la République, Houria Bouteldja, qui parlait de souchiens pour désigner les Français de souche. Je ne suis pas moi-même quelqu'un de souchien.»
Abordant le fond de sa pensée, Alain Finkielkraut a poursuivi : «Mon constat, c'est que le divertissement règne mais ne fait pas lien. Il n'a pas la fonction sociale que certains voudraient lui assigner. Il y a le rock et le rap, ce qui enthousiasme les vieux et fédère les jeunes, ce en quoi se reconnaît la France périphérique et ce qu'apprécie la France des banlieues
 
 
 
 
Emmanuel Macron lors de son discours en hommage à Johnny Hallyday
«Quand je dis "le petit peuple blanc", je le dis sans aucun mépris. Je prends acte de ce fait : il y avait une certaine classe sociale qui était là – la classe des oubliés, de la France périphérique. Il y avait le show-biz, mais je regrette que l'on puisse en France faire lien avec le divertissement», a encore déclaré le membre de l'Académie française.
Il a enfin taclé la député LREM Aurore Bergé, qui avait comparé la ferveur pour Johnny Hallyday avec celle qui entourait Victor Hugo. «La comparaison avec Victor Hugo me paraît ridicule. Johnny remplace Victor Hugo mais n'a pas cette fonction sociale qu'on voudrait lui attribuer parce qu'il ne fait pas lien», a insisté Alain Finkielkraut.
 

PETIT FLORILÈGE DES AIMABLES PENSÉES DE LA FRANCE PROFONDE SUR LA CORSE

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PETIT FLORILÈGE DES AIMABLES PENSÉES DE LA FRANCE PROFONDE SUR LA CORSE
Un media "hexagonal" que je fréquente assidûment, pour ne pas dire quotidiennement, et qui accorde de bonne grâce hébergement aux petits papiers que je lui propose de temps à autre, publie un excellent article (signé Pichon-Constantini) relatif aux résultats des récentes élections en Corse. 
Cela vaut à ce dernier quelques commentaires qui traduisent le sentiment éprouvé par nombre de commentateurs français à l'égard, ou plutôt à l'encontre de notre île.
La louable tentative du rédacteur d'AGORAVOX lui a valu quelques "réponses" assez significatives de la perception  de la Corse et des Corses qu'ont certains honorables contributeurs que je suppose purs "souchiens"  de France.
Ne résistons pas au plaisir (mitigé) de transcrire ici leurs aimables propos.

P.S 1 : j'ai pris soin de corriger quelques petites erreurs orthographiques ou grammaticales de l'un ou l'autre des auteurs,  encore que ceux dont la prose est  retranscrite  ici ne soient pas les pires massacreurs de l'expression française. D'autres "forums", pour ne citer que celui d'Orange, offrent un aperçu largement plus édifiant de l'inadéquation existant souvent entre  une revendication  identitaire et  le respect de  la langue qui en constitue l'un des aspects. 

P.S 2 /


J'emprunte à un autre blogueur, qui voudra bien me le le pardonner, une image qu'il utilise pour illustrer un propos sur la Corse.  Au passage je recommande particulièrement ce blog, que je découvre au cours d'une pérégrination sur le net,  et que je m'empresse de faire figurer en  LIEN.
( http://merlerene.canalblog.com/archives/2017/10/15/35768849.html )



PETIT FLORILEGE : 


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Vivement que la tectonique des plaques nous débarrasse de ce boulet.
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Entre l’État centralisateur français et celui de l’Allemagne plus fédératif, il y a sans doute matière à inventer un concept républicain, sans dislocation du lien national,
Il ne faut pas oublier qu’après la seconde guerre mondiale, il a été décidé de créer une Allemagne fédérale pour l’affaiblir économiquement et politiquement. Seulement les allemands, courageux et travailleurs, ont transformé cette faiblesse en force. Pour cela ils ont laissé se développer certaines régions au détriment des autres. Et c’est comme cela que l’on se retrouve avec des régions riches comme la Bavière, la Rhénanie du Nord, le Bade Wurtemberg et des régions pauvres comme la Saxe, la Poméranie où les Frizes. Et des régions riches qui ne font absolument rien pour sortir les régions pauvres de leur misère.
Est-ce que dans ce grand puzzle régional que deviendrait une France fédérale, la Corse est prête à s’appauvrir encore plus (si c’est encore possible d’être plus pauvre que pauvre) sans que l’Île de France (devenue régionale) ou le Rhône ne lèvent le petit doigt ?
Alors une fois obtenu son autonomie, est-ce que la Corse est prête à se construire des éoliennes comme en Sardaigne pour s’assurer son indépendance énergétique ? Est-ce qu’elle est prête à se construire un port détaxé comme à Il Broli sur l’Île de Malte pour commercer en free taxe avec le reste de l’Europe ? Est-ce qu’elle est prête à s’installer des fermes à 1000 vaches et l’industrie alimentaire qui va avec ?
Parce que c’est gentil de vouloir l’indépendance comme un enfant veut un jouet à Noel. Accord faut-il savoir quoi en faire
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Le message Corse à la France est clair :
« Continuez à payer et laissez-nous dépenser comme bon nous semble »
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L’indépendance cela a un sens : c’est la rupture complète. La Corse n’a pas les moyens financiers, les ressources d’être indépendante sauf à une chute drastique du niveau de vie et tous les Corses clairvoyants le savent.
L’autonomie, qu’est-ce que ça veut dire si outre l’armée, la gendarmerie, la police et la justice demeurent aussi l’Éducation nationale et la Santé sous l’autorité de l’État comme pour tout département français ?
La notion de « résident corse », à savoir vivre sur l’île depuis au moins cinq ans pour avoir le droit de faire bâtir, est une mesure d’apartheid qui contredit non seulement le droit français et international mais d’une certaine façon les Droits de l’homme en instituant une inégalité entre personnes sur des base ethniques.
Une telle règle serait impossible à imposer dans le cadre de « l’autonomie », surtout que l’inverse, une impossibilité pour les Corses de s’installer sur le continent serait inacceptable pour eux.
Il resterait aux autonomistes la liberté de pratiquer une politique sociale avec l’argent des impôts « français », plus équitable que sur le continent. Mais est-ce bien leur intention première ?
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...accessoirement la plupart des mesures demandées par les autonomistes/indépendantistes sont contraires à la constitution.
Ce qui n’est pas un obstacle anodin.
De fait les Corses demandent, ni plus ni moins, la fin de la cinquième République.
Les Français, ces méchants colons, peuvent-ils donner leur avis ?
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La Corse est dans la même situation que le reste. Sur l’abstention, il faut être honnête :
si on me disait là maintenant de retourner voter aux régionales alors qu’on l’a déjà fait il y a 2 ans, je ne sais même pas si j’irais.
Il y a eu une majorité en 2015, elle est reconduite maintenant, que dire de plus ?
Nous sommes tous perplexes devant les partis politiques traditionnels, là il y a une alternative « autonomiste » locale et ça lui profite.
Maintenant, qu’est-ce qu’on fait ? Si c’est pour demander ad vitam aeternam des réparations post coloniales, je suis désolé de vous le dire, mais c’est le même discours que celui des indigènes de la Seine Saint-Denis.
Là aussi, la Corse est très française et pas très originale.
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Il est temps que la France reconnaisse le caractère colonial pour la Corse et qu’elle libère les Corses du STO sur le continent et les ramènent chez eux avec nos excuses, ensuite libérer la Corse de notre administration, des corps constitués, des militaires, de la police, enfin tout ce qui représente la France.
Ainsi ils pourront s’installer chez eux et vivre sans aucune contrainte !
 
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« Concernant les pouvoirs régaliens, il a même ajouté que l’enseignement et la santé devaient rester du ressort de l’État »
Sont malins les barons de la politique corses...
Tout ce qui nécessite des grosses dépenses et est source d’emmerdements ils le laissent à l’État.
L’autonomie ça n’existe pas dans la constitution.
Donc si les Corses veulent l’indépendance et qu’un referendum leur donne la majorité,  eh bien bon vent.

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Les Corses sont des parasites..comme leur emblème Naboléon... !

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A propos du conflit syrien : Les Vainqueurs et les Vaincus

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Remarquable « résumé » du conflit syrien (si l’on ose dire, vu le contenu exhaustif et la densité du texte offert à notre lecture).

Outre une excellente rétrospective du déroulement de ce conflit, l’auteur ne manque pas de rappeler l’identité de ses commanditaires « extérieurs », de même qu’il n’omet pas de nous remettre en mémoire la formidable campagne de désinformation partisane menée par les médias mainstream et les organes officiels de l’ère Hollande-Fabius. À dire vrai, de ce point de vue, l’ère Macron se situe dans une certaine continuité.

u zinu






 

La Syrie : les Vainqueurs et les Vaincus


par Pierre
vendredi 29 décembre 2017
in

AGORAVOX


 

Il y a à peine un an, pas beaucoup de monde ne se serait aventuré à dire que Bachar al-Assad et l’Armée arabe syrienne (AAS) avaient une chance de gagner la guerre contre les rebelles, les combattants étrangers ou les terroristes. Appelons-les comme on veut, il s’agissait de plus d'une centaine de milliers d’hommes en armes souvent sophistiquées et avec de puissants soutiens arabes, turcs et occidentaux.

Tout au plus, le pouvoir syrien pouvait espérer négocier une paix et un partage du pouvoir en position de force.

Que s’est-il passé pour qu’aujourd’hui, cette Armée arabe syrienne vole de victoire en victoire ?

 


La Syrie : un pays à reconstruire.

Les rivalités des adversaires entre eux.

C’est certainement un des deux éléments les plus importants qui a permis l’actuelle série de victoires du gouvernement syrien.  L’AAS a résisté aux deux coups de butoir contre Alep et contre Damas en 2012. Cela a permis à l’État syrien de survivre, de voir l’opposition montrer son manque d’unité et de dévoiler ses côtés extrémistes et criminels voire terroristes pour certains groupes.

On peut distinguer cinq groupes armés principaux qui ont ou qui avaient des objectifs et des soutiens étrangers concurrents.

  • Jabhat al-Nosra s'est rebaptisé Jabhat Fatah al-Cham en 2016 pour faire oublier son allégeance à Al-Qaïda. C’est un groupe wahhabite qui a bénéficié de l'aide de princes saoudiens et d’autres émirs du Golfe. Il faudra un jour déterminer de quel niveau de pouvoir venait cette aide. Le pouvoir en Arabie saoudite est une nébuleuse de clans dans laquelle les princes pouvaient engager les deniers de l’État ou leurs avoirs mafieux avec l’accord tacite du roi. Il est certain que Jabhat al-Nosra a reçu de l’armement des monarchies du Golfe et que les pays occidentaux ont au minimum fermé les yeux. Ce groupe était au départ majoritairement composé de combattants irakiens sunnites et il avait pour but de prendre le pouvoir en Syrie pour y former un califat. Il a rallié de nombreux autres groupes de combattants syriens autour de lui.
  • Ahrar al-Cham est un groupe révolutionnaire islamiste idéologiquement lié aux Frères musulmans. Il est surtout présent dans le nord et le centre de la Syrie. Il avait le soutien de la Turquie et du Qatar qui l’approvisionnaient en armes. Du fait de sa proximité frériste, ce groupe est combattu par l’Arabie saoudite et est continuellement en conflit avec Jabhat Fatah al-Cham. Son but est d’arriver au pouvoir pour y installer une constitution islamique basée sur la Charia. Ahrar al-Cham a rallié autour de lui des dizaines d’autres groupes armés qui représentent ensemble environ 25.000 combattants. Ce groupe a un relatif soutien populaire grâce à un réseau de distribution d'aides à la population.
  • L’État islamique ou État islamique d’Irak et au Levant, ISIS en anglais et DAECH en arabe est apparu dans l’est de la Syrie en 2013. C’est un groupe lourdement armé originaire d'Irak qui a acquis un impressionnant matériel de guerre en s’emparant de Mossoul et des provinces sunnites d’Irak en 2014. Ce groupe a une idéologie proche de celle de l’Arabie saoudite et on pense que celle-ci l’a aidé à ses débuts. Il est formé de combattants expérimentés d’Al-Qaïda encadrés d’anciens officiers irakiens baasistes qui se sont rencontrés dans les prisons irakiennes après 2003. En passant la frontière syrienne et en étendant sa vision djihadiste à l’Afrique et à l’Asie, l’État islamique est devenu un danger planétaire que les États-Unis n'ont d'abord que mollement combattu en Syrie [i] dans l’espoir d’affaiblir le pouvoir du président syrien. C’est sans doute un mauvais calcul qui se retournera contre eux. Le premier objectif de l’État islamique était de former un proto-État à cheval sur les régions sunnites d’Irak et de Syrie sous le commandement du calife Abou Bakr al-Baghdadi. L’Arabie saoudite a alors compris le danger que représente cette organisation et a cessé de la soutenir. L’État islamique représente une concurrence qui pourrait un jour revendiquer des droits sur les lieux saints de l’islam. Il est difficile d’estimer le nombre de combattants actuels. Au plus fort de son extension, il devait y avoir entre 50.000 et 125.000 hommes en Syrie et en Irak, principalement sunnites irakiens mais aussi européens, tchétchènes, ouigours, tunisiens etc. Il est aussi à noter que l’EI ne correspond pas au dessein des États-Unis et d'Israël qui consiste à voir la région se morceler en une multitude de petits États de faible influence. 
  • L’Armée syrienne libre (ASL) est d’abord composée d’officiers et de soldats déserteurs à partir de 2011. Elle a reçu un soutien, quoique clandestin, des pays occidentaux dont notamment un transfert massif d’armes de Libye organisé par la CIA. C’était au départ une armée non confessionnelle qui s’est en grande partie délitée avec le départ de nombreux groupes avec armes et bagages vers les islamistes plus radicaux. Le Pentagone a essayé de les former et de les contrôler mais ce fut en vain. Une fois armés et prêts au combat, la plupart de ces hommes ont rejoint les groupes islamistes. L’ASL est encore existante dans le sud de la Syrie, autour de la ville de Deera. Cette armée reçoit un soutien logistique israélien et est entourée de conseillers occidentaux et israéliens. Vu les nombreuses défections, il est difficile d’estimer le nombre de combattants. Peut-être entre 5.000 et 6.000.
  • Les FDS qui regroupent des miliciens arabes et des milices kurdes syriennes (YPG) sont actuellement la principale force armée soutenue par les États-Unis au grand dam d’ailleurs de la Turquie. En 2011, les Kurdes n’étaient pas hostiles au pouvoir en Syrie. C’est l’arrivée des islamistes dans leur région qui les a fait prendre les armes et petit à petit, ils ont formé un groupe de combattants assez efficaces. Ils semblent instrumentalisés par le Pentagone pour constituer un État dans le nord de la Syrie où les États-Unis pourraient établir des bases militaires permanentes. Il faudra voir, une fois l’État islamique vaincu, si les États-Unis seront prêt enfreindre le droit international et à aller à la confrontation avec la Syrie pour accomplir leur dessein.

    Les Kurdes syrien ont trois gros obstacles pour obtenir une indépendance.
  • Un éventuel État Kurde en Syrie serait entouré de pays hostiles à son indépendance ; la Turquie, l’Irak, l'Iran et la Syrie. Comment dans ce cas assurer la survie de ce pays qui n’a pas de richesses sur son territoire ?
  • Le PYD (civil), l’YPG (militaire) et son parti frère, le PKK de Turquie, sont des partis kurdes néo-marxistes. Comment concilier cela avec l’idéologie conservatrice-libérale des États-Unis ?
  • Les Kurdes n'ont aucun droit historique sur les territoires syriens qu'ils contrôlent. À l'origine, le peuple kurde était un peuple nomade qui ne s'est progressivement sédentarisé que depuis un siècle. Il n'était majoritaire que sur une infime petite partie du nord de la Syrie.

La particularité de cette guerre, c’est que tous ces groupes se battent entre eux que ce soit pour s’approprier des territoires, des armes ou pour des raisons idéologiques ou d’alliance. Il n’est souhaitable pour personne de voir un groupe islamiste l’emporter et installer la loi islamique à Damas.

Il faut signaler au passage que toutes ces milices perçoivent des soldes. Si l’État islamique disposait aussi d’argent grâce aux trafics de pétrole et d’antiquités, les autres milices sont rétribuées avec des fonds d’origines inconnues mais on peut imaginer qu’il y a de riches donateurs du côté du Golfe.

Il y a au moins une centaine de milices d’insurgés qui s’allient ou se regroupent selon les opportunités avec d’autres groupes plus puissants. Elles ont souvent une implantation locale et elles font allégeance à l’armée la plus forte pour ne pas avoir à subir de représailles. Il sera intéressant de voir ce qui arrivera quand les milices islamistes les plus radicales seront éradiquées.


Carte de Syrie en octobre 2017. En rouge, zone tenue par l'AAS. En jaune, par les FDS (Kurdes). En bleu, des territoires non-contrôlés. Les zones grises ont depuis été prises par l'AAS et les FDS.

 

L’entrée en scène de la Russie et de l’Iran.

 

La concertation de la Russie avec l’Iran et leur coordination pour épauler l’Armée arabe syrienne est l’autre élément déterminant qui a permis de reconquérir une grande partie des territoires syriens perdus. 

Les détails d’une intervention ont été mis au point lors des visites de Qassem Soleimani, le général-commandant de la Force Al-Qods iranienne, à Moscou en été 2015.

La modernisation et le renouvellement de l’équipement lourd, la mise à niveau des forces aériennes, la formation de nouvelles unités de combat, le contrôle du ciel syrien et un nouveau schéma tactique ont permis les succès actuels de l’AAS. 

Des unités du Hezbollah libanais, de la Force Al-Qods iranienne, des milices pro-gouvernementales et des volontaires chiites étrangers apportent les renforts en hommes qui faisaient si cruellement défaut aux forces loyalistes.

Il est à noter que le coût de l’intervention russe en Syrie est insignifiant et qu’il est presque totalement pris en charge par le budget ordinaire de la Défense. 

En plus des avantages géopolitiques qui marquent le retour de la Russie au Moyen-Orient, l’Armée russe a renforcé sa présence militaire dans la région et elle y dispose à présent de deux bases permanentes. Elle a eu l’occasion de tester avec succès ses armes de dernière génération sur le champ de bataille. Cela booste aussi les exportations de l’industrie de la défense au grand bénéfice de l’économie russe.


L'aviation russe en action.

 

La lassitude et l’usure.

 

Le peuple syrien est las de ce conflit. Les autres belligérants aussi parce qu'ils ne voient aucune victoire militaire possible.

L'Arabie saoudite commence à ressentir le coût de cette guerre alors qu’elle est aussi en conflit sur d’autres fronts et que ses revenus pétroliers sont en forte baisse. 

Connaissant leur versatilité, les États-Unis hésitent à fournir de l’armement sophistiqué aux rebelles et ils ne veulent en aucun cas engager des troupes de combat au sol.[ii] Les souvenirs douloureux d’Irak et d’Afghanistan sont encore trop proches.

Après avoir repoussé les principaux groupes rebelles dans la province d'Idlib où ils s’entre-déchirent pour le moment et après avoir cantonné les autres dans des poches assiégées, l’AAS a entamé avec succès la libération de l’est du pays des griffes de l’État islamique. Une fois la jonction avec l’Armée irakienne consolidée, une liaison routière entre les deux pays sera rétablie. 

L’importance de cette jonction n’a pas encore été bien évaluée par les analystes. Elle va permettre un flux continu sans obstacles de renforts, d’armes et d’approvisionnement depuis l’Iran.

L’étape suivante pourrait être la sécurisation du sud du pays autour de Deera, la réduction des poches rebelles dans la Goutha ou la sécurisation du nord du pays avec une offensive vers l’aéroport d’Abou Douhour près d’Idlib actuellement tenu par Hayat Tahir al-Cham, une coalition dominée par Jabhat Fatah al-Cham (Al Qaïda).

La reprise de la rive droite de l'Euphrate est beaucoup plus problématique du fait de la présence de l'Armée américaine. Cela fera sans doute partie des négociations finales mais il y a une divergence à ce sujet entre d'un côté, les gouvernements syrien et iranien et de l'autre la Russie qui elle veut éviter une confrontation militaire (pour le moment) avec les États-Unis. 

Excepté pour les FDS, les approvisionnements des rebelles en armes et munitions se sont taris. Je n’arrive pas à savoir si les soldes sont encore partout payées. Il faut savoir que l’argent a été la principale motivation de l’engagement des rebelles syriens. Les motifs idéologiques ont toujours été secondaires exceptés pour une minorité de fanatiques. L’argent des trafics, des enlèvements contre rançon [iii] et du racket ont été le nerf de la guerre depuis plus de six ans.

Cette situation va immanquablement déboucher sur un ralliement de la plupart des petits groupes rebelles au gouvernement syrien grâce à la médiation russe et elle verra le retour à la vie civile de la plupart de ceux qui ont pris les armes.


Les FDS près de Raqqa.

 

Les vaincus.

 

« Vae victis » [iv] pour les rebelles. Ils payeront le prix fort pour avoir cru les promesses de leurs sponsors.

Les guerres civiles ont de tous temps été les plus cruelles et celle-ci ne fera pas exception.  On peut imaginer le sort des partisans du président Assad si les islamistes l’avaient emporté alors ne soyons pas sensibles quant à leur sort, il sera bien moins cruel.

Beaucoup de ces rebelles qui survivront, les plus fanatiques et ceux qui ont commis des crimes, n’auront d’autre choix que de s’exiler avec leur famille s’ils ne sont pas exécutés avant. Ce sera une charge pour les pays limitrophes et pour les pays de l’Union européenne qui ont soutenu cette guerre. Les États-Unis ne seront pas concernés vu qu’ils ont fermé leurs frontières aux ressortissants des pays arabes concernés.

On peut distinguer trois groupes de perdants. Les groupes rebelles/terroristes, les États qui les ont soutenus et les réfugiés syriens.

 

  • Parmi les groupes rebelles, l'État islamique aura réussi à faire l’unanimité contre lui et il ne survira sans doute pas dans sa forme actuelle à sa récente défaite militaire.


Combattants de l'Etat islamique.

  • Les groupes liés à Al Qaïda et aux Frères musulmans auront difficile à survivre dans la Syrie du futur sans le soutien des monarchies du Golfe, de la Turquie et du Qatar.
  • Le CNS, la branche civile de l'ASL, devra affronter l'épreuve des urnes et comme elle n'a pas d'assise locale, elle sera balayée par l'opposition non révolutionnaire (CNCD) qui a soutenu un processus pacifique de changement de régime.
  • Les mouvements autonomistes et indépendantistes kurdes sont dépendants de l'aide militaire étasunienne. Il est difficile de prévoir les décisions de l'administration Trump toute partagée qu'elle est entre son désir de nuire à la Syrie, à la Russie et à l'Iran et son impératif besoin de ne pas perdre son allié turc. Les Kurdes syriens peuvent difficilement espérer une indépendance qu'ils ne demandent d'ailleurs pas en Syrie. Ils peuvent tout au plus obtenir une autonomie culturelle.
  • À force de jouer des doubles jeux, les États-Unis perdront sur tous les fronts au Moyen-Orient. Sauf à se lancer dans un engagement militaire massif et à risquer une confrontation directe avec la Russie et avec l'Iran, les États-Unis n'auront d'autre choix que de se retirer de Syrie pour limiter leur perte d'influence. Il est à noter que le conflit interne entre le président Trump et l'establishment déforce la position des États-Unis et qu'il est impossible de prédire ce qui arriverait en cas de destitution (peu probable) du président Trump.
  • Monarchie du Golfe auront dépensé des milliards de dollars en pure perte. Le Qatar est en échec aussi bien en Libye et en Égypte qu'en Syrie. Sa politique de soutien aux Frères musulmans s'est en plus attiré les foudres de l'Arabie saoudite, de l’Égypte et des monarchies sunnites du Golfe.
  • La désastreuse politique saoudienne avait été initiée par feu le roi Abdallah pour étendre l'influence saoudienne sur l'ensemble du monde arabo-sunnite et pour affaiblir le rôle de l'Iran dans la région. Mohammed ben Salman (MBS), l'actuel homme fort du pays, semble faire porter la responsabilité de cet échec au proche entourage de l'ancien roi. MBS doit maintenant gérer un pays dont les revenus ont été largement réduits tout en maintenant la pression sur l'Iran.
  • L'Union européenne et la France en particulier auront fait fausse route depuis le début de la crise syrienne. En exigeant le départ de Bachar al Assad avant toute négociation avec le CNS, l'UE et la France auront raté l'occasion d'avoir une quelconque influence dans la région dans le futur. Il faudra retenir la parfaite transparence de Madame Mogherini et l'absence de la présidence européenne représentée par Monsieur Tusk. On est en droit de se demander quelle est l'utilité de ces fonctions. Même si la France avait fermé son ambassade à Damas sous la présidence de Nicolas Sarkozy, la présidence de François Hollande aura été marquée par une profonde hostilité au régime laïc syrien qui ne voulait pas rompre avec l'Iran et le Hezbollah. Le passage de Laurent Fabius au Ministère des Affaires étrangères aura été un des plus désastreux de l'histoire de France. Les médias « mainstream » et les experts de plateaux de télévision auront manqué à leur devoir de neutralité de l'information en s’alignant sur la ligne politique du gouvernement. [v]
  • Israël peut être considéré comme perdant parce que les groupes rebelles qu'il a soutenus ont été militairement défaits par l'AAS et que ses objectifs politiques n'ont pas été atteints. De son côté, le Hesbollah s'est renforcé et a acquis de l'expérience au combat, l'Iran est tout près de la frontière israélienne et la Russie contrôle le ciel syrien. D'un autre côté, il y a un rapprochement avec les dirigeants arabes sunnites contre l'Iran.
  • Les réfugies syriens font partie des grands perdants. Ceux qui ont fui les islamistes ne trouveront bien souvent que des ruines à leur retour.
  • Les réfugiés islamistes syriens et leurs familles ne pourront pas se réinsérer dans une Syrie pluraliste et leur sort est un vrai casse-tête international.
  • Le sort des brigades djihadistes internationales est encore un plus grand casse-tête. Le mot d'ordre a été de les éliminer sur place mais quid de ceux qui rentreront quand-même au pays. Des rumeurs accusent les États-Unis de renforcer les FDS avec des daechistes récupérés et de transférer des autres en Afghanistan. Une affaire à suivre de près.
  • Il y a enfin le sort des centaines de milliers de jeunes syriens qui ont fui leur pays pour éviter leurs obligations militaires. Il s'agit principalement de fils de familles aisées sunnites dont le voyage a été payé par la famille. On les a vus forcer les postes frontières européens en 2015. Ce sont en grande majorité des hommes éduqués qui s'intégreront sans trop de problèmes en Europe. Leur absence se fera sentir quand il s'agira de reconstruire la Syrie mais, sauf à d'obtenir un pardon magnanime, leur retour sera difficile.


Le jeune émir du Qatar.

 

Les vainqueurs.

 

  • L'Armée arabe syrienne et ses forces d'élite sont les vainqueurs sur le champ de bataille. Si ce n'est le successeur de Bachar al-Assad, ce sera sûrement parmi ses généraux qu'on trouvera les futurs dirigeants syriens.


Souheil al-Hassan. Un des généraux les plus populaires en Syrie.

  • L'Iran était infréquentable au début de cette guerre en 2011 et il est maintenant un interlocuteur incontournable.
  • Il en est de même pour le Hezbollah. Il a acquis le respect des Libanais qui ne veulent pas d'une nouvelle guerre civile au bénéfice de puissances étrangères.
  • Il va sans dire que la Russie de Vladimir Poutine qui elle aussi comptait pour quantité négligeable en 2011 est redevenue un acteur de poids dans le landernau des puissances mondiales.
  • Le peuple syrien aura résisté à un complot international qui voulait le voir tomber sous la férule de fanatiques islamistes. Il devra reconstruire le pays en se passant sans doute des aides occidentales mais recouvrer sa souveraineté n'a pas de prix.


La conférence d'Astana : une victoire politique de la Russie à confirmer.

Il est actuellement difficile placer la Turquie dans le camp des gagnants ou des perdants. Son rapprochement avec la Russie lui permettra sans doute de tirer son épingle du jeu ou de limiter les pertes mais elle n'aura pas obtenu beaucoup d'avantages en s'engageant dans cette guerre. [vi] Il ne faut jamais oublier que la principale menace pour son intégrité vient de sa minorité kurde que ses ennemis peuvent à tout moment militairement soutenir.

Deux autres pays limitrophes, le Liban et la Jordanie, n'ont finalement pas été déstabilisés malgré les millions de réfugiés syriens qu'ils ont dû accueillir.

L'Irak, un autre voisin de la Syrie, a aussi vaincu DAECH. La plus importante zone du pays, le sud chiite, n'a pas été touchée par la guerre. L'Irak a les moyens de recouvrer sa totale indépendance et de se libérer de la tutelle étasunienne.

 

 

Conclusion.

 

Depuis 75 ans, les conditions pour gagner une guerre n’ont pas changé. Il faut une suprématie aérienne et des troupes combattantes au sol.

Seules les forces loyalistes et leurs alliés répondaient à ces deux critères. La suprématie aérienne était assurée par la Russie et les troupes combattantes, principalement des unités d’élite renforcées par le redoutable Hezbollah libanais ainsi que par des unités iraniennes, ont pu être déployées massivement dans l’ensemble du pays avec un parc de blindés modernisés. L'AAS a aussi pu compter sur l'aide des experts militaires iraniens et russes.

La Russie avait un objectif stratégique cohérent, la lutte contre le terrorisme islamique, le soutien à un gouvernement légal et la souveraineté du peuple, et elle n’a pas varié dans sa position. 

Le résultat est un retour des influences russe et iranienne au Moyen-Orient. [vii]

Cette guerre est une première lourde défaite pour les puissances occidentales, celles qui se sont auto-proclamées « la communauté internationale » depuis la fin de l'URSS.

Avec le recul, nous verrons aussi que ce conflit marquera la naissance d'un monde multipolaire dans lequel le bloc occidental aura un adversaire face à lui.

La guerre peut encore durer des années mais les vainqueurs sont connus.

Connaissant le réalisme de Vladimir Poutine, il laissera une porte de sortie honorable aux perdants pour qu'ils ne perdent pas la face mais lui et ses alliés sont les incontestables gagnants de cette partie de géostratégie et il faut espérer que les Occidentaux retiendront la leçon et qu'ils hésiteront dorénavant à encore se lancer dans une pareille expérience de déstabilisation d'un pays souverain.

Les historiens devront se souvenir de l'étonnante déclaration de Roland Dumas en 2011 avant de faire porter la responsabilité du conflit sur les épaules de Bachar al Assad et de maintenir le mythe d'un peuple opprimé qui se serait spontanément soulevé contre un régime honni.


Plus récemment, il y a aussi le document de la BBC avec les révélations de l'ancien Premier ministre qatari Hamad bin Jassen al-Thani qui admet qu'il y a eu des interventions étrangères dès le début de la crise.


Pour terminer, il faut en finir avec le mythe du retrait du président Assad pour des raisons morales. Sa légitimité ne peut être remise en cause que par le peuple souverain lors d'élections équitables. L'ONU peut éventuellement les superviser pour garantir l'intégrité du processus électoral. Dans les circonstances actuelles, Bachar al-Assad a toutes les chances de largement l'emporter ce qui délégitimerait les rebelles armés et porterait à faux tous les pays qui les ont soutenus. C'est pour remédier à cela que les Occidentaux demandent le retrait du président Assad ou sa non-présentation aux prochaines élections. Les raisons morales évoquées ne sont que des arguties servant à éviter une lourde déconvenue lorsque le peuple souverain se sera exprimé.

 

 

[i] Ce n'est que quand l'AAS et ses alliés ont victorieusement avancé vers l'est que les États-Unis et leurs alliés ont sérieusement combattu l'État islamique en Syrie au prix de la destruction quasi totale de Raqqa.

[ii] Les forces actuellement engagées en Syrie sont des unités d'élite qui ont une mission de formation et d'appui aux FDS.

[iii] Il n’y a pas de correspondants occidentaux en zones rebelles pour cette raison. Les analyses des médias occidentaux se basent sur des informations de correspondants locaux dont on ne connaît pas les sympathies et elles sont de ce fait peu fiables.

[iv] « Malheur aux vaincus. »

[v] En répétant à l'envi que Bachar tue son propre peuple, on peut légitimement se demander combien de vocations de djihadistes ce discours a suscité. Lors d'une guerre civile, tous les protagonistes tuent leurs compatriotes et insister sur les morts d'un camp, c'est prendre parti pour l'autre. D'après des estimations récentes, le nombre de victimes est assez partagé. Ce n'est que depuis peu que le pourcentage de morts rebelles a fortement augmenté.

[vi] Le transfert sans doute durable de nombreuses entreprises de la banlieue d'Alep avec leurs dirigeants et leur personnel vers la Turquie est par exemple un gain turc.

[vii] Il est loin le temps où les médias occidentaux et français en particulier affirmaient sur un ton péremptoire que la Russie n’avait pas les moyens de se mesurer aux Occidentaux et que pour des raisons économiques, elle devra tôt ou tard baisser pavillon. Le sommet du G8 de Belfast en 2013 est encore dans toutes les mémoires. Vladimir Poutine avait résisté à la pression des sept autres membres et il n'avait pas cédé sur son soutien à la Syrie.

 


Au YEMEN : un génocide ?

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Au  YEMEN : un génocide ?



"U zinu" s'effacera devant un analyste dont il partage largement le point de vue pour alerter ses visiteurs sur le drame vécu par la population yéménite et l'hypocrisie, voire le silence coupable des "Occidentaux".
Voici donc, tiré du site "AGORAVOX" un article édifiant de Bruno Guigue. ( 26 novembre 2017)



 

La France complice d’un crime de masse au Yémen



 

En 2011, la France a détruit la Libye au nom des droits de l’homme. En 2017, elle participe à la destruction du Yémen au nom du chiffre d’affaires. La “patrie des droits de l’homme” n’est plus qu’un tas de fumier.


Dans l’indifférence générale, le pays le plus pauvre du monde arabe subit l’horreur d’une agression étrangère meurtrière. Bombardée nuit et jour, la population est affamée par le blocus. Le Yémen compte 27 millions d’habitants. Selon l’ONU, 10 millions d’entre eux nécessitent une aide humanitaire d’urgence, 7 millions sont menacés par la famine et un million sont la proie d’une épidémie de choléra. La pénurie de carburant paralyse les transports, le fonctionnement des réseaux d’eau potable, d’électricité, d’assainissement.

L’aviation saoudienne n’épargne ni les écoles, ni les hôpitaux, ni les lieux de culte. Répandant la terreur, elle cherche à faire plier le peuple yéménite. Ce n’est pas une guerre contre des combattants, mais une entreprise de démoralisation de la population, de destruction totale, d’arasement des infrastructures. L’action combinée des frappes aériennes et du blocus (aérien et maritime) vise à mettre à genoux une population tout entière. Riyad prétend défendre le gouvernement légitime. Mais alors, pourquoi imposer le blocus à l’ensemble du pays ?

Depuis mars 2015, la coalition dirigée par les wahhabites massacre des civils en prétendant combattre une rébellion coupable de s’être alliée avec l’ex-président Ali Abdallah Saleh contre son successeur pro-saoudien Abd Rabbo Mansour Hadi. Cette intervention a fait plus de 10 000 victimes, mais elle n’a pas fait bouger les lignes de force. L’offensive terrestre a échoué, la résistance yéménite est farouche, et un missile a frôlé la capitale saoudienne le 9 novembre. Des centaines de milliers d’enfants souffrent de malnutrition dans un pays dévasté par les bombes et affamé par le blocus, mais cette guerre est sans issue.

La propagande saoudienne la justifie, pourtant, en invoquant la légalité internationale. Le mouvement “Ansarullah” a investi la capitale du pays en septembre 2014 et poussé le président Mansour Hadi à la démission en janvier 2015. Ce succès inattendu a pris de court les Saoudiens et leurs parrains occidentaux. Décidés à intervenir, ils ont obtenu du conseil de sécurité de l’ONU le vote de la résolution 2216 du 14 avril 2015 condamnant la prise du pouvoir par les Houthis et réaffirmant la légitimité du président Hadi.

Cette décision onusienne a offert une couverture juridique autorisant Riyad à frapper le Yémen sans ménagement pour vaincre la rébellion. Perversion du droit international, c’est un chèque-en-blanc qui permet au pays arabe le plus riche d’écraser sous les bombes le pays arabe le plus pauvre. Tout se passe comme si l’agresseur bénéficiait d’une sorte de permis de tuer à grande échelle, avec la bénédiction de puissances occidentales qui lui fournissent des armes en quantité illimitée tandis que la rébellion houthie se voit frappée par l’embargo.

Les armes utilisées pour massacrer le peuple yéménite, la coalition ne les a pas trouvées au pied d’un sapin de Noël. Ce sont des armes occidentales. Les bombes larguées sur les enfants yéménites sont d’une précision remarquable. Félicitations ! Le système de guidage électronique est français. Grâce à leur rayon d’action, les F-35 saoudiens peuvent frapper où ils veulent. Encore bravo, les avions-ravitailleurs sont français. Le blocus maritime qui affame la population yéménite est d’une redoutable efficacité. Cocorico, la marine française y participe. L’histoire retiendra que Hollande et Macron ont fait crever les enfants yéménites.

Que vaut la vie de ces pauvres gosses, en regard de notre merveilleuse industrie de la mort ? La monarchie saoudienne est le premier client de la France. Elle lui a acheté 9 milliards d’armes entre 2010 et 2016, soit 15 à 20 % des exportations françaises. Sans états d’âme, la République arme le bras de l’assassin. Depuis deux ans, Riyad commet un crime de masse dont Paris est complice. En 2011, la France a détruit la Libye au nom des droits de l’homme. En 2017, elle participe à la destruction du Yémen au nom du chiffre d’affaires. La “patrie des droits de l’homme” n’est plus qu’un tas de fumier.

Curieusement, le chœur des pleureuses est aux abonnés absents. Il est vrai qu’on n’est pas en Syrie. Ni “Casques blancs” experts en maquillage, ni parlementaires écolos en vadrouille, ni droits-de-l’hommistes pour signer des pétitions. Le Yémen n’intéresse personne à Saint-Germain-des-Prés. Il est sorti des écrans-radar de la bobosphère. Mais pourquoi tant d’indifférence de la part de bonnes âmes si promptes à s’affliger du malheur planétaire ? La propagande occidentale nous fournit immédiatement la réponse : c’est la complicité des Houthis avec Téhéran. Appartenant à la communauté chiite “zaydite”, le mouvement “Ansarullah” servirait les ambitions de l’Iran.

Le voilà donc, son crime impardonnable, à ce Yémen rebelle. Il est du côté des forces du mal, il pactise avec les mollahs. Les Houthis et leurs alliés admirent le Hezbollah libanais, ils soutiennent la Syrie souveraine, ils croient encore au nationalisme arabe. C’est inadmissible. Pire encore, ces incorrigibles Yéménites, eux, n’ont jamais marchandé leur solidarité avec le peuple palestinien. Pour les impérialistes et leurs larbins, la rébellion victorieuse à Sanaa est une scandaleuse anomalie, une verrue à supprimer du paysage. C’est le Vénézuéla de la péninsule arabique. Ne cherchons pas plus loin les raisons du calvaire qu’on inflige à ce peuple courageux.


 
 
 
 
 

VENEZUELA : UN AUTRE SON DE CLOCHE

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VENEZUELA : UN AUTRE SON  DE CLOCHE

source : https://lavamedia.be/fr/venezuela-lepouvantail-agite-par-loccident/



Un autre son de cloche que celui diffusé par les médias dominants.
                                                                                                     
                                                                                                    u Zinu






 


 




 

Venezuela : l’épouvantail agité par l’Occident
 


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EVA DERONT, Revue Lava, 2 décembre 2017
 
 
Entre inflation, perturbation de l’approvisionnement en biens de première nécessité et barricades, le Venezuela est devenu l’épouvantail agité en Europe pour effrayer tous ceux qui pourraient être tentés par une remise en cause du système capitaliste. Jusqu’en juillet 2017, l’opposition vénézuélienne de droite et d’extrême droite a profité des pénuries et de la dégradation de la situation économique pour déclencher une nouvelle vague de violences et tenter de renverser le gouvernement de Nicolás Maduro. Sans complaisance avec les erreurs du gouvernement, Maurice Lemoine, ancien rédacteur en chef du Monde Diplomatique, fait partie des rares journalistes de terrain qui cherchent à donner une vision factuelle des événements, en replaçant le sabotage économique au centre de l’analyse de la situation politique. Un aperçu de l’ampleur de la tâche et des obstacles auxquels peut se confronter tout gouvernement authentiquement de gauche…
Dans cet entretien, Maurice Lemoine analyse les récents développements des crises qui secouent le Venezuela. Il décrit les tentatives de déstabilisation nationale et internationale, ainsi que les réactions de la population et de l’opposition.
Cet entretien, relu et réactualisé par Maurice Lemoine sur notre proposition, a été réalisé à Paris le 13 octobre 2017, deux jours avant les élections des gouverneurs régionaux
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Article repris par   venezuelainfos
mardi 5 décembre 2017
dans AGORAVOX




Éva Deront. Entre avril et juillet 2017, le Venezuela a été le théâtre d’affrontements et de violences de la part de militants de droite et d’extrême-droite (attaque à l’hélicoptère contre la cour suprême, jeune afro-descendant brûlé vif, barricades, attaques contre la Garde nationale). Comment caractériser l’extrême droite vénézuélienne par rapport aux groupes que l’on connaît en Europe ?
 

Maurice Lemoine.  À 75 %, les manifestants d’opposition au Venezuela ne sont pas des fascistes. Ils appartiennent à une classe moyenne – classe moyenne « haute » et classe moyenne « basse » – qui, majoritairement, par son mode de vie, s’identifie à la bourgeoisie et aspire à rejoindre cette « élite ». (1)
Une partie de leurs homologues seraient dans la rue, ici aussi, si Mélenchon en France ou le PTB en Belgique arrivaient au pouvoir et commençaient à prendre des mesures sociales considérées comme radicales.
Mais il y a aussi une droite dure et une extrême droite. Ce qui les caractérise ? Leur objectif clairement affiché : renverser par n’importe quel moyen, y compris la violence, le chef de l’État. En France, nous avons eu deux périodes de cohabitation : Balladur avec Mitterrand et Jospin avec Chirac. La première chose qu’ont faite ces Premiers ministres en arrivant à l’Assemblée nationale n’a pas été de dire : « On se donne six mois pour renverser le Président. » Au Venezuela, si.
Dans les manifestations, l’opposition utilise des groupes de choc, une espèce de mélange de nervis, de délinquants et, près de la frontière, dans les États de Miranda et Táchira, de paramilitaires colombiens… Il y a aussi, c’est très intéressant, toute une génération de jeunes petits bourgeois qui vivent leur mai 68 à l’envers. Ils sont comme des fous : il n’y a jamais eu autant de selfies à Caracas ! Ils passent leur temps dans les manifestations et ont réellement l’impression de se battre pour la liberté.
 
Vous avez passé trois semaines, en juin, dans les manifestations : arrivez-vous à quantifier cette participation ?
 
Prenons une manifestation d’environ 20 000 personnes : il y en a environ 15 000 de la classe moyenne — « On n’est pas content, on en a marre du castro-communisme ! » —, dont 3000 jeunes, qui vivent l’aventure de leur vie, et puis les violents, nervis et lumpen. Ce sont eux qui vont défier la Garde nationale.
L’opposition utilise des groupes de choc, une espèce de mélange de nervis, de délinquants et de paramilitaires colombiens
Un universitaire de gauche – on dénonce beaucoup les mensonges ou l’incompétence des journalistes, mais il faudrait aussi s’intéresser à ce que racontent les universitaires – a décrit les manifestations de la façon suivante : les gens manifestent, la Garde nationale réprime, et les jeunes s’interposent pour protéger… C’est un mensonge éhonté ! Je les ai vus faire : les gens manifestent, les groupes de choc prennent la tête de la manifestation, vont défier la Garde nationale, et… les gentils petits bourgeois et le reste sont derrière. Et à un moment, c’est l’affrontement entre groupes.
 
Quelle est alors la réaction des forces de l’ordre ?
 
L’encagement d’une manifestation comme on a pu le voir en France lors des mobilisations contre la loi El-Kohmri, ça n’existe pas. Paradoxalement, la police est beaucoup plus provocatrice et répressive en France qu’elle ne l’est au Venezuela. Là-bas, ce n’est pas compliqué, des groupes bloquent la autopista [autoroute urbaine, NDLR] qui joint l’Est et l’Ouest de Caracas. Tous les jours ils viennent là, s’installent, provoquent la Garde nationale ; et puis au bout de deux heures, la Garde nationale vient dégager la voie avec des canons à eau et des lacrymogènes. Ce n’est pas agréable, mais les méthodes sont moins perverses qu’ici.
Tout ce qui se passe au Venezuela en ce moment – que ce soit la violence, les pénuries, les difficultés – n’est pas destiné aux Vénézuéliens, mais à la communauté internationale.
En tant que journaliste, je n’ai pas eu de problème avec les forces de l’ordre. À un moment, j’étais tout seul avec mes deux appareils photo, tout le monde était parti en cavalant ; la Garde nationale arrive, s’arrête et repart. Je n’ai pas vu les journalistes se faire matraquer. En revanche, je ne me sentais pas particulièrement en sécurité au milieu des groupes de délinquants.
 
Depuis l’élection de l’Assemblée constituante le 30 juillet 2017, on assiste à une scission au sein de l’opposition, affaiblie. Les violences ont cessé. Ces groupes de choc aujourd’hui, que font-ils ? Et que prévoit la droite suite aux élections régionales du 15 octobre ?
 
Je ne sais pas quelle est leur stratégie. L’élection aux régionales s’est déroulée dans des conditions normales puisque l’opposition avait décidé d’y participer. Comme toujours, on a assisté dans un premier temps à l’application de leur logique « pile je gagne, face tu perds ». Donc là où ils ont gagné, cinq États, ils ont dit : « on a gagné ». Mais là où les chavistes l’ont emporté, dans dix-huit États, l’opposition a crié : « il y a fraude ! ». Évidemment, on oublie ensuite que les représentants de tous les partis avaient participé aux essais techniques du système électoral et qu’ils avaient tous donné leur aval.
Aujourd’hui, alors que quatre des cinq gouverneurs élus de l’opposition ont reconnu l’Assemblée constituante, il y a deux problèmes pour l’opposition : leur base est complètement désarçonnée et ils ne savent plus où ils en sont. Ils ont envoyé leurs forces dans la rue pendant quatre mois en leur disant : « on renverse Maduro, c’est une dictature » ; ils ont accusé le Conseil national électoral de tous les maux et, d’un seul coup, ils leur annoncent : « On arrête tout et on participe aux élections. » Les radicaux vouent les dirigeants aux gémonies, les autres se demandent à quoi ça rime. Et par ailleurs, ils ont organisé des primaires pendant lesquelles ils se sont mutuellement lynchés. Maria Corina Machado, la seule qui ne voulait pas participer aux élections, a par exemple lancé son nouveau parti Soy Venezuela. Et celui qui a tiré son épingle du jeu, c’est le vieux parti social démocrate  Accion Democratica, qui est resté un peu en retrait pendant les violences.
Quant à la suite des événements, elle est aussi incohérente : mettant en cause le Conseil National Electoral, une partie de la MUD [Table de l’unité démocratique, coalition anti-chaviste – NDLR] décide qu’elle ne participera pas aux élections municipales de décembre, tout en annonçant qu’elle se prépare pour la présidentielle de 2018…
 
Qu’est ce qui fait qu’on a eu et qu’on a encore cette attaque de la droite nationale et internationale sur le Venezuela, à l’instar d’Emmanuel Macron dénonçant « une dictature qui tente de survivre au prix d’une immense détresse humaine » ? (2)
 
La première raison, un grand classique, ce sont les ressources : pas seulement en pétrole [le Venezuela possède les plus grandes réserves de pétrole au monde, NDLR (3) ], mais également en eau, en or, en minerais en tous genres. En témoigne le grand projet de mise en exploitation de l’Arco minero, l’Arc minier, une zone riche en ressources minérales, or, fer, coltan, qui représente environ 10 % du territoire vénézuélien. La deuxième chose, c’est que, du fait de l’action de Chávez, et de son aura, même après son décès, le Venezuela est devenu un symbole. Faire tomber Maduro, c’est faire tomber le chavisme. Qu’on aime ou pas Maduro, si on prend les choses raisonnablement, des élections présidentielles auront lieu en 2018. Mais ce que l’opposition veut, c’est pouvoir proclamer à la face du monde : « Une révolte populaire a fait tomber le chavisme ! » Cela neutraliserait pour les vingt prochaines années l’espoir et la dynamique que la révolution bolivarienne a soulevés dans toute la région. Donc il faut que Maduro tombe.
Il y a des problèmes sérieux au Venezuela, y compris une gestion pas toujours optimale du gouvernement, mais la guerre économique et la déstabilisation démultiplient les difficultés
Les fameuses pénuries…  Elles ne sont pas dues à la gestion de Maduro. Comme par hasard, il y en a eu systématiquement avant toutes les élections : l’ensemble de la production de Polar [une des principales entreprises alimentaires, NDLR] a reculé de respectivement 37 %, 34 % et 40 % avant l’élection présidentielle de 2013, pendant la phase de violence de 2014 –  la Salida – et avant les législatives de décembre 2015. Battu, Capriles, candidat de l’opposition aux dernières élections présidentielles, avait déclaré après l’élection de 2012 : « Chávez, c’est le Cassius Clay de la politique. » Donc, après sa mort, quand ils ont vu Maduro arriver, ils se sont dit : « Lui, on va lui régler son compte ! » Et les pénuries se sont aggravées. À l’époque du blocus pétrolier fin 2002-début 2003, tout le monde a admiré Chávez, car il a tenu pendant deux mois face à la guerre économique ; paradoxalement, bien peu se rendent compte de la capacité de résistance de Maduro : cela fait trois ans qu’il résiste !
Quant au traitement médiatique et à la récupération politique de la « famine » : Je suis revenu avec cinq cents photos de la rue, des manifestations des chavistes et de l’opposition… Tous les gens m’ont dit : « Il a fallu qu’on change d’habitudes alimentaires, j’ai perdu deux kilos. » Voilà. Mais le traitement qui en est fait, c’est comme si vous regardiez les gens dans la rue, ici, et que vous me disiez qu’ils ont l’air famélique… Ça ne tient pas debout.
 
Que ce soit Jean-Luc Mélenchon en France ou Pablo Iglesias en Espagne, la gauche européenne est constamment attaquée lorsqu’elle évoque le Venezuela. Quels sont les enjeux de la situation ?
 
Il ne se passe pas un jour où l’on ne tape pas sur le Venezuela dans les médias français ; mais 300 000 morts au Congo et… rien. Pourquoi cette différence ? C’est clairement un enjeu de politique intérieure. La cible en France, c’est la France insoumise ; en Grande-Bretagne, Corbyn ; en Espagne, Podemos ; en Allemagne, Die Linke. Le discours est simple : « si vous votez Mélenchon, vous serez dans la même situation que le Venezuela. »
Tout ce qui se passe au Venezuela en ce moment – que ce soit la violence, les pénuries, les difficultés – n’est pas destiné aux Vénézuéliens, mais à la communauté internationale. La violence sert à faire apparaître le gouvernement de Maduro comme répressif. Pourtant, Maduro prône régulièrement le dialogue, pour montrer à cette communauté internationale qu’il est prêt à discuter. Il y a peu, il a accepté que le Mexique et le Chili, qui ne sont pas des amis du Venezuela, fassent partie des médiateurs internationaux. Si les observateurs et la communauté internationale étaient de bonne foi, ils ne pourraient que constater qu’il y met de la bonne volonté et que c’est l’opposition qui bloque.
 
N’est-ce pas naïf ? L’opposition a constamment répété qu’elle ne voulait pas de dialogue et qu’elle souhaitait renverser le gouvernement.  (4)
 
Elle est plus perverse que ça. Une partie d’entre elle passe son temps à dialoguer tout en annonçant à ses partisans qu’il n’est pas question de dialoguer. Et de fait, elle rompt régulièrement les conversations en mettant en cause le pouvoir. Double bénéfice : d’un côté, elle paraît modérée, rapport à la communauté internationale ; de l’autre, elle laisse les radicaux mener la déstabilisation. Et Maduro apparaît comme « le méchant », alors qu’il accepte la médiation du Mexique, du Chili et de Zapatero, qui n’a rien d’un gauchiste…
Pour comprendre la situation économique qui perturbe grandement la vie des Vénézuéliens aujourd’hui, pourriez-vous revenir sur le partage des tâches entre l’État et le secteur privé qui représente toujours plus de 90 % des entités industrielles ? A-t-on une idée de l’absence d’investissement dans les domaines clefs tels que l’énergie, l’agroalimentaire ?
La légende veut que le Venezuela soit un pays pétrolier qui n’a jamais pensé à diversifier son économie. Si l’on admet qu’il n’a pas réussi à s’extraire de cette dépendance pour l’exportation – 90 % des devises du pays proviennent de l’exportation du pétrole par le secteur public –, cela ne veut pas pour autant dire que rien d’autre n’existe à l’intérieur du pays : 84 % de la production nationale ne provient pas du pétrole, mais de la manufacture, des services, du commerce et de l’agriculture (5) ; ce n’est néanmoins pas suffisant pour en faire un pays industriel.
Parmi les économistes qui arrivent au constat qu’il n’y a pas eu de diversification, aucun ne propose de solution. Or, en regardant à l’international, quels sont les pays qui ont pu changer leur mode de développement ? Les tigres asiatiques dans les années 1990. Qu’ont-ils utilisé ? Leur avantage comparatif : l’exploitation de la main d’œuvre dont le coût a été réduit au minimum. De même pour les maquiladoras mexicaines, les usines de sous-traitance. Par définition, ce n’est pas l’optique des gouvernements de gauche d’Amérique latine.
 
Dans un article paru dans sur le site Mémoire des luttes, vous établissez un parallèle entre cette déstabilisation et la guerre économique qui a visé Salvador Allende, au Chili, au début des années 70. Quels en sont les principaux axes ?
 
Il y en a quatre : des pénuries organisées, une inflation artificiellement provoquée, un embargo commercial et un blocus financier international. Pour importer les biens de première nécessité, l’État fournit des dollars à taux préférentiel au secteur privé. En 2004, les montants atteignaient 15 milliards de dollars et il n’y avait aucune pénurie. En 2013, on arrivait à 31 milliards et tous les biens de première nécessité avaient disparu. On parle souvent du papier toilette : d’où vient la pénurie, alors que l’entreprise qui importe et distribue les rouleaux, Kimberley Clark, a reçu 1000 % de devises en plus en 2014 qu’en 2004 et 2011 ?
Des sommes monstrueuses, allouées à l’importation des aliments ou des médicaments, ont été détournées par le secteur privé
Depuis 2003, un contrôle des changes a été instauré pour éviter la fuite des capitaux. Dans tous les pays où l’on a agi de même, on a assisté au développement d’un marché parallèle. La particularité du Venezuela, et là on est dans la guerre économique, c’est que ce marché parallèle échappe à toute logique économique. Le taux de change est manipulé par le site DolarToday, depuis la Colombie et Miami. (6)
Le dollar parallèle peut atteindre 10 000 bolivars pour un dollar, voire 42 000 bolivars actuellement [60 000 à la mi-novembre, NDLR] : cela n’a aucune rationalité, mais entraîne, évidemment, des conséquences désastreuses sur l’inflation et le niveau de vie.
Un autre instrument de la déstabilisation économique, c’est la contrebande vers la Colombie. Par exemple, des médicaments achetés avec les dollars préférentiels arrivent au Venezuela, où ils ne sont pas mis en vente : ils repartent directement vers la Colombie, souvent avec la complicité de militaires et de gardes nationaux achetés par les mafias. Des tonnes de médicaments. Et, quinze jours après, ils reviennent au Venezuela où ils sont revendus dix fois plus cher au marché noir.
Autre exemple : en 2004, les entreprises pharmaceutiques ont reçu environ 600 millions de dollars pour acheter des produits à l’extérieur et les revendre en bolivars au Système public national de santé. Il n’y avait alors pas de pénurie. En 2013 et 2014, on ne trouve plus de médicaments et pourtant les entreprises ont obtenu entre 2 et 3 milliards de dollars… Sur place, j’ai demandé : « Pourquoi ne nationalisez-vous pas et pourquoi l’État n’importe-t-il pas lui-même les médicaments ? » On m’a répondu, ce qui demande à être vérifié : « Les laboratoires internationaux ne vendront pas directement à l’État vénézuélien car ce serait se mettre à dos toute la corporation ». Ces problèmes, relativement récents dans ce domaine, amènent à poser la question : « Doit-on et peut-on court-circuiter les laboratoires pharmaceutiques occidentaux ? » Un début de solution a peut-être été trouvé. En septembre dernier, le Venezuela a signé un accord avec l’Inde pour y acquérir une partie de ses médicaments.
 
En réponse à cette situation, observez-vous une évolution dans les mesures économiques prises par l’État ?
 
On ne discerne pas de boussole économique ou idéologique évidente. Face aux problèmes, faut-il envisager des nationalisations ? Je prends l’exemple du pain : historiquement, le Venezuela ne produit pas de blé, c’est l’État qui l’importe. Il le fournit à des minoteries privées qui transforment le blé en farine, mais, ensuite, un véritable chaos affecte la distribution. La majorité des boulangeries du pays n’est pas livrée régulièrement tandis que d’autres, plus favorisées, leur revendent au prix fort une partie de leurs surplus, ou préfèrent vendre des gâteaux, des brioches, des sandwiches… plutôt que du pain. J’ai posé la question à un ancien ministre de l’économie, Luis Salas : puisqu’il y a sabotage, pourquoi ne nationalisez-vous pas ? Il répond — et comment lui donner tort ? —: « l’État ne peut pas se charger de tout et n’a pas la compétence pour faire du pain et distribuer du pain ». Ça peut toute fois se discuter, compte tenu de la présence d’oligopoles : 50 % de la production totale d’aliments traités par l’agro-industrie sont concentrés dans 10 % du total d’entreprises privées. (7)
 
Cela a pourtant été fait en partie pour le pétrole : alors que, avant son arrivée, l’état-major de PDVSA prenait le chemin de la privatisation, Chávez a fait en sorte que l’État devienne l’actionnaire majoritaire de toutes les concessions du Venezuela, et reprenne le contrôle des activités d’exploration, de production et des services annexes…
 
Oui. D’ailleurs Salas me parle du pain, puis il s’arrête et réfléchit : « Tout de même… Si nous sommes capables de faire du pétrole, nous devons être capables de faire du pain…» Et il ajoute : « Ce qu’il faut, ce n’est pas nationaliser, mais créer des entreprises alternatives avec la base. » De fait, on connaît les problèmes induits par des nationalisations systématiques : on crée à terme une bureaucratie, avec ses contraintes et inconvénients.
 
L’établissement d’une bureaucratie n’est pas automatique : la base chaviste a souvent demandé à avoir plus de contrôle sur l’appareil d’État.
 
Oui, mais se pose le problème de la ressource humaine. Dès sa naissance, la révolution bolivarienne a manqué de cadres, qui sont très souvent liés à l’opposition. Le meilleur exemple en est la réforme agraire. Elle a été faite et elle a eu des succès : de 2001 à 2010, la production agricole a augmenté de 44 % ; 7 millions d’hectares ont été régularisés, les paysans obtenant des titres de propriété ; 3,5 millions d’hectares ont été repris au latifundio et 1 million de nouveaux hectares ont été mis en production, même si cette augmentation de la production a été contrebalancée par une augmentation de la consommation. Du début de la réforme agraire en 2001 à la fin 2004, par exemple, près de 7 000 coopératives ont été créées. Elles ont dramatiquement manqué de cadres. Il reste 2 % de paysannerie au Venezuela, sans les cadres techniques nécessaires pour relancer une agriculture moderne, écologique, etc. Les paysans se sont souvent retrouvés livrés à eux-mêmes, ils ont beaucoup de mal à moderniser ce secteur. C’est ce manque d’efficacité et d’efficience qui fait apparaître la réforme agraire comme un semi-échec, alors que c’est globalement une réussite.
Ensuite, l’appareil d’État n’est pas constitué que de militants : vous avez le ministre, cinq vice-ministres, vingt cadres engagés, qui veulent que les choses avancent et puis, derrière, une pesanteur terrible de ceux qui sont là, qui ne sont pas forcément chavistes, et qui soit sabotent, soit ne font pas grand-chose.
 
Les licenciements de ceux qui voulaient forcer Chávez à la démission, après les lock-outs patronaux de 2002-03, n’ont eu lieu que dans le secteur pétrolier ?
 

Oui, 18 000 personnes en tout. En même temps c’est difficile : vous vous mettez dans la position de vous faire accuser de totalitarisme, d’État policier… Et il faut savoir composer avec les réactions de la « communauté internationale ». La base chaviste, elle, elle réclame la mano dura, une « main ferme ».
El bachaqueo, le marché noir qui s’est établi suite au détournement et à l’accaparement des biens de première nécessité n’existerait pas si on se trouvait dans un État policier. Les Cubains, par exemple, ont instauré une sorte de contrôle social à travers les comités de défense de la révolution, les CDR, dans tous les quartiers. Et vous n’avez pas ce phénomène de corruption.
Des sommes monstrueuses, allouées à l’importation des aliments ou des médicaments, ont été détournées par le secteur privé. Le reproche que l’on peut faire à l’État n’est pas de ne pas avoir investi, mais de ne pas avoir assez contrôlé. En ce moment, après l’élection de la Constituante et l’éviction de la procureure générale Luisa Ortega, ils sont en train de reprendre en mains le Ministère public et de découvrir d’énormes affaires de corruption, des surfacturations de l’ordre de 200 millions de dollars ! Par ailleurs, une cinquantaine de cadres dirigeants de PDVSA ont été arrêtés. Pour la première fois, ils s’en prennent sérieusement à la corruption.
 
Pourquoi ce problème de corruption n’a t-il pas été traité avant ?
 
La dette sociale était tellement énorme, quand Chávez est arrivé au pouvoir, qu’il a dit : « Il faut sortir les gens de la pauvreté, il faut qu’ils mangent. » Comme il y avait de l’argent, ils ont dépensé sans compter, sans trop se préoccuper de la corruption. Ça a été peut-être une certaine naïveté de gauche. C’est uniquement lorsque les ressources ont sérieusement diminué, du fait de l’effondrement des prix du pétrole, que le problème s’est posé. On a découvert tout récemment que c’est précisément au cœur du Ministère public que la corruption a pu se développer ; apparemment, sous l’autorité de la procureure générale Luisa Ortega, il s’était transformé en une entreprise de chantage. Des magistrats disaient aux gens qui trempaient dans des affaires de corruption : « Soit tu paies, soit on te poursuit. » Cela faisait longtemps que la base chaviste dénonçait la grande corruption : elle est bien consciente du train de vie de certains bureaucrates.
 
C’est également ce qui alimente les critiques concernant la « bolibourgeoisie »… Est-ce qu’on a effectivement assisté à la naissance d’une nouvelle bourgeoisie ? Comment se caractérise-t-elle ?
 
Il y a évidemment des chavistes ou des pseudos chavistes corrompus. Après sa tentative de coup d’État en février 1992, Chávez a passé deux ans en prison, puis il a été amnistié pour faire baisser la pression due à une profonde crise sociale et à sa forte popularité. Beaucoup se sont rendus compte que Chávez, c’était l’avenir. À son arrivée au pouvoir en 1999, il a donc eu autour de lui des révolutionnaires sincères, mais aussi un certain nombre d’arrivistes qui comprennent que c’est « l’endroit où il faut être ». Ensuite, il y en a qui se bâtissent des fortunes à l’ombre du pouvoir : soit par la corruption, soit par des voies classiques de formation de la bourgeoisie. On a connu ce phénomène au Nicaragua ou dans tous les pays qui, un jour, ont fait une révolution ou se sont délivrés du joug colonial… Mais les grandes affaires de corruption impliquent des fonctionnaires et des gens du secteur privé. Par exemple, la majorité des entreprises qui trafiquent les aliments et les biens de première nécessité appartiennent au secteur privé.
Chávez avait beaucoup évolué. Il était plutôt « troisième voie » avant de se radicaliser suite au refus de la droite d’accepter quelque réforme que ce soit
Il faut préciser que ces seuls phénomènes n’expliquent pas la crise. Le Brésil connaît également des problèmes de corruption, cela n’en fait pas pour autant un pays à genoux. Il y a des problèmes sérieux au Venezuela, y compris une gestion pas toujours optimale du gouvernement, mais la guerre économique et la déstabilisation démultiplient les difficultés. Les erreurs du pouvoir, elles, y contribuent à hauteur de 20 % — 30 %.
 
Face à cette situation, on s’interroge sur le soutien actuel de la population vénézuélienne. Les élections législatives de 2015, qui ont vu la droite emporter 99 sur 167 sièges au Parlement, ont marqué un moment de lassitude et de désapprobation de la base chaviste envers la politique menée par Maduro. Qu’en est-il aujourd’hui ?
 

Le cœur dur du chavisme on l’estime à 30 % de la population. L’événement important a été l’élection de l’Assemblée constituante en juillet 2017 : le cœur chaviste a réagi puisque plus de huit millions de personnes sont allées voter, soit 41 % du corps électoral, malgré les barrages physiques et les menaces de l’opposition. Ça, c’est un vrai signe, qui a eu des conséquences totalement inattendues puisque la violence s’est arrêtée du jour au lendemain. De même, lors des régionales du 15 octobre, on a assisté à la victoire du chavisme dans dix-huit États sur vingt-trois : il s’impose avec 54 % des suffrages et une participation de 61,4 %, alors qu’il s’agit d’un scrutin pour lequel les Vénézuéliens, traditionnellement, se mobilisent assez peu.
La guerre économique affecte les gens d’une manière extrêmement dure. Ils galèrent pour trouver à manger, payent plus cher à cause du marché noir, leur pouvoir d’achat s’effondre. Et donc à un moment ils ont dit : « Maduro, qu’est-ce que tu fais ? » Ça a été le vote rejet de 2015, de découragement, de fatigue, mais qui ne s’est pas traduit par un transfert des votes chavistes vers la droite : celle-ci a gagné 350 000 voix, les Chavistes en ont perdu deux millions.
Ont suivi les « guarimbas » de 2014 [violentes barricades de rue qui ont causé plusieurs morts, NDLR] et la violence de cette année-ci, entre avril et juillet. Les gens se rendent compte de qui est responsable de cet état de fait. Dans la rue, dans le quartier de Chacaito, j’ai vu des gens exaspérés qui en avaient marre des manifestations de l’opposition et qui encourageaient les policiers. Même une partie des sympathisants de l’opposition a été prise en otage par ces manifestations. Chacao, Chacaito, Altamira, c’est un peu l’équivalent de Neuilly, Auteuil, Passy à Paris. Là-dessus j’ai des témoignages directs : des groupes d’extrême droite étaient présents dans les quartiers, en permanence, et les gens ne pouvaient plus emmener leurs enfants à l’école. À chaque fois qu’ils passaient, c’était : « on défend la liberté : tu paies ». Et donc y compris des membres de l’opposition plutôt modérée, plutôt respectable, en ont eu marre.
 
Vous avez préfacé le livre « Des Taupes à Caracas », qui raconte la vie et la participation à la révolution bolivarienne de l’ensemble de la population vénézuélienne : des médias locaux, des aides soignants, des paysans, des policiers… Dans le processus de contre-révolution en cours, comment se positionnent les comités populaires, les coopératives, et les structures de démocratie directe qui avaient été mises en place par Chávez ?
 
Il y a des secteurs plus radicaux, d’autres moins. Tout en se montrant critique à l’égard du gouvernement, de la bureaucratie et de leurs dysfonctionnements, le noyau dur du chavisme demeure d’une fidélité absolue à Maduro.
Au niveau des conseils communaux, depuis Chávez, l’une des difficultés est l’antagonisme fréquent entre les conseils et les maires ou les députés. Vous êtes élu maire, vous appartenez au PSUV [Parti socialiste Unifié du Venezuela, créé en 2007 par Chávez, NDLR]. De l’autre côté, il y a le conseil communal. Et d’un seul coup, il a des prérogatives aussi importantes que les vôtres, ça n’est pas forcément de votre goût !
Lors de l’élection de l’Assemblée nationale constituante, cette participation populaire a été favorisée par l’élection des 173 représentants sectoriels [sur les 545 membres de l’Assemblée constituante, 364 représentent les circonscriptions municipales, 173 différents groupes sociaux (travailleurs, étudiants, retraités…), et 8 les communautés indigènes, NLDR] : une évolution douce vers le « socialisme du XXIe siècle » de Chávez avec les communes, les conseils communaux…
On retrouve ces relations parfois difficiles au niveau de la paysannerie, lorsque des paysans occupent les terres dues par la réforme agraire et rencontrent l’opposition de gouverneurs, y compris chavistes. Dans le chavisme, il y a de tout : des opportunistes, des gens qui ont passé des alliances avec les grands propriétaires du coin, des paysans qui sont réprimés par la Garde nationale… Aujourd’hui, pour la réforme agraire, c’est la base radicale qui avance, parfois contre la bureaucratie des couches intermédiaires du chavisme ou du pseudo chavisme. Et en général, c’est la paysannerie qui reste la plus fidèle au chavisme, de même que les campagnes. Ce n’est pas un hasard si le système mis en place pour l’élection de la Constituante qui, d’une certaine manière, favorise les campagnes au détriment des villes, fait enrager l’opposition.
 
Dans certaines régions, notamment à Zulia, Barinas, Apure, les habitants ont créé, avec succès, des brigades de défense populaire pour lutter contre les incendies, le vandalisme et les violences des groupes de droite. Est-ce que ce sont des régions avec une forte composante paysanne ?
 
Oui, bien sûr. Mais les paysans subissent une grosse pression : au Táchira, par exemple, ils doivent faire face à des groupes mi paramilitaires mi délinquants. La mission brésilienne du Mouvement des sans terre qui est là-bas a été attaquée par des paramilitaires. Plus de cent militants paysans, chavistes, ont été assassinés au Venezuela. Les conflits sont permanents.
 
Assiste-t-on à la création d’une classe moyenne qui se désintéresserait du processus après avoir profité du programme Sembrar el petroleo (semer le pétrole) ?
 

C’est une thèse qui a été développée en Équateur surtout : les gens sortent de la pauvreté, ils accèdent à la classe moyenne et à partir de là, aspirent à continuer en s’identifiant aux plus riches. C’est en partie vrai, en partie seulement.
Il y a eu des phénomènes comme ce qu’il s’est passé avec la Mision Vivienda : l’octroi de 1,8 millions de logements sociaux puis la découverte que des gens qui y avaient eu accès les avaient revendus. Mais on ne peut pas tout expliquer par ça.
Quand on a connu le Venezuela avant Chávez, la différence saute immédiatement aux yeux. Ce n’est pas un hasard si la base chaviste se remobilise en ce moment
Au niveau du Conseil communal — au-delà du « c’est génial, c’est le processus de Chávez qui est en train de se mettre en place » —  une expérience m’a beaucoup éclairé : en allant en visiter un dans la banlieue de Caracas, comme j’étais là pour Le Monde diplomatique qui a plutôt bonne réputation au Venezuela, je m’attendais à rencontrer du monde. J’arrive dans un grand hangar avec… huit personnes. Ils m’expliquent : « Au début on était nombreux, une bonne cinquantaine. Quand les gens se sont rendus compte qu’ils n’allaient en tirer aucun avantage matériel personnel, mais que c’était un travail de militants, ils sont partis. »
 
Vous avez pourtant signalé que la base s’est massivement mobilisée pour l’élection de l’Assemblée constituante. Est-ce que la Constituante vient répondre à sa demande de « mano dura » et va lui permettre de reprendre de la place dans le jeu politique ?
 

Oui. J’ai mis un petit bémol sur les conseils communaux, où, partant d’une idée magnifique, on se trouve confronté à une réalité plus complexe.
Mais ce qui va réactiver la base en réalité, c’est la résolution des problèmes économiques quotidiens. Il y a eu un certain scepticisme au moment où Maduro a annoncé l’élection d’une Constituante. Des gens proches se sont demandé : « A quoi ça va servir ? Notre problème c’est qu’on ne trouve ni pâtes ni riz dans les magasins… » Malgré tout, le processus a pris. Il y a des résultats : par exemple, des communes demandent à être entendues, elles ont leurs représentants élus sectoriellement ; les femmes poussent le thème de l’avortement…
C’est le grand brainstorming. Moi aussi j’ai été étonné, surpris, sceptique dans un premier temps. À quoi ça va servir ? La violence a cessé du jour au lendemain. Je ne sais même pas pourquoi, je ne comprends pas la stratégie de l’opposition. Puis vient la destitution de la procureure générale et, d’un seul coup, on s’attaque à la corruption. Face à cette fameuse guerre économique et à une nécessaire réactivation de l’économie, s’ils réussissent à remettre de l’ordre dans la distribution des aliments, des biens, etc. — car leur importation n’a cessé que partiellement — là, pour le coup, ils toucheront l’essentiel.
 
Qui compose la Constituante ? A-t-elle été principalement nourrie par les rangs du PSUV ?
 
La partie sectorielle des élus de cette Constituante a soulevé des critiques féroces. Cela mériterait pourtant un vrai débat, notamment chez ceux qui ne cessent de dénoncer la reproduction des élites : là, il y a une représentation des travailleurs, des paysans, des pêcheurs, des étudiants… Ça échappe partiellement à l’appareil du PSUV, ce ne sont pas des leaders traditionnels qui ont été élus.
 
Vous insistez sur le rôle de la manipulation extérieure pour créer de l’inflation et une situation de chaos économique ; il est difficile à un gouvernement de lutter contre… Mais est-il prévu que la Constituante apporte une réponse économique aux problèmes internes tels que le boycott du secteur privé et de son contrôle des moyens de production et de distribution ?
 
Dans le cadre de cette Constituante, le pouvoir vient d’annoncer la mise en place spécifique d’une « Constituante économique » chargée de s’organiser à deux niveaux : le premier, structurel, visant le long terme, et chargé de réformer le système économico-productif, de renforcer le système financier et de développer un nouveau système de distribution, de commercialisation et de fixation des prix ; le second, chargé de faire des propositions pour le court terme afin de réactiver la production et de corriger les distorsions structurelles de la fixation des prix. Maduro a souhaité que la base soit impliquée dans ces processus qui ne doivent en aucun cas être bureaucratiques. On verra ce qu’il en sera, sachant que la Constituante s’est donnée deux ans et qu’il y a là des problèmes qu’il faudrait régler très rapidement.
 
Depuis l’intensification des attaques de la droite, constate-t-on des défections, des bouleversements au sein du gouvernement ?
 
Non. C’est un phénomène journalistique intéressant : comme tout le monde a envie de prendre ses distances avec le Venezuela, une certaine gauche se rabat sur le « chavisme critique ». Mais seuls cinq des anciens ministres de Chávez ou de Maduro font partie de la « Plateforme du peuple en lutte et du chavisme critique » récemment créée, qui n’a aucun ancrage populaire. Curieusement, on ne médiatise pas les 137 autres ex-ministres qui, à des degrés divers, appuient toujours Maduro.
Mes confrères dénoncent systématiquement la paille dans l’œil de Maduro tout en ignorant la poutre dans celui de l’opposition.
Si l’on prend Jorge Giordani, qui a été l’architecte de la politique économique de Chávez, il a été sorti du gouvernement par Maduro, ce qui a, à l’évidence, engendré une certaine frustration. Mais, tout en dénonçant avec virulence l’actuel gouvernement, il ne procède à aucune autocritique. Affirmer : « en 2012, vingt-cinq milliards de dollars ont été dilapidés dans l’obtention de devises » alors qu’il était lui-même au gouvernement et menait la politique économique… il ne faut quand même pas exagérer ! Tout comme Luisa Ortega : elle était au Ministère public depuis 2007. En trois semaines, elle déclare le contraire de tout ce qu’elle a dit depuis dix ans. Critique, sans aucun doute, mais chaviste sûrement plus : la voici maintenant, cul et chemise avec Washington, réclamant le déferrement de Maduro devant la Cour pénale internationale pour « crimes contre l’Humanité ».
Bien sûr, devant la violence de l’agression, un phénomène logique se produit. Ceux qui défendent la révolution évitent l’étalage des divergences et des critiques. Mais les chavistes sont tous critiques, à commencer par Chávez, qui, un peu avant sa mort, parlait d’un nécessaire golpe de timón, un coup de gouvernail pour rectifier les erreurs voire les dérives de la révolution.
Vous disiez qu’il n’y a pas d’orientation politique ou idéologique aujourd’hui ; pourtant, sur la fin sa vie, Chávez a essayé de revenir à une doctrine plus marquée, le socialisme du XXIe siècle.
Très clairement, avec Chávez puis Maduro, on se trouve dans une séquence post-néolibérale. Mais il est vrai que, à partir de 1998, Chávez avait beaucoup évolué. Il était plutôt « troisième voie » avant de se radicaliser suite au refus de la droite d’accepter quelque réforme que ce soit. Le procès qui est fait à Maduro de rompre avec le chavisme ou de trahir le chavisme n’est pas sérieux. Il prend le relais et poursuit ce que préconisait Chávez, par exemple la mise en exploitation de l’Arco minero. Une étape vers la diversification, même si l’on reste dans une économie de rente. Cette annonce a déclenché de fortes polémiques, curieusement pas tellement à droite, mais à l’extrême gauche. C’est la même chose en Équateur, sur le thème de l’extractivisme : l’extrême gauche s’est déchaînée contre Correa.
Au Venezuela, ce courant présenté comme du « chavisme critique » compte avec Marea Socialista – une des multiples factions trotskystes –, dont le principal leader Nicmer Evans n’a rien trouvé de mieux, il y a quelques semaines, que d’aller participer à un colloque avec la droite et l’extrême droite.
 
Comment percevez-vous l’attitude de Marea Socialista, aujourd’hui, dans une période de très fortes tensions, de mise en danger du gouvernement ? Les critiques qui sont portées concernant la nature bourgeoise de l’État chaviste, de bonapartisme…
 
Au nom d’une « révolution parfaite » qui n’existe que dans l’imagination de ceux qui n’ont pas les mains dans le cambouis, la critique systématique permet de se donner le beau rôle à peu de frais. Dès que Chávez est arrivé au pouvoir, la gauche s’est cassée en deux : le MAS, Causa Radical, le PC… Mais que ce soit Marea Socialista au Venezuela, les rénovateurs sandinistes au Nicaragua, l’extrême gauche équatorienne, aucun n’a jamais réussi à représenter une option politique susceptible d’entraîner l’électorat.
Ce qu’ont fait Chávez et Maduro n’est pas parfait. On peut et on doit évidemment avoir un regard critique. En 1973 au Chili, des débats enflammés genre « critique de gauche » de Salvador Allende se déroulaient entre le Parti socialiste, le PC et le MIR. Néanmoins, aussi bien là-bas qu’ici, on avait la lucidité de dire : « Compte tenu de l’agression dont il est victime, la priorité c’est de défendre ce gouvernement socialiste. » Maintenant on découpe l’histoire en tranches : tous les trois ans, on oublie ce qui s’est passé auparavant. Quand on a connu le Venezuela avant Chávez, la différence saute immédiatement aux yeux. Ce n’est pas un hasard si la base chaviste se remobilise en ce moment. Devant la menace d’un retour de la droite, elle, elle se souvient.
 
Plus personnellement, en tant que journaliste, pourquoi portez-vous cet intérêt à l’Amérique latine et au Venezuela ?
 
J’ai connu l’Amérique latine dans les années 70-80-90, à une époque où la pauvreté est passée de 120 millions à 225 millions de personnes. Je suis capable de faire la différence. J’appartiens à une génération qui a connu la dictature au Chili, en Argentine, en Bolivie. Quand on me parle de dictature au Venezuela, où il y a des élections avec une opposition organisée et qui domine les médias, ça me fait rire. Au prétexte qu’il y a une crise en ce moment, on oublie tout ce qui a été fait. Or tout ça n’a pas disparu. Entre le Venezuela des années 1990 et d’aujourd’hui, indépendamment de la crise, il y a une grosse différence : l’éradication de l’analphabétisme, le renforcement des structures de démocratie locale, la construction d’ 1 800 000 logements en cinq ans, de 8 000 établissements de santé en seize ans, l’augmentation de 27 % de l’accès à l’éducation secondaire…
Ce n’est pas un hasard si l’offensive est aussi féroce. À l’époque, ils ont renversé Allende car ils étaient inquiets de la contagion pour l’Amérique latine mais aussi pour la France (avec l’Union de la gauche) et l’Italie. En ce qui concerne le chavisme, c’est pareil : pour casser son influence continentale, il faut en terminer avec lui.
La couverture médiatique et politique, avec les unes mensongères, les informations partielles ou truquées ont notamment montré que toute « la bonne volonté » dont Maduro pourrait faire preuve sur la scène internationale ne joue aucun rôle…
Mes honorables confrères ne font pas leur boulot. Ils ont décidé de dénoncer systématiquement la paille dans l’œil de Maduro tout en ignorant la poutre dans celui de l’opposition. Le journalisme est une profession extrêmement moutonnière. Bien peu de journalistes connaissent le Venezuela. Quand l’un d’entre eux, qui appartient presque systématiquement à la classe moyenne, arrive au Venezuela, il s’identifie avec elle. Elle se compose de gens « sympas », qui vivent dans des appartements décents, regardent les mêmes chaînes de télévision, voient les mêmes films, s’habillent comme nous… Vous allez les interviewer, ils vous offrent un whisky… Alors qu’une manifestation de chavistes, parfois ça paraît un peu brut de décoffrage. C’est vrai. Donc l’identification se fait tout naturellement. Et par-dessus le reste, aussi bien Chávez, Maduro, que les dirigeants chavistes, ne la jouent pas toujours dans la finesse ou la diplomatie…
Mais l’enjeu véritable, c’est ce qui se passe en ce moment au sein de l’Union européenne et de l’Organisation des États américains. Trump a décidé de sanctions économiques et l’Union européenne a fait de même le 13 novembre. L’OEA a investi le 13 octobre un Tribunal suprême de justice vénézuélien parallèle. On sera alors dans le début de la constitution d’un gouvernement en exil, susceptible d’appeler au secours, etc., avec tout ce que ça implique ensuite par rapport à la communauté internationale – le véritable enjeu.
Il ne faut pas oublier que sous le terme « communauté internationale », on entend l’UE et les États-Unis. Car le G77 + Chine, les pays non alignés, la Russie, l’Inde, la Chine, c’est-à-dire les trois quarts des pays présents à l’Assemblée générale des Nations-Unies, n’ont aucun problème avec le Venezuela ! En Amérique latine, le « groupe de Lima » (8)
 est effectivement en train de mettre la pression sur le Venezuela, mais celui-ci peut encore compter sur la Bolivie, Cuba, le Nicaragua, trois îles de la Caraïbes… Quant à l’Équateur, où Moreno est en train de rompre avec le corréisme, la question va se poser.
 
Quel type de sanctions peut-on attendre ?
 
Filiale de PDVSA, l‘entreprise vénézuélienne de raffinage et de distribution Citgo, implantée aux États-Unis, n’a plus le droit de rapatrier ses bénéfices. Autre exemple : 300 000 doses d’insuline ont été bloquées à l’étranger parce que la City Bank refusait d’opérer la transaction… Ce qui permet ensuite le discours humanitaro-mensonger : « Du fait de l’incurie du pouvoir, il n’y a plus de médicaments au Venezuela », alors que le gouvernement a finalement passé des accords pour acheter des médicaments en Inde… Mais cela revient évidemment plus cher que de les faire venir de Californie !
De son côté, le Département du Trésor américain menace toute entité économique ou bancaire ayant des relations de travail avec le gouvernement vénézuélien d’être elle-même victime de sanctions. C’est un véritable étranglement économique qui se met en place, auquel l’Union européenne s’est jointe…
Face à cela, Caracas commence à imaginer d’autres stratégies : pour échapper aux sanctions américaines, elle se tourne aujourd’hui vers le yuan et le rouble comme nouveau système de paiement international.
Passer au yuan et au rouble, établir des accords avec la Russie, la Turquie… Cela ne change pas les problèmes internes au pays, dans la chaîne de production, qui offrent de nombreuses prises à la déstabilisation.
Pour le moment, non, et ça laisse ouverte la question : le pouvoir doit-il se radicaliser ou non ? Chacun a son avis là-dessus. S’il se radicalise, la « communauté internationale » lui tombe dessus et accentue la pression. S’il ne se radicalise pas, il prend des coups mortels et se fait critiquer sur sa gauche. C’est un choix cornélien.
 
Comment verriez-vous une « sortie de crise » ?
 
Rationnellement, ce serait l’élection présidentielle de 2018, quel qu’en soit le résultat. Encore faudrait-il que les États-Unis et l’Union européenne cessent leur ingérence et leur appui inconditionnel à l’opposition.
Un retour de la droite et de l’extrême droite au pouvoir ne serait pas une sortie de crise pour les chavistes : ceux qui ont montré leur soutien au gouvernement vont être sévèrement réprimés ; il y aura des privatisations, des licenciements, des coupes drastiques dans les budgets de l’éducation, de la santé, du logement…
L’hypothèse que, dans le cadre d’élections démocratiques, le chavisme perde serait lourde de conséquences et de signification, mais l’histoire ne s’arrêterait pas là. Ce serait infiniment moins grave que si, dans un contexte de violence, l’opposition parvenait à renverser Maduro. D’un côté on aurait : « Une révolte de la population a renversé le chavisme » ; de l’autre : « Démocratiquement, le chavisme a perdu l’élection et a accepté la défaite ». Cela ne l’empêchera pas, après avoir analysé ses erreurs et ses faiblesses, de revenir ultérieurement.
D’ailleurs, compte tenu de l’absence de programme et de l’extrême division de la droite, rien ne permet de dire que le chavisme ne gagnera pas la présidentielle de 2018. La MUD a semé un tel chaos et s’est montré tellement incohérente qu’elle a perdu beaucoup de ses sympathisants.
 
Les fameux « flux et reflux » appliqués à la révolution bolivarienne ?
 
On parle souvent de cycle, mais le vice-président bolivien Álvaro García Linera évoque une vague, qui se retire et puis revient. C’est un peu ça. Sauf régime autoritaire, un courant politique peut difficilement rester en place pendant cinquante ans. Il y a une usure du pouvoir. La révolution bolivarienne a dix-huit ans… Même pour la base, aussi volontariste soit-elle, il est difficile d’être révolutionnaire 24 heures sur 24 pendant aussi longtemps…
 
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1. La classe moyenne vénézuélienne représente environ 15 % de la population.
2. Pour Emmanuel Macron, le régime du Venezuela est « une dictature »
3. Oil reserves
4. #EnVIVO @MariaCorinaYA: Aceptaremos una negociación verdadera solo para negociar la salida de Maduro del poder.
5. Contrôle des prix des aliments, hausse du salaire, impôt sur les grandes fortunes et affranchissement du dollar : Maduro poursuit l’offensive contre la guerre économique.
6. Pour plus de détails, voir :  La guerre économique pour les nuls (et les journalistes), Maurice Lemoine,  ainsi que Dólar Today distorsiona economía en Venezuela, confirma CEPAL (en espagnol).
7. Contrôle des prix des aliments, hausse du salaire, impôt sur les grandes fortunes et affranchissement du dollar : Maduro poursuit l’offensive contre la guerre économique.
8. Le groupe de Lima rassemble l’Argentine, le Brésil, le Canada, le Chili, la Colombie, le Costa Rica, le Guatemala, la Guyane, le Honduras, la Jamaïque, le Mexique, le Panama, le Paraguay, le Pérou , Sainte-Lucie et l’opposition vénézuélienne . Le Groupe a été fondé le 8 août 2017. NDLR.
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

 

 

 

 


FINKIELKRAUT, JOHNNY ET LES "SOUCHIENS"

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FINKIELKRAUT, JOHNNY ET LES


Une fois n'est pas coutume, je volerai au secours de Finkielkraut, qu'une meute de bien-pensants insulte, injurie, invective et vilipende pour avoir établi constat que seuls les "petits blancs" avaient rendu hommage à Johnny et que les "non-souchiens" n'étaient pas nombreux, voire inexistants dans la foule qui, accourue de tous les coins de la France profonde, s'était amassée pour participer à l'hommage "populaire" qui lui était rendu ou avait tenté de participer à celui semi-officiel, que lui rendit une gent politico-politicienne  mêlée au petit-monde et à l'entre-soi du show bizz.
Pauvre FINKEL, contraint de se défendre d’un côté de mauvaises pensées à l'encontre des "souchiens" et de ceux qui s'honorent de l'être ou de les défendre, et pire encore ou plus hypocritement, se voir reprocher de l’autre côté, une injure à l'encontre des "gens de la diversité".
Comme lui, j'ai pu voir, depuis les rives de mon île (la "plus proche des îles lointaines"), à travers le flot ininterrompu d'images déversées à satiété par les médias, que les "non -souchiens" (terme qui pour moi n'est pas une injure, d’autant que j’en relève), que les "non-souchiens", disais-je, étaient plutôt absents.
Cela ne m'avait ni choqué, ni étonné, ni scandalisé. Les dits "non -souchiens" ont parfaitement le droit de ne pas se mêler à la foule des fans et des groupies d’une idole de substitution.

Chacun a les héros qu’il mérite, qu'il revendique ou qu'on lui fabrique.
Avec Finkel en ces circonstances, et contrairement à l'attitude critique avec laquelle je le lis ou l'écoute ratiociner habituellement dans les lucarnes, je proclame avec lui que "je n'ai rien en moi de Johnny ».
J'ajoute que je comprends assez que les "petits-blancs" iconisent Johnny tandis que le peuple des cités et celui de la "diversité " ne se reconnaissent pas en lui.

u zinu




https://francais.rt.com/france/46436-rien-moi-johnny-alain-finkielkraut-precise-pensee-polemique-non-souchiens-petits-blancs

«Je n'ai rien en moi de Johnny»: Finkielkraut précise sa pensée sur la polémique des «non-souchiens»

«Je n'ai rien en moi de Johnny»: Finkielkraut précise sa pensée sur la polémique des «non-souchiens»
© JEAN-PIERRE CLATOT / AFP
Illustration : Alain Finkielkraut lors d'un débat
 
S'estimant «l'objet d'une vindicte invraisemblable» après avoir déploré que, selon lui, seuls les «petits blancs» aient rendu hommage à Johnny Hallyday, Alain Finkielkraut dit ne rien comprendre à la polémique, et précise le fond de sa pensée.
 
«Le petit peuple des petits blancs est descendu dans la rue pour dire adieu à Johnny. Il était nombreux et il était seul. Les non-souchiens [non-Français de souche] brillaient par leur absence» : reprise en boucle sur les réseaux sociaux, une phrase prononcée par Alain Finkielkraut au sujet de l'hommage à Johnny Hallyday a provoqué une vive polémique . Dans l'émission Les Grandes Gueules sur RMC ce 11 décembre, le philosophe est revenu sur la controverse.
 
«Je n'ai rien en moi de Johnny, et je ne m'insurgeais pas contre l'absence des banlieues et de la diversité à cette manifestation, je la constatais», a expliqué Alain Finkielkraut. «Cette tempête (que j'ai déclenchée), je n'y comprends rien», a-t-il encore déploré, se disant «l'objet d'une vindicte absolument invraisemblable».

Une expression popularisée par Houria Bouteldja

 
 
 
 
Le cortège funéraire de Johnny Hallyday, le 9 décembre
Répondant aux internautes choqués par son utilisation de l'expression «souchiens», en référence aux Français de souche, il a précisé : «[L'expression] n'est pas de moi, je reprenais avec ironie une parole de la leader des Indigènes de la République, Houria Bouteldja, qui parlait de souchiens pour désigner les Français de souche. Je ne suis pas moi-même quelqu'un de souchien.»
Abordant le fond de sa pensée, Alain Finkielkraut a poursuivi : «Mon constat, c'est que le divertissement règne mais ne fait pas lien. Il n'a pas la fonction sociale que certains voudraient lui assigner. Il y a le rock et le rap, ce qui enthousiasme les vieux et fédère les jeunes, ce en quoi se reconnaît la France périphérique et ce qu'apprécie la France des banlieues
 
 
 
 
Emmanuel Macron lors de son discours en hommage à Johnny Hallyday
«Quand je dis "le petit peuple blanc", je le dis sans aucun mépris. Je prends acte de ce fait : il y avait une certaine classe sociale qui était là – la classe des oubliés, de la France périphérique. Il y avait le show-biz, mais je regrette que l'on puisse en France faire lien avec le divertissement», a encore déclaré le membre de l'Académie française.
Il a enfin taclé la député LREM Aurore Bergé, qui avait comparé la ferveur pour Johnny Hallyday avec celle qui entourait Victor Hugo. «La comparaison avec Victor Hugo me paraît ridicule. Johnny remplace Victor Hugo mais n'a pas cette fonction sociale qu'on voudrait lui attribuer parce qu'il ne fait pas lien», a insisté Alain Finkielkraut.
 

PETIT FLORILÈGE DES AIMABLES PENSÉES DE LA FRANCE PROFONDE SUR LA CORSE

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PETIT FLORILÈGE DES AIMABLES PENSÉES DE LA FRANCE PROFONDE SUR LA CORSE
Un media "hexagonal" que je fréquente assidûment, pour ne pas dire quotidiennement, et qui accorde de bonne grâce hébergement aux petits papiers que je lui propose de temps à autre, publie un excellent article (signé Pichon-Constantini) relatif aux résultats des récentes élections en Corse. 
Cela vaut à ce dernier quelques commentaires qui traduisent le sentiment éprouvé par nombre de commentateurs français à l'égard, ou plutôt à l'encontre de notre île.
La louable tentative du rédacteur d'AGORAVOX lui a valu quelques "réponses" assez significatives de la perception  de la Corse et des Corses qu'ont certains honorables contributeurs que je suppose purs "souchiens"  de France.
Ne résistons pas au plaisir (mitigé) de transcrire ici leurs aimables propos.

P.S 1 : j'ai pris soin de corriger quelques petites erreurs orthographiques ou grammaticales de l'un ou l'autre des auteurs,  encore que ceux dont la prose est  retranscrite  ici ne soient pas les pires massacreurs de l'expression française. D'autres "forums", pour ne citer que celui d'Orange, offrent un aperçu largement plus édifiant de l'inadéquation existant souvent entre  une revendication  identitaire et  le respect de  la langue qui en constitue l'un des aspects. 

P.S 2 /


J'emprunte à un autre blogueur, qui voudra bien me le le pardonner, une image qu'il utilise pour illustrer un propos sur la Corse.  Au passage je recommande particulièrement ce blog, que je découvre au cours d'une pérégrination sur le net,  et que je m'empresse de faire figurer en  LIEN.
( http://merlerene.canalblog.com/archives/2017/10/15/35768849.html )



PETIT FLORILEGE : 


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Vivement que la tectonique des plaques nous débarrasse de ce boulet.
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Entre l’État centralisateur français et celui de l’Allemagne plus fédératif, il y a sans doute matière à inventer un concept républicain, sans dislocation du lien national,
Il ne faut pas oublier qu’après la seconde guerre mondiale, il a été décidé de créer une Allemagne fédérale pour l’affaiblir économiquement et politiquement. Seulement les allemands, courageux et travailleurs, ont transformé cette faiblesse en force. Pour cela ils ont laissé se développer certaines régions au détriment des autres. Et c’est comme cela que l’on se retrouve avec des régions riches comme la Bavière, la Rhénanie du Nord, le Bade Wurtemberg et des régions pauvres comme la Saxe, la Poméranie où les Frizes. Et des régions riches qui ne font absolument rien pour sortir les régions pauvres de leur misère.
Est-ce que dans ce grand puzzle régional que deviendrait une France fédérale, la Corse est prête à s’appauvrir encore plus (si c’est encore possible d’être plus pauvre que pauvre) sans que l’Île de France (devenue régionale) ou le Rhône ne lèvent le petit doigt ?
Alors une fois obtenu son autonomie, est-ce que la Corse est prête à se construire des éoliennes comme en Sardaigne pour s’assurer son indépendance énergétique ? Est-ce qu’elle est prête à se construire un port détaxé comme à Il Broli sur l’Île de Malte pour commercer en free taxe avec le reste de l’Europe ? Est-ce qu’elle est prête à s’installer des fermes à 1000 vaches et l’industrie alimentaire qui va avec ?
Parce que c’est gentil de vouloir l’indépendance comme un enfant veut un jouet à Noel. Accord faut-il savoir quoi en faire
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Le message Corse à la France est clair :
« Continuez à payer et laissez-nous dépenser comme bon nous semble »
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L’indépendance cela a un sens : c’est la rupture complète. La Corse n’a pas les moyens financiers, les ressources d’être indépendante sauf à une chute drastique du niveau de vie et tous les Corses clairvoyants le savent.
L’autonomie, qu’est-ce que ça veut dire si outre l’armée, la gendarmerie, la police et la justice demeurent aussi l’Éducation nationale et la Santé sous l’autorité de l’État comme pour tout département français ?
La notion de « résident corse », à savoir vivre sur l’île depuis au moins cinq ans pour avoir le droit de faire bâtir, est une mesure d’apartheid qui contredit non seulement le droit français et international mais d’une certaine façon les Droits de l’homme en instituant une inégalité entre personnes sur des base ethniques.
Une telle règle serait impossible à imposer dans le cadre de « l’autonomie », surtout que l’inverse, une impossibilité pour les Corses de s’installer sur le continent serait inacceptable pour eux.
Il resterait aux autonomistes la liberté de pratiquer une politique sociale avec l’argent des impôts « français », plus équitable que sur le continent. Mais est-ce bien leur intention première ?
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...accessoirement la plupart des mesures demandées par les autonomistes/indépendantistes sont contraires à la constitution.
Ce qui n’est pas un obstacle anodin.
De fait les Corses demandent, ni plus ni moins, la fin de la cinquième République.
Les Français, ces méchants colons, peuvent-ils donner leur avis ?
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La Corse est dans la même situation que le reste. Sur l’abstention, il faut être honnête :
si on me disait là maintenant de retourner voter aux régionales alors qu’on l’a déjà fait il y a 2 ans, je ne sais même pas si j’irais.
Il y a eu une majorité en 2015, elle est reconduite maintenant, que dire de plus ?
Nous sommes tous perplexes devant les partis politiques traditionnels, là il y a une alternative « autonomiste » locale et ça lui profite.
Maintenant, qu’est-ce qu’on fait ? Si c’est pour demander ad vitam aeternam des réparations post coloniales, je suis désolé de vous le dire, mais c’est le même discours que celui des indigènes de la Seine Saint-Denis.
Là aussi, la Corse est très française et pas très originale.
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Il est temps que la France reconnaisse le caractère colonial pour la Corse et qu’elle libère les Corses du STO sur le continent et les ramènent chez eux avec nos excuses, ensuite libérer la Corse de notre administration, des corps constitués, des militaires, de la police, enfin tout ce qui représente la France.
Ainsi ils pourront s’installer chez eux et vivre sans aucune contrainte !
 
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« Concernant les pouvoirs régaliens, il a même ajouté que l’enseignement et la santé devaient rester du ressort de l’État »
Sont malins les barons de la politique corses...
Tout ce qui nécessite des grosses dépenses et est source d’emmerdements ils le laissent à l’État.
L’autonomie ça n’existe pas dans la constitution.
Donc si les Corses veulent l’indépendance et qu’un referendum leur donne la majorité,  eh bien bon vent.

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Les Corses sont des parasites..comme leur emblème Naboléon... !

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ou encore   ( commentaires tirés d'un autre article) :


Moi je voudrais bien que la Corse soit un pays étranger traité comme tel, et au départ non européen. Après tout les visas on sait faire. Cela m’économiserait des impôts.

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Il faut leur donner leur indépendance et ne plus y aller passer des vacances. On rigolera bien !! Surtout qu’une fois indépendants, les alliés d’hier deviendront les ennemis de demain. Ils vont se foutre sur la gueule et la « vendetta » reprendra de plus belle. Donnez leur donc leur indépendance, mais sans aide aucune. Idem pour les Basques qui, à part eux, ne voient personne leur arriver à la cheville « Nous les Basques... » quand ils ont dit ça, tout est dit !


 

A propos du conflit syrien : Les Vainqueurs et les Vaincus

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Remarquable « résumé » du conflit syrien (si l’on ose dire, vu le contenu exhaustif et la densité du texte offert à notre lecture).

Outre une excellente rétrospective du déroulement de ce conflit, l’auteur ne manque pas de rappeler l’identité de ses commanditaires « extérieurs », de même qu’il n’omet pas de nous remettre en mémoire la formidable campagne de désinformation partisane menée par les médias mainstream et les organes officiels de l’ère Hollande-Fabius. À dire vrai, de ce point de vue, l’ère Macron se situe dans une certaine continuité.

u zinu






 

La Syrie : les Vainqueurs et les Vaincus


par Pierre
vendredi 29 décembre 2017
in

AGORAVOX


 

Il y a à peine un an, pas beaucoup de monde ne se serait aventuré à dire que Bachar al-Assad et l’Armée arabe syrienne (AAS) avaient une chance de gagner la guerre contre les rebelles, les combattants étrangers ou les terroristes. Appelons-les comme on veut, il s’agissait de plus d'une centaine de milliers d’hommes en armes souvent sophistiquées et avec de puissants soutiens arabes, turcs et occidentaux.

Tout au plus, le pouvoir syrien pouvait espérer négocier une paix et un partage du pouvoir en position de force.

Que s’est-il passé pour qu’aujourd’hui, cette Armée arabe syrienne vole de victoire en victoire ?

 


La Syrie : un pays à reconstruire.

Les rivalités des adversaires entre eux.

C’est certainement un des deux éléments les plus importants qui a permis l’actuelle série de victoires du gouvernement syrien.  L’AAS a résisté aux deux coups de butoir contre Alep et contre Damas en 2012. Cela a permis à l’État syrien de survivre, de voir l’opposition montrer son manque d’unité et de dévoiler ses côtés extrémistes et criminels voire terroristes pour certains groupes.

On peut distinguer cinq groupes armés principaux qui ont ou qui avaient des objectifs et des soutiens étrangers concurrents.

  • Jabhat al-Nosra s'est rebaptisé Jabhat Fatah al-Cham en 2016 pour faire oublier son allégeance à Al-Qaïda. C’est un groupe wahhabite qui a bénéficié de l'aide de princes saoudiens et d’autres émirs du Golfe. Il faudra un jour déterminer de quel niveau de pouvoir venait cette aide. Le pouvoir en Arabie saoudite est une nébuleuse de clans dans laquelle les princes pouvaient engager les deniers de l’État ou leurs avoirs mafieux avec l’accord tacite du roi. Il est certain que Jabhat al-Nosra a reçu de l’armement des monarchies du Golfe et que les pays occidentaux ont au minimum fermé les yeux. Ce groupe était au départ majoritairement composé de combattants irakiens sunnites et il avait pour but de prendre le pouvoir en Syrie pour y former un califat. Il a rallié de nombreux autres groupes de combattants syriens autour de lui.
  • Ahrar al-Cham est un groupe révolutionnaire islamiste idéologiquement lié aux Frères musulmans. Il est surtout présent dans le nord et le centre de la Syrie. Il avait le soutien de la Turquie et du Qatar qui l’approvisionnaient en armes. Du fait de sa proximité frériste, ce groupe est combattu par l’Arabie saoudite et est continuellement en conflit avec Jabhat Fatah al-Cham. Son but est d’arriver au pouvoir pour y installer une constitution islamique basée sur la Charia. Ahrar al-Cham a rallié autour de lui des dizaines d’autres groupes armés qui représentent ensemble environ 25.000 combattants. Ce groupe a un relatif soutien populaire grâce à un réseau de distribution d'aides à la population.
  • L’État islamique ou État islamique d’Irak et au Levant, ISIS en anglais et DAECH en arabe est apparu dans l’est de la Syrie en 2013. C’est un groupe lourdement armé originaire d'Irak qui a acquis un impressionnant matériel de guerre en s’emparant de Mossoul et des provinces sunnites d’Irak en 2014. Ce groupe a une idéologie proche de celle de l’Arabie saoudite et on pense que celle-ci l’a aidé à ses débuts. Il est formé de combattants expérimentés d’Al-Qaïda encadrés d’anciens officiers irakiens baasistes qui se sont rencontrés dans les prisons irakiennes après 2003. En passant la frontière syrienne et en étendant sa vision djihadiste à l’Afrique et à l’Asie, l’État islamique est devenu un danger planétaire que les États-Unis n'ont d'abord que mollement combattu en Syrie [i] dans l’espoir d’affaiblir le pouvoir du président syrien. C’est sans doute un mauvais calcul qui se retournera contre eux. Le premier objectif de l’État islamique était de former un proto-État à cheval sur les régions sunnites d’Irak et de Syrie sous le commandement du calife Abou Bakr al-Baghdadi. L’Arabie saoudite a alors compris le danger que représente cette organisation et a cessé de la soutenir. L’État islamique représente une concurrence qui pourrait un jour revendiquer des droits sur les lieux saints de l’islam. Il est difficile d’estimer le nombre de combattants actuels. Au plus fort de son extension, il devait y avoir entre 50.000 et 125.000 hommes en Syrie et en Irak, principalement sunnites irakiens mais aussi européens, tchétchènes, ouigours, tunisiens etc. Il est aussi à noter que l’EI ne correspond pas au dessein des États-Unis et d'Israël qui consiste à voir la région se morceler en une multitude de petits États de faible influence. 
  • L’Armée syrienne libre (ASL) est d’abord composée d’officiers et de soldats déserteurs à partir de 2011. Elle a reçu un soutien, quoique clandestin, des pays occidentaux dont notamment un transfert massif d’armes de Libye organisé par la CIA. C’était au départ une armée non confessionnelle qui s’est en grande partie délitée avec le départ de nombreux groupes avec armes et bagages vers les islamistes plus radicaux. Le Pentagone a essayé de les former et de les contrôler mais ce fut en vain. Une fois armés et prêts au combat, la plupart de ces hommes ont rejoint les groupes islamistes. L’ASL est encore existante dans le sud de la Syrie, autour de la ville de Deera. Cette armée reçoit un soutien logistique israélien et est entourée de conseillers occidentaux et israéliens. Vu les nombreuses défections, il est difficile d’estimer le nombre de combattants. Peut-être entre 5.000 et 6.000.
  • Les FDS qui regroupent des miliciens arabes et des milices kurdes syriennes (YPG) sont actuellement la principale force armée soutenue par les États-Unis au grand dam d’ailleurs de la Turquie. En 2011, les Kurdes n’étaient pas hostiles au pouvoir en Syrie. C’est l’arrivée des islamistes dans leur région qui les a fait prendre les armes et petit à petit, ils ont formé un groupe de combattants assez efficaces. Ils semblent instrumentalisés par le Pentagone pour constituer un État dans le nord de la Syrie où les États-Unis pourraient établir des bases militaires permanentes. Il faudra voir, une fois l’État islamique vaincu, si les États-Unis seront prêt enfreindre le droit international et à aller à la confrontation avec la Syrie pour accomplir leur dessein.

    Les Kurdes syrien ont trois gros obstacles pour obtenir une indépendance.
  • Un éventuel État Kurde en Syrie serait entouré de pays hostiles à son indépendance ; la Turquie, l’Irak, l'Iran et la Syrie. Comment dans ce cas assurer la survie de ce pays qui n’a pas de richesses sur son territoire ?
  • Le PYD (civil), l’YPG (militaire) et son parti frère, le PKK de Turquie, sont des partis kurdes néo-marxistes. Comment concilier cela avec l’idéologie conservatrice-libérale des États-Unis ?
  • Les Kurdes n'ont aucun droit historique sur les territoires syriens qu'ils contrôlent. À l'origine, le peuple kurde était un peuple nomade qui ne s'est progressivement sédentarisé que depuis un siècle. Il n'était majoritaire que sur une infime petite partie du nord de la Syrie.

La particularité de cette guerre, c’est que tous ces groupes se battent entre eux que ce soit pour s’approprier des territoires, des armes ou pour des raisons idéologiques ou d’alliance. Il n’est souhaitable pour personne de voir un groupe islamiste l’emporter et installer la loi islamique à Damas.

Il faut signaler au passage que toutes ces milices perçoivent des soldes. Si l’État islamique disposait aussi d’argent grâce aux trafics de pétrole et d’antiquités, les autres milices sont rétribuées avec des fonds d’origines inconnues mais on peut imaginer qu’il y a de riches donateurs du côté du Golfe.

Il y a au moins une centaine de milices d’insurgés qui s’allient ou se regroupent selon les opportunités avec d’autres groupes plus puissants. Elles ont souvent une implantation locale et elles font allégeance à l’armée la plus forte pour ne pas avoir à subir de représailles. Il sera intéressant de voir ce qui arrivera quand les milices islamistes les plus radicales seront éradiquées.


Carte de Syrie en octobre 2017. En rouge, zone tenue par l'AAS. En jaune, par les FDS (Kurdes). En bleu, des territoires non-contrôlés. Les zones grises ont depuis été prises par l'AAS et les FDS.

 

L’entrée en scène de la Russie et de l’Iran.

 

La concertation de la Russie avec l’Iran et leur coordination pour épauler l’Armée arabe syrienne est l’autre élément déterminant qui a permis de reconquérir une grande partie des territoires syriens perdus. 

Les détails d’une intervention ont été mis au point lors des visites de Qassem Soleimani, le général-commandant de la Force Al-Qods iranienne, à Moscou en été 2015.

La modernisation et le renouvellement de l’équipement lourd, la mise à niveau des forces aériennes, la formation de nouvelles unités de combat, le contrôle du ciel syrien et un nouveau schéma tactique ont permis les succès actuels de l’AAS. 

Des unités du Hezbollah libanais, de la Force Al-Qods iranienne, des milices pro-gouvernementales et des volontaires chiites étrangers apportent les renforts en hommes qui faisaient si cruellement défaut aux forces loyalistes.

Il est à noter que le coût de l’intervention russe en Syrie est insignifiant et qu’il est presque totalement pris en charge par le budget ordinaire de la Défense. 

En plus des avantages géopolitiques qui marquent le retour de la Russie au Moyen-Orient, l’Armée russe a renforcé sa présence militaire dans la région et elle y dispose à présent de deux bases permanentes. Elle a eu l’occasion de tester avec succès ses armes de dernière génération sur le champ de bataille. Cela booste aussi les exportations de l’industrie de la défense au grand bénéfice de l’économie russe.


L'aviation russe en action.

 

La lassitude et l’usure.

 

Le peuple syrien est las de ce conflit. Les autres belligérants aussi parce qu'ils ne voient aucune victoire militaire possible.

L'Arabie saoudite commence à ressentir le coût de cette guerre alors qu’elle est aussi en conflit sur d’autres fronts et que ses revenus pétroliers sont en forte baisse. 

Connaissant leur versatilité, les États-Unis hésitent à fournir de l’armement sophistiqué aux rebelles et ils ne veulent en aucun cas engager des troupes de combat au sol.[ii] Les souvenirs douloureux d’Irak et d’Afghanistan sont encore trop proches.

Après avoir repoussé les principaux groupes rebelles dans la province d'Idlib où ils s’entre-déchirent pour le moment et après avoir cantonné les autres dans des poches assiégées, l’AAS a entamé avec succès la libération de l’est du pays des griffes de l’État islamique. Une fois la jonction avec l’Armée irakienne consolidée, une liaison routière entre les deux pays sera rétablie. 

L’importance de cette jonction n’a pas encore été bien évaluée par les analystes. Elle va permettre un flux continu sans obstacles de renforts, d’armes et d’approvisionnement depuis l’Iran.

L’étape suivante pourrait être la sécurisation du sud du pays autour de Deera, la réduction des poches rebelles dans la Goutha ou la sécurisation du nord du pays avec une offensive vers l’aéroport d’Abou Douhour près d’Idlib actuellement tenu par Hayat Tahir al-Cham, une coalition dominée par Jabhat Fatah al-Cham (Al Qaïda).

La reprise de la rive droite de l'Euphrate est beaucoup plus problématique du fait de la présence de l'Armée américaine. Cela fera sans doute partie des négociations finales mais il y a une divergence à ce sujet entre d'un côté, les gouvernements syrien et iranien et de l'autre la Russie qui elle veut éviter une confrontation militaire (pour le moment) avec les États-Unis. 

Excepté pour les FDS, les approvisionnements des rebelles en armes et munitions se sont taris. Je n’arrive pas à savoir si les soldes sont encore partout payées. Il faut savoir que l’argent a été la principale motivation de l’engagement des rebelles syriens. Les motifs idéologiques ont toujours été secondaires exceptés pour une minorité de fanatiques. L’argent des trafics, des enlèvements contre rançon [iii] et du racket ont été le nerf de la guerre depuis plus de six ans.

Cette situation va immanquablement déboucher sur un ralliement de la plupart des petits groupes rebelles au gouvernement syrien grâce à la médiation russe et elle verra le retour à la vie civile de la plupart de ceux qui ont pris les armes.


Les FDS près de Raqqa.

 

Les vaincus.

 

« Vae victis » [iv] pour les rebelles. Ils payeront le prix fort pour avoir cru les promesses de leurs sponsors.

Les guerres civiles ont de tous temps été les plus cruelles et celle-ci ne fera pas exception.  On peut imaginer le sort des partisans du président Assad si les islamistes l’avaient emporté alors ne soyons pas sensibles quant à leur sort, il sera bien moins cruel.

Beaucoup de ces rebelles qui survivront, les plus fanatiques et ceux qui ont commis des crimes, n’auront d’autre choix que de s’exiler avec leur famille s’ils ne sont pas exécutés avant. Ce sera une charge pour les pays limitrophes et pour les pays de l’Union européenne qui ont soutenu cette guerre. Les États-Unis ne seront pas concernés vu qu’ils ont fermé leurs frontières aux ressortissants des pays arabes concernés.

On peut distinguer trois groupes de perdants. Les groupes rebelles/terroristes, les États qui les ont soutenus et les réfugiés syriens.

 

  • Parmi les groupes rebelles, l'État islamique aura réussi à faire l’unanimité contre lui et il ne survira sans doute pas dans sa forme actuelle à sa récente défaite militaire.


Combattants de l'Etat islamique.

  • Les groupes liés à Al Qaïda et aux Frères musulmans auront difficile à survivre dans la Syrie du futur sans le soutien des monarchies du Golfe, de la Turquie et du Qatar.
  • Le CNS, la branche civile de l'ASL, devra affronter l'épreuve des urnes et comme elle n'a pas d'assise locale, elle sera balayée par l'opposition non révolutionnaire (CNCD) qui a soutenu un processus pacifique de changement de régime.
  • Les mouvements autonomistes et indépendantistes kurdes sont dépendants de l'aide militaire étasunienne. Il est difficile de prévoir les décisions de l'administration Trump toute partagée qu'elle est entre son désir de nuire à la Syrie, à la Russie et à l'Iran et son impératif besoin de ne pas perdre son allié turc. Les Kurdes syriens peuvent difficilement espérer une indépendance qu'ils ne demandent d'ailleurs pas en Syrie. Ils peuvent tout au plus obtenir une autonomie culturelle.
  • À force de jouer des doubles jeux, les États-Unis perdront sur tous les fronts au Moyen-Orient. Sauf à se lancer dans un engagement militaire massif et à risquer une confrontation directe avec la Russie et avec l'Iran, les États-Unis n'auront d'autre choix que de se retirer de Syrie pour limiter leur perte d'influence. Il est à noter que le conflit interne entre le président Trump et l'establishment déforce la position des États-Unis et qu'il est impossible de prédire ce qui arriverait en cas de destitution (peu probable) du président Trump.
  • Monarchie du Golfe auront dépensé des milliards de dollars en pure perte. Le Qatar est en échec aussi bien en Libye et en Égypte qu'en Syrie. Sa politique de soutien aux Frères musulmans s'est en plus attiré les foudres de l'Arabie saoudite, de l’Égypte et des monarchies sunnites du Golfe.
  • La désastreuse politique saoudienne avait été initiée par feu le roi Abdallah pour étendre l'influence saoudienne sur l'ensemble du monde arabo-sunnite et pour affaiblir le rôle de l'Iran dans la région. Mohammed ben Salman (MBS), l'actuel homme fort du pays, semble faire porter la responsabilité de cet échec au proche entourage de l'ancien roi. MBS doit maintenant gérer un pays dont les revenus ont été largement réduits tout en maintenant la pression sur l'Iran.
  • L'Union européenne et la France en particulier auront fait fausse route depuis le début de la crise syrienne. En exigeant le départ de Bachar al Assad avant toute négociation avec le CNS, l'UE et la France auront raté l'occasion d'avoir une quelconque influence dans la région dans le futur. Il faudra retenir la parfaite transparence de Madame Mogherini et l'absence de la présidence européenne représentée par Monsieur Tusk. On est en droit de se demander quelle est l'utilité de ces fonctions. Même si la France avait fermé son ambassade à Damas sous la présidence de Nicolas Sarkozy, la présidence de François Hollande aura été marquée par une profonde hostilité au régime laïc syrien qui ne voulait pas rompre avec l'Iran et le Hezbollah. Le passage de Laurent Fabius au Ministère des Affaires étrangères aura été un des plus désastreux de l'histoire de France. Les médias « mainstream » et les experts de plateaux de télévision auront manqué à leur devoir de neutralité de l'information en s’alignant sur la ligne politique du gouvernement. [v]
  • Israël peut être considéré comme perdant parce que les groupes rebelles qu'il a soutenus ont été militairement défaits par l'AAS et que ses objectifs politiques n'ont pas été atteints. De son côté, le Hesbollah s'est renforcé et a acquis de l'expérience au combat, l'Iran est tout près de la frontière israélienne et la Russie contrôle le ciel syrien. D'un autre côté, il y a un rapprochement avec les dirigeants arabes sunnites contre l'Iran.
  • Les réfugies syriens font partie des grands perdants. Ceux qui ont fui les islamistes ne trouveront bien souvent que des ruines à leur retour.
  • Les réfugiés islamistes syriens et leurs familles ne pourront pas se réinsérer dans une Syrie pluraliste et leur sort est un vrai casse-tête international.
  • Le sort des brigades djihadistes internationales est encore un plus grand casse-tête. Le mot d'ordre a été de les éliminer sur place mais quid de ceux qui rentreront quand-même au pays. Des rumeurs accusent les États-Unis de renforcer les FDS avec des daechistes récupérés et de transférer des autres en Afghanistan. Une affaire à suivre de près.
  • Il y a enfin le sort des centaines de milliers de jeunes syriens qui ont fui leur pays pour éviter leurs obligations militaires. Il s'agit principalement de fils de familles aisées sunnites dont le voyage a été payé par la famille. On les a vus forcer les postes frontières européens en 2015. Ce sont en grande majorité des hommes éduqués qui s'intégreront sans trop de problèmes en Europe. Leur absence se fera sentir quand il s'agira de reconstruire la Syrie mais, sauf à d'obtenir un pardon magnanime, leur retour sera difficile.


Le jeune émir du Qatar.

 

Les vainqueurs.

 

  • L'Armée arabe syrienne et ses forces d'élite sont les vainqueurs sur le champ de bataille. Si ce n'est le successeur de Bachar al-Assad, ce sera sûrement parmi ses généraux qu'on trouvera les futurs dirigeants syriens.


Souheil al-Hassan. Un des généraux les plus populaires en Syrie.

  • L'Iran était infréquentable au début de cette guerre en 2011 et il est maintenant un interlocuteur incontournable.
  • Il en est de même pour le Hezbollah. Il a acquis le respect des Libanais qui ne veulent pas d'une nouvelle guerre civile au bénéfice de puissances étrangères.
  • Il va sans dire que la Russie de Vladimir Poutine qui elle aussi comptait pour quantité négligeable en 2011 est redevenue un acteur de poids dans le landernau des puissances mondiales.
  • Le peuple syrien aura résisté à un complot international qui voulait le voir tomber sous la férule de fanatiques islamistes. Il devra reconstruire le pays en se passant sans doute des aides occidentales mais recouvrer sa souveraineté n'a pas de prix.


La conférence d'Astana : une victoire politique de la Russie à confirmer.

Il est actuellement difficile placer la Turquie dans le camp des gagnants ou des perdants. Son rapprochement avec la Russie lui permettra sans doute de tirer son épingle du jeu ou de limiter les pertes mais elle n'aura pas obtenu beaucoup d'avantages en s'engageant dans cette guerre. [vi] Il ne faut jamais oublier que la principale menace pour son intégrité vient de sa minorité kurde que ses ennemis peuvent à tout moment militairement soutenir.

Deux autres pays limitrophes, le Liban et la Jordanie, n'ont finalement pas été déstabilisés malgré les millions de réfugiés syriens qu'ils ont dû accueillir.

L'Irak, un autre voisin de la Syrie, a aussi vaincu DAECH. La plus importante zone du pays, le sud chiite, n'a pas été touchée par la guerre. L'Irak a les moyens de recouvrer sa totale indépendance et de se libérer de la tutelle étasunienne.

 

 

Conclusion.

 

Depuis 75 ans, les conditions pour gagner une guerre n’ont pas changé. Il faut une suprématie aérienne et des troupes combattantes au sol.

Seules les forces loyalistes et leurs alliés répondaient à ces deux critères. La suprématie aérienne était assurée par la Russie et les troupes combattantes, principalement des unités d’élite renforcées par le redoutable Hezbollah libanais ainsi que par des unités iraniennes, ont pu être déployées massivement dans l’ensemble du pays avec un parc de blindés modernisés. L'AAS a aussi pu compter sur l'aide des experts militaires iraniens et russes.

La Russie avait un objectif stratégique cohérent, la lutte contre le terrorisme islamique, le soutien à un gouvernement légal et la souveraineté du peuple, et elle n’a pas varié dans sa position. 

Le résultat est un retour des influences russe et iranienne au Moyen-Orient. [vii]

Cette guerre est une première lourde défaite pour les puissances occidentales, celles qui se sont auto-proclamées « la communauté internationale » depuis la fin de l'URSS.

Avec le recul, nous verrons aussi que ce conflit marquera la naissance d'un monde multipolaire dans lequel le bloc occidental aura un adversaire face à lui.

La guerre peut encore durer des années mais les vainqueurs sont connus.

Connaissant le réalisme de Vladimir Poutine, il laissera une porte de sortie honorable aux perdants pour qu'ils ne perdent pas la face mais lui et ses alliés sont les incontestables gagnants de cette partie de géostratégie et il faut espérer que les Occidentaux retiendront la leçon et qu'ils hésiteront dorénavant à encore se lancer dans une pareille expérience de déstabilisation d'un pays souverain.

Les historiens devront se souvenir de l'étonnante déclaration de Roland Dumas en 2011 avant de faire porter la responsabilité du conflit sur les épaules de Bachar al Assad et de maintenir le mythe d'un peuple opprimé qui se serait spontanément soulevé contre un régime honni.


Plus récemment, il y a aussi le document de la BBC avec les révélations de l'ancien Premier ministre qatari Hamad bin Jassen al-Thani qui admet qu'il y a eu des interventions étrangères dès le début de la crise.


Pour terminer, il faut en finir avec le mythe du retrait du président Assad pour des raisons morales. Sa légitimité ne peut être remise en cause que par le peuple souverain lors d'élections équitables. L'ONU peut éventuellement les superviser pour garantir l'intégrité du processus électoral. Dans les circonstances actuelles, Bachar al-Assad a toutes les chances de largement l'emporter ce qui délégitimerait les rebelles armés et porterait à faux tous les pays qui les ont soutenus. C'est pour remédier à cela que les Occidentaux demandent le retrait du président Assad ou sa non-présentation aux prochaines élections. Les raisons morales évoquées ne sont que des arguties servant à éviter une lourde déconvenue lorsque le peuple souverain se sera exprimé.

 

 

[i] Ce n'est que quand l'AAS et ses alliés ont victorieusement avancé vers l'est que les États-Unis et leurs alliés ont sérieusement combattu l'État islamique en Syrie au prix de la destruction quasi totale de Raqqa.

[ii] Les forces actuellement engagées en Syrie sont des unités d'élite qui ont une mission de formation et d'appui aux FDS.

[iii] Il n’y a pas de correspondants occidentaux en zones rebelles pour cette raison. Les analyses des médias occidentaux se basent sur des informations de correspondants locaux dont on ne connaît pas les sympathies et elles sont de ce fait peu fiables.

[iv] « Malheur aux vaincus. »

[v] En répétant à l'envi que Bachar tue son propre peuple, on peut légitimement se demander combien de vocations de djihadistes ce discours a suscité. Lors d'une guerre civile, tous les protagonistes tuent leurs compatriotes et insister sur les morts d'un camp, c'est prendre parti pour l'autre. D'après des estimations récentes, le nombre de victimes est assez partagé. Ce n'est que depuis peu que le pourcentage de morts rebelles a fortement augmenté.

[vi] Le transfert sans doute durable de nombreuses entreprises de la banlieue d'Alep avec leurs dirigeants et leur personnel vers la Turquie est par exemple un gain turc.

[vii] Il est loin le temps où les médias occidentaux et français en particulier affirmaient sur un ton péremptoire que la Russie n’avait pas les moyens de se mesurer aux Occidentaux et que pour des raisons économiques, elle devra tôt ou tard baisser pavillon. Le sommet du G8 de Belfast en 2013 est encore dans toutes les mémoires. Vladimir Poutine avait résisté à la pression des sept autres membres et il n'avait pas cédé sur son soutien à la Syrie.

 


Selon Charlie Hebdo, l'assassin court toujours. Mais qui est l'assassin ?

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Selon Charlie Hebdo, l'assassin court toujours. Mais qui est l'assassin ?
                      • Essai d’exégèse :
                         
                        Le triangle équilatéral contenant l’œil « divin » est simplement un symbole (élémentaire d’un certain point de vue, majeur d’un autre point de vue) de la maçonnerie théiste, couramment appelé Delta lumineux.
                        Faut-il en conclure que RISS reprend ici la théorie du « complot judéo-maçonnique » qui fit florès voici quelques décades ?
                        En dehors de cette figure insolite, RISS nous donne à voir un personnage barbu, certes, mais chenu comme un Dieu biblique ou un Dieu-le-Père chrétien ....... nanti d’une kalach.
                        Il impliquerait donc les trois religions monothéistes, puisque les fondamentalistes adeptes de la dernière née semblent avoir fait de cet instrument une arme remplaçant volontiers le sabre traditionnel.
                        Traduction simple ( ou simpliste) : les religions « assassines » courent toujours, ou pire : les religions sont assassines par principe.
                        Dernière interprétation (aussi farfelue que « conspirationniste », et qui nous conduirait au dollar américain) : comme pour le 11 septembre, derrière les exécutants cherchez les commanditaires.
                        En définitive, une caricature souffre précisément de sa surcharge symbolique, car l'interprétation  d'un symbole est par essence une affaire personnelle. Chacun y voit (notamment) ce que ses facultés intellectuelles, son imagination, son affectivité, son vécu personnel, son idéologie "ordinaire" lui donnent à lire ou à comprendre.



LA CORSE ... vue de là-bas

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 LA CORSE ... vue de là-bas


Le site HERODOTE propose une Histoire de la Corse qui permet d'avoir "en un clic"  une vision, sinon exhaustive, du moins assez  complète  et  objective d'une île  "au passé tourmenté "devenue française en 1769.
Faisant abstraction de  son aspect de vulgarisation, nous reproduisons "in extenso" cet article en le recommandant aux lecteurs qui désirent connaître la Corse autrement que par les  résumés, "analyses"  et commentaires  des organes médiatiques dominants.
Il inscrit en effet la Corse dans un contexte géopolitique historique qui rappelle opportunément que cette île a toujours suscité la convoitise des puissances du moment.
Pour nous en tenir  aux impérialismes qui ont succédé à la domination  multi-séculaire de Rome , rappelons que Pise, Gênes, Aragon, puis l'Angleterre et la France  n'ont pas manquer de s'y implanter (ou de tenter de le faire).


 
https://www.herodote.net/
 

Corse

Une île aussi tourmentée que belle

 

Pauvre et lointaine, la Corse a longtemps été tenue en marge de la France, à laquelle elle n'a pas moins donné le plus illustre de ses représentants en la personne de Napoléon. Au XIXe siècle, elle était surtout connue pour abriter de farouches bandits d'honneur. Prosper Mérimée leur donne leurs lettres de noblesse avec ses nouvelles Colomba et Mateo Falcone.

En 1975, une fusillade meurtrière  dans la plaine d'Aléria inaugure une longue période de crise. L'île aujourd'hui apaisée redécouvre avec sérénité sa longue Histoire, aussi belle que ses paysages.

Des débuts agités

Menhir sculpté à Palaghju (Corse du sud)Comparable en superficie (8 600 km2) à Chypre et à la Crète, la Corse a une population de seulement 300 000 habitants mais l'on estime à 5 millions les descendants des émigrés sur le continent et dans le monde.

La présence humaine remonte à dix millénaires environ. Au néolithique  tardif (3000 à 1800 av. J.-C.), une intéressante civilisation s'épanouit au sud de l'île, , autour du site de Filitosa. Elle nous a légué de nombreux vestiges, plus de 600 menhirs, dont beaucoup sont sculptés, et plusieurs dizaines de dolmens.

Connue des Grecs sous le nom de Kyrnos, la Corse fait d'abord l'objet d'une colonisation par les Phocéens, ceux-là mêmes qui ont fondé Massilia (aujourd'hui Marseille) sur le continent. Ils fondent dans la plaine orientale la cité d'Alalia (aujourd'hui Aléria).

L'île passe sous la tutelle de Carthage avant que les Romains ne s'en emparent à l'issue de la première guerre punique. En 231 av. J.-C., réunie à la Sardaigne, elle constitue la deuxième province romaine après la Sicile. 

Défrichée et assainie, la plaine orientale d'Aléria devient alors l'un des greniers à blé de Rome. En 105 av. J.-C. est fondée une nouvelle capitale au nord de la plaine d'Aléria : Mariana, ainsi dénommée en l'honneur du général Marius.

L'ère pisane

La Corse (document : Alain Houot, pour Herodote.net)

Aux premiers siècles du Moyen Âge, l'insécurité s'installe et les côtes sont écumées par les pirates sarrasins tant et si bien que la population commence à se replier vers les montagnes de l'intérieur. Désertée, la plaine orientale retourne aux marécages et à la malaria.

L'île devient en théorie un territoire pontifical en vertu d'une donation faite en 754 au pape Étienne II par le roi des Francs, Pépin le Bref, et confirmée par son fils Charlemagne, en 794, au pape Adrien 1er.

En 1078, le pape Grégoire VII  confie la gestion de l'île à l'archevêque de Pise.

Le pape Urbain II précise les modalités de cette gestion par une bulle en 1091. C'est ainsi que la Corse va vivre pendant deux siècles dans une certaine autonomie, sous la souveraineté théorique de Pise.

De cette période, les chroniques gardent le souvenir quelque peu idéalisé d'une société de pasteurs et de paysans relativement prospère.

Missionnés par le pape, les seigneurs pisans détruisent les repaires de pirates musulmans établis sur les côtes. Mais les incursions venues de la côte nord-africaine ne vont pour ainsi dire jamais cesser jusqu'au XVIIIe siècle.

Le drapeau de la Corse, emblème officiel de l'île depuis 1762, en perpétue le souvenir avec le profil d'un prisonnier maure ou barbaresque  aux yeux bandés.

Chapelle de la Trinité à Aregu (Balagne corse), en style pisan, XIIe siècle  (photo : Fabienne Larané)

L'ère génoise

Suite à une bataille navale  qui met aux prises Génois et Pisans le 6 août 1284, près de l'île de La Méloria, au large de Livourne, le destin de la Corse va basculer.

Au terme d'une longue période de désordres, elle passe sous l'autorité effective de la République de Gênes. Elle est alors divisée en deux régions administratives séparées par la chaîne montagneuse centrale : l'En-Deçà-des-Monts (capitales : Bastia et Calvi) et l'Au-Delà-des-Monts (capitale : Ajaccio).

Ces régions recoupent les limites des départements institués par la Révolution en 1793, le Golo et le Liamone, ainsi que des départements institués par la Ve République en 1976 : la Haute-Corse et la Corse du Sud. Elles sont elles-mêmes subdivisées en 90 pièvi (ou piéves), l'équivalent des cantons actuels ; chaque pièva correspond à peu près à une vallée.

Rebutés par le caractère rebelle des habitants, les Génois s'abstiennent de pénétrer dans l'intérieur et se cantonnent dans les villes côtières, Bastia, Ajaccio, Porto-Vecchio... Ils tiennent au nord-ouest la citadelle de Calvi, qu'ils ont fondée en 1268.

Conséquence de leur résistance à l'oppression génoise, les communautés rurales de l'En-Deçà-des-Monts forgent une démocratie locale assez ressemblante à celle des cantons suisses.

Notons que, dans ces communautés, les femmes participent aux débats publics. Le droit de vote leur sera confirmé par la Constitution d'Orezza, en 1735.

La « Guerre de quarante ans »

La Corse innove avec la première guerre d'indépendance des Temps modernes. Elle va durer quarante ans et finalement conduire à une autre forme de domination...

Tout commence par une émeute fiscale en 1729. L'année suivante, Bastia est mise à sac. Gênes appelle à l'aide les troupes de l'empereur Charles VI de Habsbourg. Mais les insurgés coordonnent leurs actions et, le 30 janvier 1735, proclament unilatéralement leur indépendance  sous l'impulsion de Giacomo Paoli. C'est une première dans l'Histoire moderne.

La cathédrale et le vieux port de Bastia (photo : Fabienne Vignolle)

Les Anglais, désireux de prendre pied sur l'île, apportent leur soutien aux insurgés. Les Français ne l'entendent pas de cette oreille et entreprennent de soumettre les insurgés pour le bénéfice de Gênes. L'ordre génois est de retour en 1753, ordre précaire s'il en est.

Pasquale Paoli  (30 ans) prend la relève de son père. Il crée un « Royaume de Corse » indépendant... et sans roi. Lui-même est proclamé général en chef à la consulta de 1755.

Popularisée par le compte-rendu d'un jeune aristocrate écossais, Boswell, la révolution corse fait l'admiration des « philosophes » dans les salons parisiens, et en particulier de Jean-Jacques Rousseau  qui la donne en modèle dans son Contrat social.

Mais déjà le temps se couvre. Lasse de la guerre, Gênes cède « provisoirement »ses droits sur la Corse à la France par le traité de Versailles  du 15 mai 1768. Le duc de Choiseul, qui dirige le gouvernement de Louis XV, va dès lors tout mettre en oeuvre pour liquider la rébellion et annexer l'île.

Pas moins de 20 000 hommes débarquent en Corse sous le commandement du lieutenant-général Chauvelin puis du comte de Vaux. Les Français finissent par l'emporter à Ponte-Novo  après quelques revers initiaux - dont le plus sévère à Borgu le 9 octobre 1768.

Le chef de l'insurrection, Pasquale Paoli, gagne la côte et s'embarque sur un navire à destination de Livourne, en Italie, avec 300 fidèles.

Ultime rébellion

Sous la Révolution, le 15 janvier 1790, la Corse devient un département français  parmi d'autres. De retour en France sous les acclamations des révolutionnaires qui voient en lui un précurseur, Pasquale Paoli devient président du Conseil général et commandant en chef des gardes nationales.

Mais le gouvernement de la Première République, en 1793, entre en opposition avec le vieux chef et tente même de l'arrêter.

Pasquale Paoli (Richard Cosway, 1798)De dépit, Pasquale Paoli soulève alors à nouveau l'île contre Paris. Le jeune lieutenant Napoléon Bonaparte, tiraillé entre ses sympathies jacobines et ses racines corses, est un moment tenté de le suivre.

En 1796, après le départ forcé des troupes anglaises, l'île est reconquise par... Napoléon et Lucien Bonaparte, à la tête de l'armée d'Italie. 

Le général Morand va réprimer avec brutalité une ultime rébellion en 1799.

En 1811, pour amadouer ses anciens congénères, l'Empereur réunit l'île en un seul département et lui octroie de généreuses exemptions fiscales, pour la plupart encore en vigueur.



 

6 août 1284

La bataille de La Meloria, entre Gênes et Pise

 

Le 6 août 1284, près de la petite île de La Meloria, au large de Livourne, la flotte de Pise est complètement anéantie par celle de Gênes. C'est l'une des plus grandes batailles navales du Moyen Âge avec près de deux cent galères engagées et dix mille victimes du côté pisan.

La bataille de la Meloria, 6 août 1284

Cette bataille de Meloria consacre la suprématie de la République de Gênes sur la Méditerranée occidentale. Pise, de son côté, tombe sous l'influence de Florence, sa rivale en Toscane.

La rivalité entre les cités italiennes a des conséquences importantes pour une île oubliée, la Corse

Territoire pontifical en vertu d'une donation qui aurait faite par Pépin le Bref au pape Étienne II en 754, l'île passe de la tutelle de Pise à celle de Gênes sans cesser d'appartenir officiellement au Saint-Siège. Mais sous l'administration génoise, sa situation tend à se dégrader...

Elle est divisée en deux régions administratives séparées par la chaîne montagneuse centrale : l'En-Deçà-des-Monts (capitales : Bastia et Calvi) et l'Au-Delà-des-Monts (capitale : Ajaccio). Ces régions recoupent les limites des départements institués par la Révolution en 1793, le Golo et le Liamone, ainsi que des départements institués par la Ve République en 1976 : la Haute-Corse et la Corse du Sud. Elles sont elles-mêmes subdivisées en 90 pièvi (ou piéves), l'équivalent des cantons actuels ; chaque pièva correspond à peu près à une vallée.



 

23 août 1553

Sampiero offre la Corse à la France

 

Sampiero de Bastelica est un condottiere  corse qui a servi différents souverains italiens avant de se mettre au service des rois de France. Pour le compte de ces derniers, il débarque le 23 août 1553 sur son île natale, alors génoise. Il s'en empare et la livre à la France. Mais celle-ci la restituera à Gênes six ans plus tard, à la signature du traité du Cateau-Cambrésis.

S'étant illustré au combat sous le surnom de Sampiero Corso, ce capitaine a aussi alimenté les commérages à propos du sort réservé à sa jeune femme Vanina d'Ornano. Il l'étrangla de ses propres mains après qu'elle eut tenté de rejoindre Gênes avec la fortune du ménage. Sous le nom de D'Ornano, leur descendance commune a donné de nombreux chefs de guerre et maréchaux à la France.

André Larané

Un Corse chez les Médicis

Sampiero Corso, héros corse (1498-1567)Sampiero serait né le 23 mai 1498 à Bastelica, en Corse du sud. Engagé très jeune dans le métier des armes, il se rend en Italie, où les cités n'en finissent pas de se faire la guerre.

À Florence, il se met au service de Jean des Bandes Noires, un condottiere de la famille des Médicis, et ne tarde pas à faire reconnaître sa bravoure et ses talents. Au service des Médicis et du pape Léon X, fils de Laurent le Magnifique, il devient lui-même un chef de guerre redouté et riche.

À la mort de Léon X, en mars 1522, il passe au service des Français, engagés dans les guerres d'Italie. Pas de chance, c'est pour essuyer une défaite à La Bicoque  face aux Impériaux de Charles Quint, le 29 avril 1522. Au moins a-t-il l'occasion de combattre au coude à coude avec l'un des plus réputés chevaliers de son temps, Bayard.  

Deux ans plus tard, les Médicis ayant repris le Saint-Siège en la personne de Clément VII, il retourne au service du pape.

Cela ne lui fait pas de problème aussi longtemps que Clément VII reste l'allié de la France et l'ennemi de l'empereur. Mais quant en 1529, le pape sollicite l'aide de Charles Quint pour reprendre la ville de Florence, Sampiero Corso s'éloigne de lui.

Il prend langue avec l'évêque Jean du Bellay, ambassadeur de France auprès du Saint-Siège, et en 1535, passe définitivement au service de François 1er, encore et toujours en guerre contre son rival Charles Quint. Sampiero poursuit désormais ses exploits en Italie sous la bannière du roi de France.

Un destin shakespearien

En 1545, le héros corse prend le temps de rentrer dans son île natale pour épouser une jeune fille d'une noble lignée, que sa famille lui a promise dès sa naissance. Vannina d'Ornano a dix-huit printemps quand son mari compte déjà 47 années de la vie la plus rude qui soit !

Le mariage ne le fait pas renoncer à l'aventure. 

Le maréchal de Thermes, Paul de La Barthe de Thermes (1482–1562) (portrait par François Clouet, 1554)Les guerres d'Italie allant sur leur fin, Sampiero Corso commence à regarder du côté de son île, alors sous le joug de la République de Gênes, alliée de Charles Quint et donc hostile à la France.

Il décide de renouveler la tentative de D'Istria, un aventurier corse qui avait tenté un siècle et demi plus tôt de livrer l'île au roi d'Aragon. Henri II, qui a succédé à son père François 1er, lui accorde l'assistance de l'un de ses capitaines, le Maréchal de Thermes.

À la tête d'une petite troupe, ils débarquent en Corse le 23 août 1553. Ils s'emparent de l'île après d'âpres combats et grâce au soutien de l'influente famille d'Ornano.


30 janvier 1735

Déclaration d'indépendance des Corses

 

Le 30 janvier 1735, une assemblée corse, la Consulta d'Orezza, rejette la domination de Gênes, qui remonte à la bataille de La Meloria  (1284), et donne à l'île une Constitution écrite (la première de l'Histoire).

L'initiative attire l'attention des élites de Paris mais aussi des Treize Colonies anglaises qui, à leur tour, proclameront unilatéralement leur indépendance sous le nom des États-Unis...

La République de Gênes tente de reconquérir l'île. C'est le début d'une « Guerre de quarante ans ». Mais sans s'en douter, les insurgés travaillent pour la France qui ambitionne de prendre pied sur l'île et d'en chasser les Génois.

De l'insurrection à l'indépendance unilatérale

Une première révolte a éclaté le 27 décembre 1729 lorsqu'un magistrat prétend soutirer une pièce à un berger du village du Borziu sous prétexte d'impôt. Un an plus tard, la révolte paysanne est relayée par les notables.

Gênes obtient des renforts de l'empereur allemand tandis que les Corses entament la guerre avec un énergique général, Giacinto - ou Hyacinthe - Paoli (le père du futur dirigeant corse Pasquale Paoli).

C'est alors que se réunissent à Orezza les délégués de toute l'île. Ils rejettent officiellement la souveraineté génoise et se donnent une Constitution du Royaume de Corse d'avant-garde, qui introduit la souveraineté du peuple et la séparation des pouvoirs. 

L'assemblée se met par ailleurs en quête d'un monarque et offre la couronne de Corse au roi d'Espagne mais celui-ci la refuse. Plus volontaire, un personnage surgi de nulle part, le baron Théodore de Neuhoff, postule pour la couronne et offre sa fortune en contrepartie mais sa tentative fait long feu.

Un rêve avorté

Seuls les Anglais se montrent intéressés à aider les insurgés. C'est qu'ils veulent tirer parti de l'insurrection pour prendre pied en Corse.

Le Premier ministre français, le cardinal Fleury, riposte en apportant son aide aux Gênois en 1737.

Battus, les insurgés reprennent les armes en 1755 sous la conduite de Pasquale - ou Pascal - Paoli (30 ans), qui prend la relève de son père et soulève le peuple. Il crée un « Royaume de Corse » indépendant... et sans roi. Lui-même est proclamé général en chef à la consulta.

Lasse de la guerre, Gênes cède « provisoirement » ses droits sur la Corse à la France par le traité de Versailles  du 15 mai 1768.


 
 

15 mai 1768

Traité sur la Corse entre Paris et Gênes

 

Lassée par la guerre qu'elle doit mener contre les rebelles corses, la République de Gênes cède « provisoirement » ses droits sur l'île à la France par le traité de Versailles du 15 mai 1768.

La France convient de restituer l'île dès que la République lui aura versé 40 millions de livres en rémunération de son intervention contre les rebelles. Le remboursement se fait toujours attendre !...

Le duc Etienne de ChoiseulLe duc de Choiseul, qui dirige les affaires du royaume, est à l'origine de cette fructueuse transaction.

Il veut offrir aux nobles français une occasion de guerre et une revanche après l'humiliant traité de Paris  qui a mis fin à la guerre de Sept Ans.

Il veut aussi offrir à la France une base stratégique en Méditerranée pour faire front aux Anglais, présents à Minorque et surtout à Gibraltar.

Il veut enfin détourner les esprits des problèmes intérieurs qui minent la France sous le règne finissant de Louis XV. Les privilégiés et les parlementaires  repoussent toute réforme de l'État cependant que la haute noblesse accapare les évêchés et les commandements militaires.

Pas moins de 20 000 hommes débarquent en Corse pour soumettre les Corses sous le commandement du lieutenant-général Chauvelin puis du comte de Vaux. Les Français finissent par l'emporter à Ponte-Novo  après quelques revers initiaux - dont le plus sévère à Borgu le 9 octobre 1768.


 

9 mai 1769

La France soumet la Corse

 

Le 9 mai 1769, en Corse, au terme d'une bataille de plusieurs jours, les indépendantistes sont défaits par l'armée française à Ponte-Novo (ou Pontenuovo, le pont neuf).

Fin d'une « Guerre de quarante ans »

Lasse de combattre la rébellion corse, Gênes a cédé « provisoirement » ses droits sur l'île à la France par le traité de Versailles du 15 mai 1768. Le duc de Choiseul, qui dirige le gouvernement de Louis XV, met dès lors tout en oeuvre pour liquider la rébellion et annexer l'île. Pas moins de 20 000 hommes débarquent en Corse sous le commandement du lieutenant-général Chauvelin. Mais le marquis de Chauvelin essuie un grave revers à Borgu (ou Borgo) le 9 octobre 1768.

Monument commémoratif de la bataille de Pontenovo (photo : André Larané, Herodote.net, 2014)Six mois plus tard, le comte de Vaux débarque à son tour avec 24 000 hommes.

La bataille décisive se déroule près d'un ancien pont génois qui franchit le fleuve du Golo, sur la route de Corte à Bastia.

Elle met aux prises plusieurs dizaines de milliers de combattants. Assaillis des deux côtés du fleuve, les Corses laissent sur le terrain quelques centaines de morts et plus de 6 000 blessés.

C'en est fini d'une « Guerre de quarante ans » qui a mis aux prises le peuple corse avec la République de Gênes puis le roi de France.

Le chef de l'insurrection corse, Pasquale Paoli, gagne la côte et s'embarque sur un navire à destination de Livourne, en Italie, avec 300 fidèles.

Parmi les partisans qui l'accompagnent jusqu'à la côte figure son aide de camp, un avocat d'Ajaccio du nom de Carlo - Charles - Buonaparte.

Sa jeune épouse, Laetitia (18 ans) est enceinte de sept mois. Après une fuite dans la montagne corse, elle donne le jour à un petit Napoléon...

Soumission 

Les Français établissent en Corse un Conseil supérieur... comme dans leurs colonies des Antilles. Le gouvernement de l'île est confié au comte Louis de Marbeuf. Il invite les nobles à faire enregistrer leurs quartiers de noblesse. Seules 86 familles se résolvent à cette démarche. Parmi elles figure la famille Buonaparte, issue de colons génois installés dans le port d'Ajaccio.

Cette circonstance - et plus encore les «excellentes relations» qu'entretient la belle Laetitia (ou Letizia) Buonaparte avec le gouverneur de Marbeuf - vont permettre au jeune Napoléon d'obtenir plus tard une bourse pour entrer dans une école militaire réservée à la noblesse.


22 août 1975

La Corse ensanglantée

 

Le 22 août 1975, en Corse, pour la première fois en France en temps de paix depuis 150 ans, on tire sur les forces de l'ordre.

Le docteur Edmond Simeoni et un militant indépendantiste pendant l'occupation de la cave d'Aléria (DR)La veille, des militants de l'ARC (Action de la Renaissance de la Corse), un groupuscule dirigé par le médecin Edmond Simeoni, ont occupé une cave viticole de la plaine d'Aléria, sur la côte orientale de l'île.

Cette cave avait la particularité d'appartenir à un rapatrié d'Algérie.

Quand les pieds-noirs ont été chassés d'Algérie, treize ans plus tôt, le gouvernement français a invité plusieurs anciens exploitants agricoles de la Mitidja à remettre en culture les friches de la plaine d'Aléria, autrefois grenier à blé de la ville de Rome ! 

Il a commis ce faisant une maladresse en les dispensant de rembourser leurs prêts d'installation, privilège dont ne bénéficient pas les jeunes agriculteurs de l'île. 

Les militants de l'ARC ont donc occupé la cave afin d'exiger que soient pris en considération les intérêts des Corses et qu'il soit mis fin à une certaine « colonisation »de l'île. Ils ont dénoncé également une supposée escroquerie autour des prêts publics alloués aux dirigeants de la cave viticole. 

L'assaut

Le gouvernement ne veut rien entendre. Le matin du 22 août, plusieurs escadrons de gendarmerie et de CRS venus du continent, au total un millier d'hommes, prennent position autour de la cave, avec des hélicoptères et des véhicules blindés. Une réaction de fermeté qui surprend par sa démesure, de la part du gouvernement de Jacques Chirac, Valéry Giscard d'Estaing  étant président de la République et Michel Poniatowski ministre de l'Intérieur.

Face aux forces de l'ordre, les militants sont au total moins d'une cinquantaine, armés de fusils de chasse. Ils refusent de se rendre et l'assaut est donné à 16 heures. Plusieurs assiégés sont blessés. Deux gendarmes sont tués.

Quelques jours plus tard, une manifestation à Bastia fait à nouveau un mort dans les forces de l'ordre. Edmond Simeoni est condamné à 5 ans de prison dont deux avec sursis. C'est le début d'une longue période de troubles dont l'île de Beauté est à peine sortie au début du XXIe siècle.

Le 5 mai 1976, des nationalistes corses créent le Front National de Libération de la Corse (FLNC). Ils tiennent une conférence de presse à Orezza, dans le couvent Saint-Antoine de Casabianca où le héros Pascal Paoli proclama l'indépendance  en 1755. Le FLNC va reprendre à son compte les revendications indépendantistes et multiplier les attentats avec l'espoir que la répression policière fasse basculer la population en leur faveur...


6 février 1998

Assassinat du préfet Claude Érignac

 

Au tournant du XXIe siècle, usés par l'action policière, les défections et l'âge, les nationalistes corses jouent leur va-tout... Le soir du 6 février 1998, à Ajaccio, des dissidents du Front de Libération Nationale de la Corse (FLNC) assassinent à bout portant le préfet de Corse-du-Sud Claude Érignac qui allait rejoindre son épouse à un concert. Ce crime sans précédent en temps de paix soulève une immense émotion en France et en Corse  même. Les six assassins sont arrêtés et condamnés à la perpétuité. Un autre indépendantiste, Yvan Colonna, est dénoncé par les accusés, arrêté peu après et à son tour condamné. Depuis lors, les attentats ont à peu près cessé sur l'île, laissant place à des trafics plus classiques.


 
Histoire tourmentée de la Corse
• 6 août 1284 : la Corse devient génoise
• 23 août 1553 : Sampiero offre la Corse à la France
• 30 janvier 1735 : déclaration d'indépendance d'Orezza
• 15 mai 1768 : traité entre Paris et Gênes
• 9 mai 1769 : les Corses défaits à Ponte-Novo
• 22 août 1975 : drame d'Aléria
• 6 février 1998  : assassinat du préfet Claude Érignac
• 17 décembre 2015  : un indépendantiste à la présidence de la région


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Dans un contexte plus immédiat , nous ne résistons pas au plaisir de "transcrire" ici l'article qui suit, signé Gabriel MATZNEFF, article assez étonnant au demeurant, tant il semble aller à contre-courant  de la ligne éditoriale de l'hebdomadaire "Le Point".
Nous épargnerons à nos lecteurs les commentaires majoritairement peu amènes  qu'il a suscités dans le lectorat coutumier du "Point" . 

Matzneff - La déception ajaccienne
 
Gabriel Matzneff ne cache pas sa déception après le premier discours d'Emmanuel Macron : « Les Corses vont finir par regretter de n'être plus génois. »
 
PAR GABRIEL MATZNEFF
 
Publié le 07/02/2018 à 07:08 | Le Point.fr
 
C'est précisément parce que le chef de l'État m'inspire sympathie et respect que j'ai été déçu à l'extrême, catastrophé par le discours qu'il a prononcé à Ajaccio en hommage au préfet Érignac. Cette méconnaissance de l'histoire corse, cet éloge vibrant du centralisme jacobin, ces incantations à la République, cette religion hégélienne de l'État sont affligeants.
J'ose espérer que son discours de Bastia  sera d'un autre ton ; qu'au cours de la nuit, dont on dit qu'elle porte conseil, le président Macron se sera souvenu que la Corse a été vendue à la France  par les Génois, que les Corses – contrairement, un siècle plus tard, aux Niçois – ne sont pas devenus français par un acte de libre adhésion. Oui, vendue à la France comme, à la fin du XIXe siècle, l'occupant espagnol vendra les Philippines  aux États-Unis. La réalité, c'est cela, tout le reste est un mensonge d'État.
Les Corses vont finir par regretter de n'être plus génois. Ils le seraient restés, ils parleraient certes l'italien, qui est la langue de la République italienne, mais ils parleraient aussi le corse, comme les Vénitiens parlent l'italien et le vénitien, les Napolitains l'italien et le napolitain, les Sardes, l'italien et le sarde, etc.
La prospérité des langues locales ne porte aucune ombre à l'unité de la République italienne, elle est une richesse supplémentaire, une bénédiction.
Pour la clémence du président Macron
Emmanuel Macron se grandirait s'il reconnaissait l'erreur commise par le pouvoir parisien qui durant deux siècles, le XIXe et le XXe, s'employa à l'assassinat de la langue corse. Cette volonté féroce de déposséder le peuple corse de sa langue, je la compare à celle du totalitarisme soviétique athée qui, pendant soixante-dix ans, s'employa à arracher du cœur et de la mémoire du peuple russe ses racines religieuses, spirituelles.
Quant à l'ignominie de l'attentat qui coûta la vie au préfet Érignac, personne ne niera que tuer un homme en lui tirant dans le dos est un acte d'une grande lâcheté. Je rappelle cependant au président Macron que bon nombre des crimes commis par les militants du FLN et les militants de l'OAS durant la guerre d'Algérie furent eux aussi d'une grande lâcheté. Le meurtre de l'écrivain Mouloud Feraoun ne fut pas moins abject que celui du préfet Érignac. Pourtant, les criminels emprisonnés, qu'ils fussent algériens ou français, furent, après quelques années de prison, libérés, amnistiés. Le président de la République est un lecteur de Hegel, grand bien lui fasse, mais je suis persuadé qu'il lit aussi Sénèque et Corneille ; qu'il est nourri des pages essentielles que ces deux auteurs ont écrites sur la clémence.
La clémence peut, dans certaines circonstances, être un synonyme de faiblesse ; mais lorsque sont en jeu la réconciliation, la guérison des blessures, la paix civique, elle est celui de la lucidité et du courage.
 
 

FAKE NEWS ET PROJET DE LOI LIBERTICIDE

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FAKE NEWS ET PROJET DE LOI LIBERTICIDE

Les médias officiels et les médias mainstream seront à l’abri de la loi liberticide en préparation. Chacun sait qu’en matière de « fausses nouvelles » ils sont vierges de toute suspicion en ce qui les concerne et ont, par contre, un œil parfaitement exercé pour, à l’image des « décodeurs » du Monde, débusquer celles des médias alternatifs.
Le site Herodote.net nous livre  opportunément, à propos de "fake news"  un  article exhaustif signé  Joseph Savès
Nous ferons suivre cet article d'un panorama particulièrement "éclairant" du paysage médiatique français, tiré de
http://nrt24.ru/fr
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1. Article tiré de :
HERODOTE.NET
https://www.herodote.net/Fake_news_contre_mensonges_d_etat-synthese-2369-506.php


 

« Fake news » contre mensonges d'État



Un nouveau terme est entré dans le langage médiatique : « fake news ». C’est une façon « branchée » de désigner les bobards, contre-vérités et rumeurs qui circulent sur les réseaux sociaux : facebook, youtube etc. Faut-il s’en plaindre ?

Internet n’a pas inventé les mensonges et force est de constater que les plus dangereux ne sont pas ceux qui circulent anonymement sur les réseaux sociaux mais ceux qui sont proférés de façon très officielle par les gouvernements avec le concours des médias institutionnels.

                                                                                                                                                                                                                       Joseph Savès



 

Bobards sans conséquence

Le phénomène facebook a fait tomber la barrière qui séparait encore il y a peu vie privée et vie publique. Le réseau social né à Harvard en 2004 compte d’ores et déjà un milliard d’utilisateurs actifs.

Il conduit des adolescents à exposer leur vie intime sur la Toile à leurs risques et périls et certains y laissent la vie quand des partenaires indélicats ou jaloux exposent des photos ou des vidéos compromettantes. Ces faits divers tragiques constituent une violation de la vie privée et sont réprimés à ce titre.

Mais facebook, ce sont aussi des « communautés » virtuelles réunies par un intérêt commun et au sein desquelles circulent des informations plus ou moins fantaisistes, les fameuses « fake news ».

Pour retenir l’intérêt des internautes, ces informations doivent surprendre et donc se démarquer des informations communes, sans s’embarrasser de vérifications. Elles doivent surtout répondre aux attentes de la communauté et dire à chacun ce qu’il a envie d’entendre et de croire. Ainsi sont réunis les deux ingrédients des « fake news ».

C’est comme cela que par exemple les « communautés » musulmanes font circuler avec un certain succès l’idée que Mahomet, nom donné en français au prophète de l’islam, serait une déformation dépréciative de son nom arabe. La réalité historique est autrement plus simple : Mahomet dérive de Mehmet, nom donné par les Turcs au prophète (les Perses l’appellent quant à eux Mahmoud et les Sahéliens Mamadou).

Plus près de nous, le 4 mai 2017, le débat de l’entre-deux-tours des présidentielles françaises a donné lieu à une sortie inattendue de la candidate Marine Le Pen. Déstabilisée, elle a relayé une rumeur propagée sur les réseaux sociaux et lancé à son rival : « J'espère qu'on n'apprendra pas que vous avez un compte offshore aux Bahamas… » Emmanuel Macron a gardé son calme et l’on peut penser que le bobard ne lui a pas fait perdre une voix.

De la même espèce est la calomnie à l’encontre du leader socialiste Léon Blum, selon laquelle celui-ci mangeait dans de la vaisselle en or. Diffusée par la presse de droite dans les années 1930, elle n’atteignait que ses opposants et suscitait des haussements d’épaule chez les autres car elle ne reposait sur aucun fondement sérieux.

On peut classer dans la même catégorie des bobards sans conséquence les rumeurs de la Première Guerre mondiale selon lesquelles par exemple les « Boches » coupaient les mains des enfants.

Les citoyens croyaient-ils à ces bobards diffusés par les journaux et les cartes postales ? C’est peu probable car ils ne reposaient sur aucun élément avéré. D’ailleurs, on eut vite fait de les qualifier de « bourrage de crâne ». Mais on laissait dire car ces bobards remplissaient une fonction symbolique en légitimant l’effort de guerre et la solidarité de tous contre l’ennemi commun. De la même façon que les « fake news »d’aujourd’hui, ils soudaient les membres de la communauté dans la haine de l’adversaire.

Face à Staline et Mahomet, même aveuglement

Après la Seconde Guerre mondiale, l’intelligentsia occidentale a témoigné d’un aveuglement maladif vis-à-vis de la réalité soviétique. Ainsi, lors du procès Kravchenko, en 1949, des personnalités aussi réputées que le Prix Nobel Frédéric Joliot-Curie, Louis Aragon, Julien Benda ou encore Vercors sont venus dire à la barre le dégoût que leur inspirait l'accusé, coupable d’avoir médit sur l’Union soviétique.

Comme les islamistes d’aujourd’hui, ces intellectuels étaient enfermés dans leurs certitudes, inaccessibles au doute cartésien et à la recherche de la vérité. Et face à leurs contradicteurs, ils cherchaient un réconfort au sein de leur groupe.

Les demi-vérités tuent

Si les bobards et les « fake news » n’ont jamais à notre connaissance cassé une réputation, c’est parce qu’ils ne reposent sur aucun élément de vraisemblance. Ils ne réjouissent que les convaincus et suscitent chez les autres des haussements d’épaules.

Il en va autrement des lettres anonymes d’antan ou des demi-vérités qui circulent aujourd’hui dans la presse et sur internet. Leur violence vient de la part de vérité qui rend leur contenu plausible. Elles peuvent en conséquence causer des torts irréparables aux personnes visées, comme on le voit dans le film Le Corbeau d’Henri-Georges Clouzot (1943).

Les demi-vérités ou demi-calomnies diffusées dans la bonne presse ont, bien avant l’ère internet, brisé des réputations et des vies. Comme les lettres anonymes, elles ont une issue fatale parce qu’elles contiennent une part de vérité qui leur apporte de la vraisemblance.

C’est le cas du « prêt gratuit » octroyé par l’homme d’affaires Roger-Patrice Pelat en 1986 au ministre Pierre Bérégovoy pour l’achat d’un appartement. Révélé par Le Canard Enchaîné le 1er février 1993, il laissait planer un doute sur la probité du Premier ministre de François Mitterrand alors qu’une enquête approfondie aurait montré l’absence d’intention délictueuse.

Patriote et républicain, qui plus est déprimé par l’échec de son camp aux législatives, Pierre Bérégovoy ne supporta pas que son honneur soit mis en cause. Il se suicida le 1er mai 1993.

Comment ne pas faire le rapprochement avec une autre affaire, le suicide de Roger Salengro  ? Ministre de l’Intérieur dans le gouvernement de Léon Blum, il fut accusé d’avoir déserté vingt ans plus tôt, pendant la Grande Guerre. Il est vrai qu’il avait été capturé par l’ennemi mais c’était en tentant de récupérer le corps de l’un de ses compagnons d’armes, avec l’accord de son chef…

Plus loin dans le temps, songeons à la reine Marie-Antoinette, dont les maladresses firent le miel de ses ennemis. Elle avait renoncé, par souci d’économie, à une somptueuse rivière de diamants. Mais les bijoutiers vendirent ensuite ce collier à un soupirant de la reine sans que celle-ci le sût. Le scandale retomba sur elle et ternit à jamais sa réputation.

L’affaire du collier  lui coûta beaucoup plus que l’accusation d’inceste proférée lors de son procès. Par son outrance, cette accusation sans fondement lui valut au contraire l’indulgence du public… pas assez cependant pour obtenir son acquittement.

Mensonges d’État et propagande

Plus que des rumeurs et des bobards sans conséquence, plus que des demi-vérités qui peuvent tuer, l’Histoire nous invite à nous méfier des mensonges d'État. Dans leur version la plus anodine, ils relèvent de la propagande avec l’inconvénient qu’ils entament la crédibilité des autorités.

Ainsi en a-t-il été du « nuage de Tchernobyl ». Le 26 avril 1986, l’explosion de la centrale nucléaire de Tchernobyl a entraîné des mesures urgentes de prévention partout en Europe. Partout… sauf en France.

Le président Mitterrand et son Premier ministre Jacques Chirac ne tenant pas à affoler la population ni se mettre à dos le lobby nucléaire, il s’en est suivi une politique de désinformation qui relève du mensonge d’État. Le 28 avril 1986, alors que le nuage radioactif se déplaçait vers l’Europe occidentale, le professeur Pellerin tenait un discours rassurant à la télévision : « Ça ne menace personne actuellement sauf dans le voisinage immédiat de l’usine et encore c’est surtout dans l’usine que les Russes ont admis qu’il y avait des personnes lésées. » Deux jours plus tard, le mensonge d’État s’enclenchait véritablement à travers les informations fournies par la météo nationale et répercutées par la présentatrice d’Antenne 2 : « En France, l’anticyclone des Açores restera suffisamment puissant pour offrir une véritable barrière de protection ; il bloque en effet toutes les perturbations venant de l’Est. » C’était la fameuse théorie du nuage de Tchernobyl s’arrêtant à la frontière française qui prend corps. On sait aujourd’hui qu’il n’en a rien été et que la France a été affectée comme ses voisins immédiats.

Plus sordide est le mensonge du gouvernement espagnol relatif à l’attentat de la gare d’Atocha, le 11 mars 2004. Ce jour-là, plusieurs bombes ont tué 191 personnes et en ont blessé deux mille. Très embarrassé du fait de son engagement en Irak, le Président du Conseil José Maria Aznar a attribué le crime aux Basques de l’ETA, bien que ceux-ci n'aient jamais pratiqué d'attentat de masse et s'en soient tenus à des attentats ciblés. L’enquête a plus tard conduit à l’arrestation de 29 islamistes en lien avec al-Qaida… et à la défaite du Premier ministre et de son parti.

Entre propagande de guerre et autojustification, l’affaire Jessica Lynch relève du même niveau de mensonge que précédemment. Elle débute le 23 mars 2003 quand la soldate Jessica Lynch est capturée par les forces irakiennes. Dès le mois suivant, les médias américains, aussitôt relayés dans le monde entier, relataient son calvaire et sa libération épique : après avoir résisté jusqu’à l’épuisement de ses munitions, elle aurait été blessée par balle, poignardée, brutalisée par un officier irakien etc.

Une semaine après, des unités d’élite américaines investissaient l’hôpital de Nassiriya où elle était retenue et la ramenaient au Koweit. Une vidéo diligemment fournie par la Maison Blanche enregistrait l’exploit pour la postérité.

Las, dès le 9 avril 2003, les forces américaines ayant envahi l’Irak, des journalistes sourcilleux se rendaient à l’hôpital de Nassiriya et découvraient une réalité très différente : la jeune fille avait été capturée après être tombée de son camion ; gravement blessée dans sa chute, elle avait été soignée le mieux possible par les médecins irakiens. Ceux-ci avaient ensuite tenté de la restituer aux Américains mais avaient dû rebrousser chemin sous un feu nourri. Enfin, quand le commando américain avait investi l’hôpital, il n’avait pas eu à combattre, les soldats ennemis s’étant retirés depuis déjà plusieurs heures. La vidéo de la Maison Blanche était un montage façon Hollywood.

Hollywood, justement, se prête à bien d’autres formes de propagande que l’on peut juger plus anodines. Par exemple l’héroïsation des soldats américains dans la Seconde Guerre mondiale. Parmi les exemples les plus culottés, relevons le film U-571 (2000). Il raconte la capture en 1942 d’un sous-marin allemand. Grâce à sa machine Enigma, les Alliés vont pouvoir décrypter les échanges radio de l’armée ennemie. L’exploit est véridique à ce détail près qu’il a été commis par la Royal Navy et non par la marine américaine comme dans le film.

Nécessités de la guerre

On peut admettre que les nécessités de la guerre justifient le mensonge. Tous les coups sont permis quand il s’agit d’économiser la vie de ses soldats et de s’assurer la victoire.

C'est le Lusitania, présenté par les Américains comme un paquebot civil alors qu'il était chargé d'armes et d'explosifs à destination des Alliés. Coulé par un sous-marin allemand en 1915, il va servir deux ans plus tard de prétexte à l'entrée en guerre des États-Unis aux côtés des Alliés.

C'est Fortitude  en 1944, une très belle opération d'intoxication destinée à faire croire aux Allemands que le débarquement allié aurait lieu dans le Pas-de-Calais.

Moins justifiable est l'argumentaire du président Truman relayé par la presse occidentale à propos d'Hiroshima et Nagasaki, selon lequel ces drames auraient évité le sacrifice d'un million de soldats américains… alors que dans toute la guerre du Pacifique, quand le Japon était au meilleur de sa forme, les États-Unis n’avaient perdu qu’une centaine de milliers d’hommes.

On sait que les Japonais étaient disposés à capituler dès avant le bombardement d’Hiroshima, à la seule condition que l’empereur soit maintenu en place. En lâchant des bombes atomiques sur le Japon, les dirigeants américains ont surtout voulu impressionner leur allié et néanmoins rival, l’Union soviétique, dans la perspective des conflits à venir.

Cela nous amène à la catégorie la plus redoutable des mensonges d’État...

Mensonges d’État et crimes de guerre

Plus grave que tout en matière de mensonge et de fausses nouvelles, c’est quand celles-ci ont pour objectif une guerre d’agression. Là, comme on dit dans les Tontons flingueurs, c'est du lourd ! On est très loin des « fake news » de quelques tordus d'internet.

Nous avons relevé deux cas de la sorte dans l’Histoire européenne. Faut-il s’en étonner ? Ils nous viennent de deux grands dirigeants réputés pour leur dureté : Bonaparte et Bismarck.

 

En 1797, le général Bonaparte, vainqueur des Autrichiens en Italie, cherche une contrepartie à leur offrir en échange de la cession de la Belgique. Pourquoi pas la République de Venise ? Le problème est que Venise s'est jusque-là prudemment tenue à l'écart des coalitions contre la France et rien ne saurait justifier sa disparition en tant qu'État souverain.

Qu'à cela ne tienne ! Un agent secret au service de Bonaparte produit un faux appel du Grand Conseil de Venise à l'adresse des habitants de Vérone pour qu'ils se soulèvent contre la garnison française établie dans la ville. Le soulèvement ne réussit que trop bien  et 400 soldats français qui étaient soignés dans l'hôpital local sont massacrés par la populace. C'en est assez pour que Bonaparte adresse un ultimatum à la Sérénissime et occupe son territoire. Il peut dès lors la livrer sur un plateau aux Autrichiens et signer avec eux le traité de Campoformio.

L'autre cas est mieux connu des Français (faut-il s'en étonner ?). En 1870, le chancelier Bismarck ambitionne de réaliser l'unité de l'Allemagne autour de la Prusse par une guerre commune contre la France. Pour cela, iI se saisit d'une banale querelle diplomatique à propos de la succession sur le trône d'Espagne et propose la candidature d'un prince prussien. Le roi Guillaume 1er, qui ne veut pas de querelle avec la France, réprouve cette candidature. L'ambassadeur de France à Berlin commet la maladresse de lui demander confirmation de son refus à Ems, où le roi prend les eaux.

Bismarck va habilement caviarder la dépêche  qui fait état de cette rencontre avant de la livrer à la presse. Les opinions publiques française et allemandes vont se déchaîner et conduire en trois jours à la déclaration de guerre tant souhaitée. Il en résultera trois guerres franco-allemandes, dont deux mondiales (*).

Les autres affaires relèvent des États-Unis. Cela commence en 1845 quand le président James Polk ordonne à une patrouille américaine de pénétrer sur le territoire mexicain. La patrouille est interceptée par l'armée mexicaine. Il s'ensuit des morts des deux côtés et le président appellera aussitôt le Congrès à voter une « guerre commencée par le Mexique ». Ce sera une promenade militaire  qui se soldera par l'annexion du Nouveau-Mexique, de l'Arizona, de la Californie etc. Excusez du peu. De tous les représentants, Abraham Lincoln sera le seul à protester. Il y perdra son siège.

Rebelote en 1898 pour s'emparer de Cuba et des dernières colonies espagnoles. Un cuirassé ayant explosé  en rade de la Havane, la presse américaine, dont le célèbre William Randolph Hearst (« Citizen Kane ») accuse les Espagnols d'avoir déposé une bombe sur le navire. Il s'ensuit une nouvelle promenade militaire... et l'on apprendra bien plus tard que le cuirassé a été victime d'une banale explosion de chaudière.

D'une nature mensongère légèrement différente est l'insurrection « spontanée » déclenchée en 1903 dans la ville de Panamá, alors sous souveraineté colombienne, pour amener l'isthme à se rendre indépendant. Ainsi les États-Unis ont-ils pu assurer leur mainmise sur le territoire du futur canal.

Plus près de nous, la prétendue attaque de deux destroyers  dans le golfe du Tonkin en août 1964 a fourni au président Lyndon Johnson le prétexte à des raids aériens sur le Nord-Vietnam. Avec au final, une décennie plus tard, une humiliation dont le pays aura le plus grand mal à se remettre.

En 1985, pour justifier une intervention armée contre les sandinistes, un mouvement d'extrême-gauche porté au pouvoir par les électeurs nicaraguayens, le secrétaire d’État américain George Schultz osait affirmer devant le Congrès : « Le Nicaragua est un cancer qui s’insinue dans notre territoire, il applique les doctrines de Mein Kampf et menace de prendre le contrôle de tout l’hémisphère ».

Enfin, chacun garde en mémoire les mensonges qui ont accompagné la guerre du Golfe  en 1991, avec le récit par une infirmière koweitienne, devant le Congrès américain, des sévices des troupes irakiennes et notamment du meurtre de nourrissons dans les maternités. Retransmis sur toutes les chaînes de télévision, ce « témoignage »a permis de mobiliser l'opinion internationale contre Saddam Hussein. Il s'est avéré plus tard que cette « infirmière » n'était autre que la fille de l'ambassadeur koweïtien à Washington.

Le dictateur irakien, auquel on attribuait sans sourciller la « quatrième armée du monde » (sic), était encore quelques mois plus tôt un allié de l'Occident contre l'Iran et l'on fermait les yeux sur ses attaques à l'arme chimique contre son propre peuple !

Last but not least, en avril 2003, Washington et Londres sont entrés à nouveau en guerre contre l'Irak au motif que le régime de Saddam Hussein aurait détenu des « armes de destruction massive » dangereuses pour la paix du monde. Le Secrétaire d'État Colin Powell s'est prêté au jeu en montrant au Conseil de Sécurité de l'ONU, le 5 février 2003, une ampoule de poudre blanche supposée être de l'anthrax (dangereux poison) comme preuve de l'existence de ces armes.

La suite a prouvé de façon certaine que ces armes n'existaient pas ou avaient été détruites depuis belle lurette. De ce grossier mensonge d'État a résulté la ruine de tout le Moyen-Orient, du Pakistan à l'Égypte, et le réveil de la guerre séculaire entre chiites et sunnites.

Raison garder

L'Histoire et l'actualité montrent que la liberté d'expression et la vérité sont davantage menacés par les dirigeants de certains États, fussent-ils démocratiques, que par les bobards qui circulent sur internet et ailleurs.

Quel crédit accorder à la Maison Blanche quand tant de fois les présidents américains ont été pris en flagrant délit de mensonge sur des questions stratégiques ? En matière de commerce et de finance (négociations sur le CETA  par exemple), quelle confiance accorder à l'Union européenne, adepte de l'omerta et des manœuvres de couloir ?...

Ces mensonges d'État et ces silences contribuent aux rumeurs de complots et nourrissent les « fake news ». L'antidote pourrait se trouver dans une absolue liberté d'expression (hormis la diffamation et l'insulte).

Si les médias se montrent ouverts au débat et à la critique, s'ils acceptent d'aborder les sujets qui fâchent, s'ils se gardent de diaboliser les opposants à la ligne officielle, on peut légitimement penser qu'il n'y aura plus d'espace pour les « fake news ». Mais nous en sommes encore loin. Un exemple parmi d'autres, qui nous a particulièrement frappé : Le Monde du 20 mars 2017 a pu consacrer un dossier très étoffé à l'antisémitisme dans la France d'aujourd'hui sans écrire une seule fois les mots islamiste, islamisme, islam, musulman etc. Troublant déni de réalité.


 

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FAKE NEWS ET PROJET DE LOI LIBERTICIDE
 
2. http://nrt24.ru/fr/news/le-pouvoir-dinfluence-delirant-des-dix-milliardaires-qui-possedent-la-presse-francaise
  14 février 2018

LE POUVOIR D’INFLUENCE DÉLIRANT DES DIX MILLIARDAIRES QUI POSSÈDENT LA PRESSE FRANÇAISE

Dix milliardaires ont pris le contrôle d’une grande partie des médias français. Ces oligarques, venus du BTP, de l’armement, du luxe ou de la téléphonie, ont accaparé les grands quotidiens nationaux, les chaînes de télévision et les radios, pour asseoir leur influence. Avec à la clé, conflits d’intérêts, censures, pressions, licenciements, ingérence malsaine... Cette concentration des moyens de production de l’information entre les mains de quelques uns met en péril l’indépendance de la presse dans notre pays. Et porte ainsi atteinte au fonctionnement démocratique. Comment garantir la liberté de l’information et le pluralisme de la presse ? Résumé d’une situation critique, à l’occasion de la campagne #LibertéEgalitéInformés.

À qui appartient la presse française ?

Le secteur de la presse en France est un grand Monopoly. Tout s’achète, tout se vend, les journaux, les télés, les radios. Quelques milliardaires se partagent le gâteau. Résultat : 90 % des quotidiens nationaux vendus chaque jour appartiennent à 10 oligarques ! D’après les calculs de Basta !, les mêmes possèdent des télévisions et radios qui totalisent respectivement 55% et 40% des parts d’audience [1 ]. Vous avez donc une grande probabilité de lire, regarder ou écouter chaque jour des médias qui appartiennent à ce petit cercle de milliardaires.


Cela pose plusieurs problèmes. La concentration d’abord. Est-il sain qu’une si grande part de la presse appartienne à quelques personnes, richissimes, faisant partie d’une caste de privilégiés ? L’indépendance, ensuite. Est-il normal que les principaux médias français de notre pays soient entre les mains de marchands d’armes, d’entreprises du luxe, du BTP, de la téléphonie, de banquiers ou de fabricant de toilettes ? Comment ces propriétaires peuvent-ils concilier liberté de l’information et intérêts privés ? Comment TF1, BFM-TV, Le MondeLibération peuvent-il produire en toute indépendance des enquêtes sur le secteur de la téléphonie, quand leurs propriétaires sont les patrons de Free, Bouygues Telecom et SFR ? Comment les journalistes du Figaro peuvent-ils porter un regard critique sur la politique de défense de la France, quand le propriétaire de leur journal vend des avions de chasse à l’État français ? Enfin, cette situation ne peut qu’encourager la reproduction d’un système économique qui assure la continuité des intérêts financiers de cette petite classe de possédants. Ils constituent une véritable communauté d’intérêt ! Et ce qui motive de riches patrons à créer des conglomérats médiatiques – qui ne rapportent pas vraiment d’argent – c’est d’abord la possibilité d’acheter de l’influence.

Qui sont ces 10 milliardaires ?

Ils sont cinq à faire partie du cercle des dix premières fortunes de France : Bernard Arnault, PDG du groupe de luxe LVMH (patron des Echos, du Parisien), Serge Dassault (Le Figaro), François Pinault (Le Point), Patrick Drahi, principal actionnaire de SFR (LibérationL’Express, BFM-TV, RMC), Vincent Bolloré (Canal+). On trouve ensuite Xavier Niel, patron de l’opérateur de téléphonie Free et 11ème fortune de France, qui s’est associé avec Pierre Bergé, héritier du couturier Yves Saint-Laurent, et avec le banquier Matthieu Pigasse, pour devenir propriétaire du groupe Le Monde (L’Obs, Télérama, La Vie...). Matthieu Pigasse possède également Radio Nova et l’hebdomadaire Les Inrocks.

Martin Bouygues, 30ème fortune de France, est propriétaire du groupe TF1. La famille Mohn, qui contrôle le groupe allemand Bertelsmann [2 ], est propriétaire de M6, RTL, GalaFemme actuelleVSDCapital,… Viennent ensuite Arnaud Lagardère, propriétaire d’Europe 1, Paris Match, du JDD, de Virgin radio, RFM, Télé 7 jours, et Marie-Odile Amaury, qui possède L’Equipe (et dont le groupe est, par l’une de ses filiales, organisateur du Tour de France notamment). Petite précision : ces deux derniers ne sont « que » millionnaires, avec tout de même une fortune évaluée entre 200 et 300 millions d’euros. A ce « Top 10 », on pourrait aussi ajouter la famille Bettencourt qui finance le journal ultra-libéral L’opinion. Ou le milliardaire d’origine libanaise Iskander Safa, 71ème fortune de France et propriétaire du très réac Valeurs actuelles.


Conflits d’intérêts en pagaille

Quelles sont les conséquences sur l’indépendance des médias ? Un mélange des genres pour le moins douteux, qui peut mettre les journalistes en porte-à-faux. Comment TF1 pourrait-il produire des enquêtes critiques sur les abus des partenariats publics-privés (PPP) quand son propriétaire, Bouygues, fait partie des multinationales du BTP qui bénéficient de ces juteux contrats ? Autre exemple : comment un média peut-il s’intéresser de près aux affaires d’évasion fiscale quand son patron manifeste un attrait prononcé pour les paradis fiscaux ? C’est la question que doivent se poser les journalistes de BFM-TV à chaque nouveau scandale fiscal.

Leur boss, Patrick Drahi, a échafaudé, à partir de sa holding personnelle, un opaque et complexe montage de filiales et de trusts, dispersés au sein de paradis fiscaux notoires : Guernesey, Suisse ou Luxembourg. Comment BFM évoque-t-elle le scandale des Panama Papers, dans lequel apparaît le nom de Patrick Drahi ? « Vous avez vu la réaction des gens qui ont été cités ? Ils se défendent c’est normal. Patrick Drahi, par exemple, qui reconnaît avoir une société, mais rien d’illégal. (…) Est-ce que finalement c’est la bonne méthode de jeter en pâture des noms de personnalités, sans qu’elles aient vraiment la possibilité de se défendre ? »explique  ainsi l’animateur Olivier Truchot dans son émission BFMStory...

Voir l’organigramme de l’empire industriel de Patrick Drahi, réalisé par l’économiste Benoît Boussemart et publié par Le Canard enchainé (Cliquez ici  pour voir  en grand) :


Autre problème, les proximités entre patrons de presse et politiques. C’est Nicolas Sarkozy, proche de Bernard Arnault, qui annonce  en 2007 aux journalistes des Echosle nom de leur nouveau patron ! Car ces richissimes propriétaires de presse entretiennent quelques affinités avec des responsables politiques : lors du mariage de Nicolas Sarkozy avec Cécilia Ciganer-Albéniz, les deux témoins sont… Bernard Arnault et Martin Bouygues. C’est sur le yacht d’un autre ami, Vincent Bolloré, que Nicolas Sarkozy choisit d’aller se reposer après son élection en 2007. « Arnaud est plus qu’un ami, c’est un frère »déclare  encore Nicolas Sarkozy à propos de l’héritier Lagardère. Enfin, il compte Serge Dassault parmi les clients de son cabinet d’avocats. La moitié de ces dix propriétaires de presse sont des proches de l’ancien président. Bref, question indépendance, on repassera !

Quel que soit l’impact réel de ces connivences et les éventuelles pressions, les dégâts du soupçon – le fait que ces riches patrons se trouvent en conflit d’intérêts, en situation de pouvoir abuser de leur position pour leur intérêt propre – sont bien là. Cette simple suspicion produit une délégitimation du secteur de la presse. Conséquence : seuls 34% des Français estiment que les médias fournissent des informations dignes de confiance. Plus de deux tiers des Français pensent que les médias subissent des pressions commerciales ou politiques qui impactent les informations délivrées [3 ].

Licenciements et coups de pression

Lorsqu’on est journaliste, peut-on travailler en toute indépendance dans cette situation ? Quelques exemples – la face visible de l’iceberg des pressions souterraines ! – montrent que ce n’est pas le cas : l’ingérence de ces patrons est bien réelle. Certains ont une fâcheuse tendance à faire le ménage en arrivant, pour mettre à la tête des médias des dirigeants compatibles avec leurs intérêts, avec pour mission de purger les rédactions. Un cas d’interventionnisme remarqué fut la nomination de Guillaume Zeller, catholique traditionaliste, comme directeur de l’information du groupe Canal+, par Vincent Bolloré. Ce dernier semble vouloir actuellement enterrer Canal+, après avoir vidé de ses forces vives la rédaction d’iTélé, rebaptisée CNews, après la plus longue grève de l’histoire de la télévision.

Il semble ne plus y avoir de limites à ce « grand ménage ». En 2016, Aude Lancelin, directrice adjointe de la rédaction de L’Obsest licenciée  pour des raisons politiques. En 2017, Olivia Recasens, directrice adjointe de la rédaction du Point, est limogée  du jour au lendemain, pour faute grave, et pour des motifs réels tout aussi inavouables. Autant de coups de pression, qui envoient un message clair aux rédactions : pas de vagues, rentrez dans le rang !

Ingérence et censures

Le patron de M6, Nicolas de Tavernost, avoue  avoir exercé des pressions sur les journalistes de la chaîne pour « ne pas contrarier des clients ». Il explique ainsi avoir censuré une émission de Capital sur la téléphonie. Autre cas notable, la censure  par Vincent Bolloré d’une enquête sur le Crédit mutuel, qui devait être diffusée par l’émission « Spécial investigation » sur Canal+. Un simple coup de fil a suffi pour contenter la banque, partenaire de Vincent Bolloré, qui ne voulait pas voir sortir cette enquête. Reporters sans frontières et le collectif « Informer n’est pas un délit » dénoncent  par ailleurs la censure et la déprogrammation de quatre documentaires qui devaient être diffusés par Canal+.

Un autre risque, plus pervers car plus discret, est l’autocensure de journalistes. Des journalistes qui veulent bien faire leur métier, mais qui n’osent plus proposer des articles sur des sujets sensibles, ou qu’ils savent problématiques pour le propriétaire de leur média. Sans compter les pressions économiques, avec les suppressions de postes et des moyens nécessaires à tout travail d’enquête. Promouvoir des logiques managériales « musclées », imposer des contraintes économiques fortes sur la production de l’information, précariser les rédactions mises en permanence sur la sellette, bref, promouvoir une information low cost, est aussi une forme de censure.

A cette liste des moyens de censure, il faudrait ajouter les « poursuites baillons », dont l’objectif est de dissuader les médias de s’emparer de certaines affaires (lire notre article « Bolloré, la presse et les poursuites ‘homéopathiques’ en diffamation  »). Ou les mesures de rétorsion, comme celle de Bernard Arnault, ulcéré par le titre « Casse-toi, riche con » de Libération, lors de sa demande de naturalisation en Belgique en 2012, et qui décide de couper  les budgets de publicité alloués par le groupe LVMH au quotidien.

Comment cela évolue-t-il ?

Pas vraiment vers davantage de pluralisme ! En quelques mois, en 2015, on a vu le rachat par Patrick Drahi de Libération et du cinquième groupe de presse magazine en France, Express-Roularta, ainsi que sa prise de participation (à 49%) dans NextRadioTV (BFMTV, RMC). A la même période, Bernard Arnault, déjà propriétaire des Échos, rachète Le Parisien et Aujourd’hui en France, le groupe Le Monde rachète L’Obs, et Vincent Bolloré prend le contrôle de Canal +, via Vivendi. Des banques sont également entrées dans ce jeu de Monopoly. Le Crédit mutuel est ainsi devenu en dix ans l’unique propriétaire du groupe EBRA, premier groupe de presse quotidienne régionale, implanté dans l’Est de la France (Le Dauphiné libéré, Le Progrès, Dernières Nouvelles d’Alsace, L’Est républicain…[4 ]. Et le Crédit agricole est devenu actionnaire de journaux régionaux, comme La Voix du Nord et Le Courrier picard (via le groupe belge Rossel).

Ce petit milieu multiplie les participations croisées [5 ]. En parallèle de cet accaparement, ces milliardaires ont mis la main sur l’ensemble de la chaine de production. Exemple avec les entreprises de production de contenus : c’est Lagardère qui produit pour France 5 les émissions « C dans l’air », par l’intermédiaire de sa société Maximal Productions. Ces oligarques sont aussi propriétaires des « tuyaux » de diffusion, comme les « box » (FreeBox, Bbox, Box SFR) qui permettent la diffusion dans tous les foyers de France d’internet et de la télévision. Une intégration « verticale » qui concentre la diffusion d’une grande part de l’information entre les mains de ceux qui détiennent les clés de sa production.

L’information devient ainsi un produit comme les autres : l’opérateur de télécoms SFR propose ainsi une box Internet « à partir de 19,99 euros par mois », avec, pour le même tarif, l’abonnement numérique à 18 journaux. « Une machine à tuer le journalisme de qualité »estime  Le Point. Un peu comme un cadeau bonus. On achète le tuyau – une connexion web – et on gagne en prime un produit secondaire, des médias.

En quoi cela nous concerne tous ?

On pourrait se dire que chaque société a les médias qu’elle mérite. Ou que chacun lit, écoute, regarde ce qu’il veut. Que tout le monde peut faire son propre tri dans le flot médiatique. Sauf que les médias ne sont pas un business comme un autre. Défendre l’indépendance de la presse, ce n’est pas un combat « corporatiste », un « truc de journalistes » qui se battraient pour leur outil de travail. Il ne peut pas y avoir de démocratie forte, voire même de démocratie tout court, sans citoyens informés, et bien informés. L’information est un bien public. Autant de médias sous contrôle d’une petite oligarchie, véritables chiens de garde du néolibéralisme, c’est une atteinte à nos libertés fondamentales.

Cette situation n’est pas une fatalité. Lutter contre tout ce qui encourage la concentration des médias et leur financiarisation est possible (voir les propositions de la campagne #LibertéEgalitéInformés). On pourrait mettre en place des dispositifs anti-concentration plus exigeants. Ou interdire le contrôle de médias par des entreprises qui dépendent de marchés publics – Bouygues, Dassault,... – comme le propose l’association Acrimed. Ou conditionner le versement des aides à la presse aux médias qui ne sont pas détenus par des milliardaires, dont les intérêts principaux ne sont pas dans le secteur de la presse. Voire même, soyons fous, limiter ces aides aux médias à but non lucratif, qu’ils soient privés, coopératifs ou associatifs.

Il est nécessaire que ces propositions et réformes salutaires – ou d’autres ! – soient discutées et débattues. Mais aussi les conditions qui favoriseront l’émergence, le développement et la consolidation de médias indépendants, pour garantir le pluralisme de l’information en France. Défendre et faire vivre une presse libre ne semble malheureusement pas une priorité pour bon nombre de candidats à l’élection présidentielle.

Et en plus ces médias sont gavés d'argent public (voir les chiffres).

Agnès Rousseaux



LA GUERRE D'ALGERIE N'A PAS EU LIEU

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LA GUERRE D'ALGERIE N'A PAS EU LIEU

 


AYANT Michel Cornaton. La Guerre d’Algérie n’a pas eu lieu – Du déni à l’oubli, chronique d’une tragédie

Michel Cornaton est l’auteur d’une œuvre importante, dans les deux acceptions du terme. Entre autre d’une étude sur les camps de regroupement en Algérie dont j’ai rendu compte ici. Dans son étude et sa dénonciation de ces camps, il s’opposa à Pierre Bourdieu, dont la démarche, ou plutôt l’absence de démarche, fut une faute grave.

Toutes les vies sont des romans. Á condition de savoir les raconter, c’est-à-dire de partager ce postulat de Roland Barthes selon lequel le monde a été créé pour se terminer dans un livre. Avec Michel Cornaton, nous sommes servis. Trop bien, dirais-je. Avec le volumineux récit qu’il nous fournit, il aurait pu écrire deux ouvrages. Le titre est en effet un peu trompeur car la Guerre d’Algérie, qui fut la grande affaire, la grande cause de sa vie, n’occupe en gros que la moitié du livre.

Né dans un milieu modeste de la région de Bourg-en-Bresse, Cornaton fut tout : fils, petit-fils, écolier, séminariste, sportif de bon niveau, soldat, père de famille, travailleur en usine, professeur des universités, syndicaliste, sociologue, psychologue.

Il y a chez Cornaton une force intellectuelle tranquille et désarmante à laquelle je me suis frotté pendant des années à Abidjan, quand il introduit mine de rien un argument, une réflexion dans la conversation, avec humour et en soulevant, en un effort feint, des montagnes d’esprit qui désarçonnent. « Parler c’est vivre », disait Claude Halmos. Dans cette Guerre d’Algérie n’a pas eu lieu, Cornaton libère la parole, le discours et le langage dont il dénonce la « dénaturation » : « Á leur retour au pays, la plupart des deux millions de jeunes hommes enrôlés n’ont rien pu dire sur l’enfer vécu en Algérie ».

Pour retrouver et dire les mots de ses souvenirs – il a la chance (?) d’être hypermnésique – il a installé dans son récit un double de lui-même qu’il observe avec une distance légère. Mais avec la précision et les exigences d’un entomologue, à la recherche des « vies obscures » (Virginia Woolf) ou des « vies minuscules » (Pierre Michon). Dans le monde bressan du petit Michel, on va au cinéma (le Vox) une fois par an. Alors on en parle avant, pendant et après pendant des jours. Des cousines s’appellent Anthelmette. On écoute « La famille Duraton » grâce à Radio Luxembourg  (ah ! Ded Rysel, Jean Carmet jeune…). On vibre à “ Quitte ou double ” de Zappy Max et au “ Radio Crochet ” de Jean Nohain. Au séminaire, chacun est tétanisé par le crime monstrueux de l’abbé d’Uruffe. Mais « Face au “ S ” du Scandale, la stratégie des trois “ S ”, Silence-Sacré-Secret, a parfaitement opéré. » Quant à la vie militaire, c’est « un monde du “ je ne veux pas le savoir ”, du “ marche ou crève ”, le mieux étant, une nouvelle fois, de rentrer dans sa coquille et de brancher le pilotage automatique. » Un monde où, dans les dortoirs, un muret sépare les vrais Français des FSNA (Français de souche nord-africaine). Un monde de conditionnement, de harcèlement dont on s’échappe un instant en allant voir Et Dieu créa la femme (avec « Brigitte Bardot à poil »).

Quant à la sale Guerre d’Algérie qui n’a jamais dit son nom (on parlait d’« événements », de « pacification »), cette horreur traumatisa à jamais Michel : 1500 condamnations à mort, « en ne comptabilisant que ceux qui eurent droit à un procès, sans que figurent non plus dans les statistiques tous ceux qui furent pendus, étranglés, jetés d’avion ou d’hélicoptère, et nombre de ceux qui furent exécutés à l’occasion des “ corvées de bois ”. Il y eut 222 hommes guillotinés [et non fusillés car ils ne s’agissait pas de soldats en guerre mais de bandits de grand chemin] entre 1956 et 1962, l’équivalent du quart de l’épuration officielle de la Seconde Guerre mondiale. Sur ces 222, les quarante-cinq premiers le furent sous la responsabilité de François Mitterrand qui, du temps où il fut Garde des sceaux, refusa systématiquement le recours en grâce. » Sans parler des prisonniers abattus en campagne d’une balle dans le dos parce qu’il fallait faire du chiffre. Chaque jour de cette guerre durant laquelle Michel parvint à ne jamais tirer sur un adversaire, dix soldats français moururent, cent furent blessés. La France officielle écrivit l’histoire de la Guerre d’Algérie avec une gomme. Par exemple, en amnistiant en 1962 les coupables d’infractions commises dans le cadre de la répression contre l’insurrection algérienne et en effaçant en 1968 toute peine pénale en lien avec la Guerre d’Algérie.

Cornaton retourna en Algérie pour y étudier, en vue d’une thèse, les centres de regroupement, zones où les occupants français concentrèrent des centaines de milliers de civils. Il trouva sur son chemin Pierre Bourdieu, pour qui l’Algérie était un peu une chasse gardée : « L’histoire ne m’intéresse pas. L’urgence que vous évoquez n’est pas là. Vous pouvez me dire l’intérêt d’étudier des centres de regroupement qui n’existent plus ? Les habitants en sont partis et ils n’y remettront pas les pieds. » Ce à quoi Cornaton répondit : « Ce n’est peut-être plus le cas. Je viens seulement de redécouvrir le pays et m’apprête à y retourner prochainement. Sans les rechercher particulièrement, j’ai pu apercevoir nombre de regroupements habités. Vous avez les nouveaux arrivants qui ont pris la place de ceux qui s’étaient dégroupés. Vous avez des milliers, pour ne pas dire des millions d’Algériens qui continuent à vivre en marge de leur société. » Michel (ou son double d’écriture ?) fut alors à deux doigts de flanquer une grosse baffe dans la figure du prestigieux sociologue. Il eut, en fin de comptes, le grand mérite de soutenir, en France, la première thèse sur la Guerre d’Algérie.

Le négationnisme de la France officielle poursuivra Cornaton jusqu’à l’université de Lyon 2 où il sera nommé professeur et terminera sa carrière universitaire. Par une ironie dramatique dont la France a le secret, c’est dans la ville de Marc Bloch où s’est illustré Jean Moulin qu’a fleuri le pire des négationnismes. Á Lyon 1 et Lyon 3, l’établissement que la bourgeoisie lyonnaise considère comme « son » université, de manière militante, et à Lyon 2 de manière moins ostentatoire mais pas moins efficace. Dans une page très courageuse, Michel Cornaton fait le tour de la question : « Lyon a revêtu les deux aspects d’une capitale de la résistance et de la collaboration puis du révisionnisme. l’Université Claude Bernard Lyon 1 s’est empêtrée toute seule dans l’affaire de l’eugéniste Alexis Carrel, dont la Faculté de médecine portera le nom avant d’être rebaptisée Laennec, sous la pression de l’opinion publique. L’Université Lyon 3, paradoxalement nommée Jean Moulin, au moment où elle réussissait à se défaire d’une partie de ses oripeaux de la honte, n’a pas été capable de régler par elle-même la question Notin, un enseignant négationniste. Quant à Lyon 2, elle n’a rien trouvé de mieux, en 1987, que de choisir comme parrains deux Bisontins, les frères Auguste et Louis Lumière, au long passé pétainiste  [et admirateurs du fascisme italien]. Le palmarès révisionniste de Lyon 2 ne manque pas d’être éloquent lui aussi : Robert Faurisson en lettres, Pierre Zind, un frère mariste enseignant en sciences de l’éducation, plus tard François Robert, un ex-collaborateur d’une revue négationniste. »

Malgré l’utilisation d’un double, d’un intercesseur (ou peut-être grâce à), on peut dire qu’il n’y a pas l’épaisseur d’une feuille de papier à cigarette entre l’œuvre et l’homme. Michel Cornaton ne reconstruit pas son passé : il le déconstruit pour en offrir une vision construite bourrée de sens. L’empathie qu’il éprouve pour son double est contagieuse. Comme Montaigne, c’est lui-même qu’il peint mais il n’a pas besoin d’avertir son lecteur que son œuvre est « de bonne foi ». Comme Montaigne il « forge son âme ». Il quête ce que les Allemands appellent Erfahrung, c’est-à-dire l’expérience accumulée, et il nous en donne l’origine. Et comme son écriture est aussi précise que limpide, on sort enrichi et heureux de l’avoir lu.

Paris : L’Harmattan, 2018.

Illustration : Michel Cornaton derrière le poète Jean Tardieu

URL de cet article 32933 
https://www.legrandsoir.info/michel-cornaton-la-guerre-d-algerie-n-a-pas-eu-lieu-du-deni-a-l-oubli-chronique-d-une-tragedie.html
   

GROUPE MANOUCHIAN - In memoriam.

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GROUPE MANOUCHIAN - In  memoriam.


La célèbre "Affiche rouge" fut placardée par l'occupant allemand et les services de Vichy pour dresser la population française contre une résistance composée d'étrangers et notamment de Juifs.
Le groupe Manouchian, issu de la Main d'Oeuvre Immigrée, puis FTP-MOI,  s'était illustré par une série d'attentats contre les nazis et les collaborateurs.
Le rôle du PC de l'époque dans la "gestion"  d'un groupe qui échappait tant soit peu à sa  stricte  "gouvernance"  idéologique et opérationnelle fait encore l'objet de débats dans lesquels nous n'entrerons pas.
Il nous paraît uniquement  essentiel, en cet anniversaire de l'exécution du groupe au Mont Valérien, de mettre l'accent sur le fait que des immigrés se sont dressés avec courage  contre l'occupant  et ont payé de leur  vie leur attachement à la France.
u zinu





http://mai68.org/spip2/spip.php?article1314



di 22 février 2018, par anonyme (Date de rédaction antérieure : 22 février 2018).
Le 21 février 1944… Les Résistants du groupe FTP - MOI, Manouchian étaient fusillés par les nazis
Ce 21 février 2018, n’oublions pas le 21 février 1944 !
Bonsoir
Des résistants du Groupe FTP MOI de Missak Manouchian ont été fusillés par les nazis au mont Valérien. Notre devoir est de rendre hommage en ce jour anniversaire à leur sacrifice. Ils ont donné leur vie pour que la France retrouve son indépendance et sa Liberté. Cet engagement total jusqu’à la mort a permis de vaincre l’Allemagne et de s’opposer à son hégémonie. L’Europe allemande était déjà le projet d’Hitler. Puisse cet hommage nous rappeler à nos devoirs élémentaires et à nous sortir de cette léthargie qui permet à nos adversaires toutes les audaces pour détruire les conquis de la Résistances !
N’oublions pas que celui qui oublie l’histoire est condamné à la revivre.
Lucien Pons   -   LE BLOG DE LUCIEN PONS ( en  LIEN sur " u zinu" )    
lucien-pons.over-blog.com/


Lettre écrite par Missak Manouchian à sa femme Mélinée le 21 février 1944 à la prison de Fresnes, quelques heures avant que le chef du groupe de résistants, Manouchian soit fusillé au fort du Mont Valérien :

« Ma Chère Mélinée, ma petite orpheline bien-aimée,
« Dans quelques heures, je ne serai plus de ce monde. Nous allons être fusillés cet après-midi à 15 heures. Cela m’arrive comme un accident dans ma vie, je n’y crois pas mais pourtant je sais que je ne te verrai plus jamais. Que puis-je t’écrire ? Tout est confus en moi et bien clair en même temps. Je m’étais engagé dans l’Armée de Libération en soldat volontaire et je meurs à deux doigts de la Victoire et du but. Bonheur à ceux qui vont nous survivre et goûter la douceur de la Liberté et de la Paix de demain. Je suis sûr que le peuple français et tous les combattants de la Liberté sauront honorer notre mémoire dignement. Au moment de mourir, je proclame que je n’ai aucune haine contre le peuple allemand et contre qui que ce soit, chacun aura ce qu’il méritera comme châtiment et comme récompense. Le peuple allemand et tous les autres peuples vivront en paix et en fraternité après la guerre qui ne durera plus longtemps. Bonheur à tous… J’ai un regret profond de ne t’avoir pas rendue heureuse, j’aurais bien voulu avoir un enfant de toi, comme tu le voulais toujours. Je te prie donc de te marier après la guerre, sans faute, et d’avoir un enfant pour mon bonheur, et pour accomplir ma dernière volonté, marie-toi avec quelqu’un qui puisse te rendre heureuse. Tous mes biens et toutes mes affaires je les lègue à toi à ta sœur et à mes neveux. Après la guerre tu pourras faire valoir ton droit de pension de guerre en tant que ma femme, car je meurs en soldat régulier de l’armée française de la libération. Avec l’aide des amis qui voudront bien m’honorer, tu feras éditer mes poèmes et mes écrits qui valent d’être lus. Tu apporteras mes souvenirs si possible à mes parents en Arménie. Je mourrai avec mes 23 camarades tout à l’heure avec le courage et la sérénité d’un homme qui a la conscience bien tranquille, car personnellement, je n’ai fait de mal à personne et si je l’ai fait, je l’ai fait sans haine. Aujourd’hui, il y a du soleil. C’est en regardant le soleil et la belle nature que j’ai tant aimée que je dirai adieu à la vie et à vous tous, ma bien chère femme et mes bien chers amis. Je pardonne à tous ceux qui m’ont fait du mal ou qui ont voulu me faire du mal sauf à celui qui nous a trahis pour racheter sa peau et ceux qui nous ont vendus. Je t’embrasse bien fort ainsi que ta sœur et tous les amis qui me connaissent de loin ou de près, je vous serre tous sur mon cœur. Adieu. Ton ami, ton camarade, ton mari. Manouchian Michel. P.S. J’ai quinze mille francs dans la valise de la rue de Plaisance. Si tu peux les prendre, rends mes dettes et donne le reste à Armène. M. M. »


Le groupe Manouchian était composé de :

· Celestino Alfonso (AR), Espagnol, 27 ans
· Olga Bancic, Roumaine, 32 ans (seule femme du groupe, décapitée en Allemagne le 10 mai 1944)
· Joseph Boczov [József Boczor ; Wolff Ferenc] (AR), Hongrois, 38 ans - Ingénieur chimiste
· Georges Cloarec, Français, 20 ans
· Rino Della Negra, Italien, 19 ans
· Thomas Elek [Elek Tamás] (AR), Hongrois, 18 ans - Étudiant
· Maurice Fingercwajg (AR), Polonais, 19 ans
· Spartaco Fontano (AR), Italien, 22 ans
· Jonas Geduldig, Polonais, 26 ans
· Emeric Glasz [Békés (Glass) Imre], Hongrois, 42 ans - Ouvrier métallurgiste
· Léon Goldberg, Polonais, 19 ans
· Szlama Grzywacz (AR), Polonais, 34 ans
· Stanislas Kubacki, Polonais, 36 ans
· Cesare Luccarini, Italien, 22 ans
· Missak Manouchian (AR), Arménien, 37 ans
· Armenak Arpen Manoukian, Arménien, 44 ans
· Marcel Rajman (AR), Polonais, 21 ans
· Roger Rouxel, Français, 18 ans
· Antoine Salvadori, Italien, 24 ans
· Willy Schapiro, Polonais, 29 ans
· Amédéo Usséglio, Italien, 32 ans
· Wolf Wajsbrot (AR), Polonais, 18 ans
· Robert Witchitz (AR), Français, 19 ans
 


« Vous n’avez réclamé la gloire ni les larmes
Ni l’orgue, ni la prière aux agonisants
Onze ans déjà, que cela passe vite onze ans /
Vous vous étiez servi simplement de vos armes
La mort n’éblouit pas les yeux des partisans. »….

Ça vous dit quelque chose bien sûr … ! Et oui, ce sont les sublimes vers de l’Affiche Rouge d’Aragon, qui rend hommage à Missak Manouchian et ses Camarades qui ont été fusillés le 21 février 1944 au Mont Valérian.
Adhérant au parti communiste en 1934, il rejoint également le HOC (comite de soutien à l’Arménie qui subissait alors le blocus allié). Puis, avec la montée du front populaire, Missak Manouchian est désigné comme rédacteur en chef du journal du HOC.
A la fin de l’année 1937, Manouchian est délégué au 9e congrès du PCF.
En février 1943, il rejoint le groupe des Francs-tireurs et partisans, un groupe armé constitué par Boris Holban, Juif de Bessarie.
Il va créer alors son réseau « le réseau Manouchian » constitué de 23 résistants communistes, « étrangers et nos frères pourtant… », Espagnols, Italiens, Arméniens, et Juifs, 22 hommes et une femme…
Constitué et organisé entre la fin de l’année 1942 et février 1943, le réseau Manouchian fait partie du groupe de résistance des « Francs-tireurs et partisans – main-d’œuvre immigrée » (FTP-MOI).
Composé de 23 communistes (dont 20 étrangers : espagnols, italiens, arméniens et juifs d’Europe centrale et de l’est), le réseau effectue de nombreux attentats et actes de sabotages contre l’occupant nazi.
Arrêtés en novembre 1943, ses membres sont jugés lors d’un procès qui se déroule devant le tribunal militaire allemand du Grand-Paris, du 17 au 21 février 1944. Ils sont condamnés à mort et fusillés le 21 février au fort du Mont-Valérien..
La seule femme du groupe, Olga Bancic, fut décapitée le 10 mai.
À l’heure où le buste de Manouchian, qui surplombe le port de Marseille, vient de subir des profanations répétées de « sympathisants d’extrême droite ». il est encore plus urgent de rendre hommage à nos Camarades, qui ont donné leurs vies pour notre liberté.

 

GROUPE MANOUCHIAN - In  memoriam.

GROUPE MANOUCHIAN - In  memoriam.

TARNAC ... coucou, le revoilou !

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TARNAC ... coucou, le revoilou !
U Zinu écrivait à peu près ceci à l'époque  :
 
Il se peut que la baudruche, mal gonflée, ou trop précipitamment gonflée, se dégonfle. Après le déchainement médiatiquement orchestré, nous bénéficierons de petits entrefilets en dernière page.
Les dangereux anarcho-gauchistes pourront alors dire comme Virenque : "c'était à l'insu de notre plein gré".
L'extrême gauche ne faisant plus trembler dans les chaumières, voila qu'apparaît l'ultra gauche.
Après le péril rouge, devenu concept inopérant, après l'épouvantail islamique, voici le péril anarcho-gaucho, branché caténaires, et de surcroît lié à la nébuleuse étrangère (allemande de préférence, pour nous rappeler opportunément la bande à Baader).
M.A.M a enfin l'air de servir à quelque chose.
Ceci étant, les commentaires vont bon train mais varient en fonction de ceux qui les énoncent:
 
- Le gogo ultra sécuritaire: "Bravo Sarko ! fusillez moi tous ces Rouillans" !
- Le doux anar : "C'est pas moi, c'est les autres, les méchants néo gauchos"!
- Trissotin : "Nous l'avons en dormant, Madame MAM, échappé belle".
- Le prof de philo: "Lisez l'allégorie de la caverne" : il y a le vrai et l'illusion du vrai".
- Le philosophe de café du commerce: "la fiction dépasse la réalité".
- Le disciple de Netchaïev: "relire l'article 2 dans le catéchisme du révolutionnaire ".
- Le vieux policier blasé : "je connais ce genre de ficelle".
- Le hiérarque policier: "méthode classique mais mauvaise exécution"
- Le chat échaudé : "la manipulation existe, je l'ai rencontrée".
- Le nihiliste obstiné : "Ah, les cons, ils se sont laissé infiltrer".
- Le bon syndicaliste : " C'est pas nous ! Nous, on respecte l'outil de travail".
- L'usager du rail : " ..... ils devraient commencer par me respecter".
- Le manifestant avisé : "c'est comme pour les casseurs, y a des cagoulés provocateurs".
- Le patriote exalté : "je sens la main de l'étranger".
- Le barbu : "pour une fois c'est pas la faute à l'Islam".
- Le nationaliste corse : "nous c'est pas notre affaire".
- Dupont la joie: "cocorico". Vive Sarko".
- Sherlock Holmes : "manipulation élémentaire, mon cher Watson".
- Le bobo ingénu : "croire ou ne pas croire, that's the question".
- La gauche socialo-démocrate : "il faut respecter l'ordre républicain".
- La gauche pas encore établie : "cela ne fait pas partie de nos méthodes, mais ….".
- la mercière : "tout ceci est cousu de fil blanc".

Observons aujourd'hui que MAM la tunisienne a disparu des radars , et que le chêne qu'elle pensait être n'est plus qu'un roseau oublié. Sic transit gloria mundi.

 

 

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